LUCIEN REBATET. LES DÉCOMBRES, GRUZ 3/6

 

 

 

III

L’ALPIN

CHAPITRE XIV

COMPAGNIE DE PASSAGE

Je n’ai pas eu droit aux adieux gare de l’Est, toujours fort héroïques et dramatiques, même quand on va rejoindre un bataillon régional à Meaux. Je suis parti en guerre par la gare de Lyon, nuitamment et sans le moindre panache.

Un froid noir de vingt degrés soufflait sur Paris. Dans le rapide caparaçonné de glace s'entassaient plusieurs centaines de mobilisés : deux wagons de Berbères marocains, authentiques fils du Prophète, en turbans, babouches et gandourahs rayées, opposant un fatalisme imperturbable aux mystères de leur périple et aux frimas, des Tchèques de tous âges, uniformément saouls à mort et vociférant sans arrêt de sinistres mélopées, des Slovaques à peine moins ivres et redoutant beaucoup d'avoir des officiers tchèques, une escouade de Polonais et des maçons italiens. Nous n'étions que deux Français, l'autre en uniforme et même de l'active, un chasseur des chars de Versailles qui gardait en août des prisonniers espagnols dans le Midi, perdu depuis par sa compagnie, repoussé par tous les bureaux, bourlinguant à loisir entre le pays et la cour du quartier, une situation bien agréable en somme, sauf pour le tabac.

Non, je n'aurais jamais imaginé ce départ-là.

Un mistral féroce, accumulant sur son passage d'énormes blocs de glace, déferle dans le ciel matinal. Je suis à Romans, lieu désigné de mes premiers exploits. Pas un planton à la gare. C'est au lampiste que j'ai demandé le chemin d'une quelconque caserne.

Je voudrais bien savoir quelle troupe va m'accueillir. Les premiers poilus que je croise ne tardent pas à me l'apprendre. Ils ont le béret et le numéro de l'infanterie alpine. C'est le 159, le Quinze-Neuf de Briançon, qui tient ici son dépôt de guerre. C'est un régiment qui a ses lettres de noblesse. Tant mieux. Je porterai du moins un brillant écusson. L'esprit de corps m’émoustille déjà.

Après de longs détours, j’arrive au bord de l'Isère, qui charrie de vraies banquises. Dans une brume subtile qui perce comme un mouchoir mes deux chandails et ma veste de ski, des silhouettes engoncées remuent péniblement, ramassent des morceaux de bois avec les gestes maladroits et gourds des vieilles de villages. De près, entre le passe-montagne et le gigantesque béret réglementaire, large comme une roue de voiture, apparaissent des morceaux de figures violacées et hirsutes, des nez qui commencent à geler, de farouches barbes de dix jours, puis des croquenots informes, des capotes terreuses où pendent de longs fétus de paille. Il y a un instant, j'étais au coeur d'une petite ville cossue, avec des vitrines bien tenues et bien garnies, de jolies filles brunes trottant gracieusement encapuchonnées. Il suffit de longer un cantonnement pour arriver dans un autre monde, aussi élémentaire que celui des Esquimaux.

Les troglodytes m'abordent avec beaucoup de bienveillance.

- T'es fascicule bleu ? C'est couillon d'arriver un samedi matin. T'aurais bien pu te payer encore la semaine anglaise. Enfin ! Il va falloir que tu montes au G. U. P. Ça ne se vaut pas avec ici. C'est des baraquements. De ce temps, il n'y fait pas drôle. Nous autres, on a des lits. On est plutôt peinards.

Voilà douze ans pleins que je n'ai endossé un uniforme. J'ai un instant de recul devant les sordidités entrevues. Manifestement, la défense de la France peut encore se passer aujourd'hui de mon renfort. Mais que faire dans cette ville où je ne connais personne, par ce froid inhumain ? Autant vaut franchir le pas tout de suite. Devant l'absence de tout renseignement et de toute consigne, je laisse parler le vieil instinct du fantassin qui remonte avec les odeurs surgissant d'une porte ou d'une fenêtre entrebâillée. J'aperçois une pancarte : cuisine de la C. H. R. Certainement, c'est le lieu d'élection pour le sans-gîte, encore ballotté entre l'état de civil et celui de soldat.

La cuisine occupe une espèce de boyau, où les eaux sales forment une redoutable patinoire, où sifflent et se croisent une douzaine de courants d'air. Au fond, une roulante réformée et une chaudière à cochons bouillonnent, environnées d'une poignante fumée. Des âcres nuages surgissent les cuistots, pareils à des ramoneurs qui seraient tombés dans une fosse de graissage.

Je comprends aussitôt que j'arrive au milieu d'un événement capital. L'équipe achève en effet la confection d'une immense choucroute. Des caporaux, des sergents, des secrétaires, des garde-magasins viennent à chaque instant s'enquérir de son état, goûter gravement au bout de la fourchette. Le chef-cuisinier, qui a vingt-cinq ou vingt-six ans, déplore l'absence de saucisses fumées pour accompagner le lard. Il me prend à témoin : “Tu te rends compte ! Faire une choucroute dans ce bordel-là ! Tel que tu me vois, dégueulasse comme ça, c'était moi qui faisais les grillades dans la salle chez Ledoyen, devant le client, en toque blanche”.

J'offre l'apéritif à la bande : “Bon, on va aller le boire chez Zizou, et puis après, si tu veux, on t'invite à manger la choucroute avec nous”.

Chez Zizou, c'est un étroit et minable caboulot, où prolifère une famille nombreuse et morose. Le pastis bu, nous réintégrons notre antre. Les premières tablées de soldats s'approchent, remuant leurs bouthéons. Devant la troupe, le cuistot-chef, comme de juste, reprend conscience de ses hautes fonctions, commande, tranche avec autorité. Ce n'est pas une petite affaire que de servir cette cohue. Et tous les hommes de la cuisine se sont couchés hier deux heures après tout le monde, pour bien blanchir la choucroute, levés une heure avant le réveil. Ils s'échinent treize ou quatorze heures par jour, dans des conditions inhumaines de froid, de sordidité, avec un matériel de romanichels. Mais ils restent gais, lestes. Ils chantent, dans le fracas des plats, avec leurs faces charbonnées et barbues :

Ah ! mon coeur a besoin d’aimer !

Et au passage on flanque une claque magistrale sur les fesses de Casimir, l'indispensable nabot de quarante kilos que l'on ne manque jamais de découvrir dans les recoins et bas lieux d'une caserne, qu’aucun major ne réformera jamais ; Casimir, de Vaison-la-Romaine, louchant des deux yeux, sautillant sur ses jambes de basset, dans un treillis qui a dû récurer toutes les gamelles du bataillon, à tout moment menacé d'être jeté par le fond de sa culotte dans la chaudière, mais qui toujours s'échappe, hilare et resquilleur.

Soudain, c'est le drame, aussi classique que peut l'être Casimir.

  • Nom de Dieu ! les bleus n'ont pas fait les peluches !

Le chef bondit, le regard tragique, l'imprécation aux lèvres. Les bleus, les gamins de la 39, pétrifiés par deux heures de tir en pleine campagne, forment dans le réfectoire une masse compacte et absolument inerte. La gamelle au poing, avec leurs calots plantés tout droit, cornes pointantes entre les oreilles écartées, ils considèrent le cuistot dans un morne silence, d'un oeil éteint, d'un air indiciblement obtus.

Les deux poings aux hanches, le chef épuise les ressources de son éloquence.

  • Alors, c'est comme ça que vous êtes, les bleus, cette année, encore plus fumiers que tous les fumiers qu'on a vus ? Ah ! là, bon Dieu ! Si vous saviez la chance que vous avez d’être bleus en pleine guerre ! Tandis que nous autres, en 34, en 35, quand on faisait les vraies classes, ce qu'on a pu en baver !

Autant vaudrai prêcher en serbo-croate ces conscrits qui ont déjà si bien appris à jouer la stupidité définitive.

Notre cuistot essaye d'une autre corde :

  • Voyons, les bleus, est-ce qu'il va falloir que ce soient les anciens qui s'y collent, pour pelucher les patates, des anciens qui ont dix ans, vingt ans de plus que vous, des anciens qui reviennent du front ? Si vous êtes dégoûtants à ce point-là, moi, je vous le dis, je ne vous sers plus. Plus jamais. Vous les mangerez crues, les patates. Parce que si on n'est pas capable de vous faire les pieds en compagnie, moi, je vous garantis que le vous les ferai.

Les camarades mobilisés me l'avaient tous assuré : “Tu verras, en une heure de temps, on est repris par la vie militaire”. C'est à mon tour d'en faire la rapide expérience. Je ne suis pas encore porté “entrant”, je suis encore vêtu en civil. Mais la harangue du cuisinier m’a consacré avant l'immatriculation des bureaux. Je croirais n’avoir jamais quitté les abords de ces fourneaux primitifs. J'approuve, je commente avec les mots des vieux soldats.

Enfin, un bleusaillon qui a dévoré sa gamelle se lève à regret, traînant ses galoches jaunes, prend lentement une patate et la gratte avec des gestes épuisés de martyr. Deux, trois, six bleus l'imitent, Quelques anciens se joignent au groupe, d'un air détaché, en amateurs. Les “peluches” seront assurées, comme hier et comme demain.

C'est à notre tour de pénétrer dans le réfectoire, au milieu des reliefs épouvantables de cent cinquante gamelles. J'appelle à moi tout mon courage. Un coup d'oeil m'a suffi pour m'ôter le moindre espoir de découvrir, sur les planches raboteuses qui servent de table, cinquante centimètres carrés où je sois sûr qu'aucun godillot ne s'est posé. Mais la fameuse choucroute me dissimule bientôt l'aspect inquiétant de mon écuelle d'étain. Elle est à point, digne d'une bonne brasserie d'Alsace. Par une suite de miracles permanents, la nourriture est arrivée presque propre jusqu'à nous. Le vin, le café, le rhum coulent généreusement, comme dans toutes les cuisines de l'armée entière.

“Maintenant, corvée de charité. On va donner à boulotter eux pauvres”, commande le chef. J'empoigne avec lui un plat de campement. A la porte, cinq ou six vieilles et quelques gamins attendent l'aubaine. Il y a aussi un vieux, livide, habillé d'une veste de velours et d'une casquette encore convenables. Les femelles, ruées sur la choucroute, le bousculent férocement :

  • Qu'est-ce qu'il a, celui-là, à venir ici nous prendre notre manger ? Y touche une pension.

Le profiteur, brusquement, s'effondre. Son nez se pince, il devient cadavérique. Le froid l'a terrassé, on le relève. Il n'est pas tout à fait mort. Il geint : “Ma gamelle, je veux ma gamelle, moi aussi”. On l'emporte chez Zizou, on le colle au poêle. Il tremble de tout son corps et n'est guère moins vert.

Il habite à un petit kilomètre de là. Deux poilus, bons bougres, se lèvent :

  • On pourrait peut-être bien l'emmener. On le couchera et on fera réchauffer sa croûte.

L'idée de ce secours semble ramener un peu de vie chez le bonhomme. Il part, les genoux cassés, presque porté à bout de bras par les deux alpins :

  • De combien est-elle, sa pension?
  • Oh ! ça doit aller chercher dans les cent vingt francs par mois.

Le rhum et la choucroute de la C. H. R., le marc de chez Zizou ont parachevé mon acclimatation. Je confesserai même qu'après quatre mois de guerre parisienne, j'ai reconnu joyeusement ces vieux fumets militaires d'insouciance et de fraternité. J'ai parcouru avec le plus patient sourire le long périple des bureaux. Les quinquagénaires en blouses et culottes grises, les agents militaires, hybrides de clercs d'huissiers et d'adjudants recuits, y démontrent par un olympien et sourcilleux “farniente” leur écrasante dignité au bataillon de scribes en uniforme qui gravitent sous eux. Je suis parvenu, avec force persévérance, à me faire incorporer sur leurs papiers, et ma campagne s'est incontinent ouverte par une permission jusqu’au lundi matin.

L'écusson du Quinze-neuf m'inspire une héroïque rêverie. Dans cet aimable café où j'ai établi mon bivouac, j'entame devant le dixième alcool du jour une série d'épîtres enthousiastes à mes amis de Paris. Kerillis, Daladier, Israël se sont volatilisés. Seule désormais compte au monde l'infanterie alpine. Le sort m'a désigné pour une arme d'élite. J'accepte son décret avec un joyeux orgueil. Je me battrai donc dans la plus vaillante biffe. On m’impose la guerre. Soit. Nul ne la fera mieux. Je repose mes pensées sur ces images épiques. Elles s'estompent, s’emmêlent. Je m'endors dans le sein de la plus pure gloire, et je plonge en avant, le nez sur mon papier.

Une main s'est posée sur mon épaule. J'émerge lentement, assez pâteusement. J'ai déjà vu quelque part ce grand diable cordial et cossu. Il se nomme. C'est Vossier, le délégué général du Parti Populaire Français à Romans. Il assistait l'an dernier à nos conférences lyonnaises. Il m'a reconnu à travers la vitre. Je me réveille tout à fait au milieu des cinq plus solides fascistes de la Drôme qui penchent en cercle sur moi leurs larges mains et leurs larges sourires.

Une pareille rencontre s'arrose. Il y a un gros pâté d'encre sur mon courrier héroïque. Je finirai ça demain. Buvons, dînons. Rebuvons, soupons, la saucisse aux herbes après les ravioles, la clairette de Die après l'Hermitage. A minuit, nous avons atteint les grands sommets politiques. Des nouvelles de Paris camarades ? Oh ! mais rien de plus simple ! C'est l'enviandage juif total et resplendissant, tous les aryens en kaki et tous les juifs à table. Ça a été un peu dur, mais maintenant ça y est bien. Le Front Populaire ? Blum ? C’était un essai timide. C'est maintenant le chef-d'oeuvre de la grande carambouille d'Israël. Comment ? Gagner la guerre ? Allons, soyons sérieux. Avec Gamelin gueule de fesse et Daladier pied au cul ? “Se faire enculer par les Juifs, c'est la nouvelle Alsace-Lorraine”. C'est Céline qui l'a dit, le génie, notre seul prophète, Louis Ferdinand Bardamu, père de la Patrie. Muy bien ! La vérité remonte sur le vin comme l'huile sur la flotte. Frères ! nous y voyons clair, et nous voyons la merde. Et nous y sommes pour un coup qu'on en sortira pas seuls. Mais aucune importance ! Le Quinze-neuf est bâti sur roche. Sieg ! heil ! Die Fahne hoch ! Et la crevaison des Anglais !

  1. de La Pérouse, écrivain d'Eglise et de guerre au Jour, a décrit les cantonnements climatisés de l'armée moderne, avec couchettes bordées, sommiers métalliques, vacuum cleaners, closets à chasse d'eau, sur quoi, tel le héros des Copains de Romains, s'est penché l'ardent et pieux général dont l'auteur tenait les basques : “Que l'on me montre tout. Ne négligeons aucun détail”.

J’aimerais voir ces messieurs à Romans-sur-Isère. Non point qu'y manquent les casernes, fort bien conditionnées, et assez spacieuses pour tenir quatre ou cinq bataillons. Mais elles constituent le fief inaliénable des bureaux sacrés - colonel, commandant d'armes, effectifs - des collections de réserve et de vingt gardes mobiles, ces derniers suzerains sur cent mètres de façade et quatre étages, avec mesdames et bébés. Certes, l'armée a perfectionné ses méthodes. Elle a toujours considéré que la vie d'un soulier était plus précieuse que celle d'un troupier qu'on remplace pour rien. Elle tient au chaud les sabres-baïonnettes et met les hommes pour ainsi dire dehors. Car on peut affirmer qu'il n'est pas un seul des habitacles choisis pour les trois mille fantassins de Romans qui possède véritablement un toit et quatre murs.

Le G. U. P., groupe des unités de passage, ayant le provisoire pour règle, se devait d'être le plus déshérité de ces locataires. Il campe sur une espèce de crassier, enclos de fils de fer, où s'enchevêtrent des débris de baraques foraines dont aucun Romanais ne peut se rappeler l'usage. Cela forme un dédale de niches, de hangars croulants, de tôles crevées, de planches disjointes, radoubées avec du carton, le tout rongé, rouillé par les pluies, chahuté par les vents, dans un décor de zone provinciale que jonchent des étrons séchés, des détritus d'usines en déconfiture, les monceaux de tessons et d'ordures domestiques de tout un faubourg, parmi lesquels achève de pourrir le cadavre d'une diligence jaune et noire, réformée pour le moins depuis le temps de Mac-Mahon.

Une centaine d'hommes “en passage” croupissent depuis tantôt quatre mois dans ce taudis, sur une infime couche de paille, qui hésite entre la vocation de poussière ou de fumier. La température intérieure, depuis trois semaines, se tient aux environs de dix degrés sous zéro.

C'est là que vient déferler l'invasion des fascicules bleus. J'étais un des premiers du lot. Ils débarquent maintenant à pleins wagons, à pleins cars. Tous ont été convoqués immédiatement et sans délai. La plupart ont sept, huit jours de retard. L'expérience récente de deux mobilisations leur a enseigné que, dans cette guerre, on pouvait prendre tout son temps. Il fallait encore faire ce charroi, rentrer ce charbon, on attendait la permission du beau-frère : “Allons, ben ! si après demain l'Onésime est pas là, faudra tâcher moyen d'y aller”. Ainsi se manifeste le libre arbitre de l'homme démocratique. L'armée ne peut faire autrement que de s'en accommoder, trop débordée aussi pour y regarder de plus près.

Les voici cent, deux cents, quatre cents, huit cents. Tous arrivent de Lyon ou des trois départements dauphinois, pour la majorité cultivateurs fort aisés des plus proches cantons de l'Isère et de la Drôme. Le premier contact ne laisse pas d'offrir quelques traits démoralisants. Entre autres, j'ai trente-six ans et deux mois. Je me crois et me sens encore en pleine jeunesse. Je vois autour de moi cette foule de paysans, au poil dur et grisonnant, noueux, marqués, travaillés en tous sens de rides profondes. Ce sont pourtant mes aînés, d'un an ou deux à peine, mes conscrits, souvent mes cadets. Dans l'autre guerre, enfant, c'était ainsi que je voyais les territoriaux.

Les Italiens, très nombreux, se distinguent assez mal à première vue, terrassiers, plâtriers, maçons vénitiens et lombards, souvent au pays depuis plus de trente ans, solides travailleurs, rougeauds, les mains et les épaules puissantes. Ce sont nos vétérans, tous quadragénaires, et tous anciens combattants, naturalisés ou non.

Dans le fond du baraquement le plus reculé, une grosse tribu s'est encore agglomérée, effarouchée, se serrant les coudes, le teint verdâtre ou plombé, le cou rentré, l'oeil inquiet et mouvant. Ceux-là sont les Arméniens de Valence et de Vienne. Et dans un lot compact de curés à bérets basques et bésicles, de facteurs, de douaniers en uniforme, surgit un clochard russe, en souliers vernis crevés, en vieux veston d'alpaga, défaillant de gel et de famine, les yeux révulsés, et qui demande aussitôt d'une voix agonisante le chemin de l'hôpital.

Après des heures et des heures où l'on a tourné au hasard, la valise à la main, le reste brinquebalant à l'échine, battant la semelle, toussant, soufflant dans ses doigts, verdissant, bleuissant, au milieu du crassier enfin les appels commencent, qui vont durer sans trêve ni répit cinq jours durant. Ce sont des cérémonies affolantes, hantées de fantômes inlassablement invoqués, avec tous les accents du désespoir et de la rage, une litanie inouïe où se bousculent les patronymes de Trébizonde avec les sobriquets naïfs de nos vieilles familles, les indicibles baptêmes des farceurs de l'assistance publique, un monologue de Bach dans un phonographe surréaliste :

- Akhanasarian Agop, Akhanasarian Ardzroun, Arsianian Eznig, Kalandarichvilian, Bombetta Pompeone, Djenderedjian, Dupont Louis, Khatchadourian, Kebabdjian, Kenadjian, Caille, Cocu, Kurkjian, Labitte, Perdrix, Cudagne, Katchadourian, Kherumian, Nigogossian Gronic, Nigogossian Setrac, Robin Paul, Tutundjan, le caporal Magnat Jules... On demande le caporal Magnat Jules. Enfin ! qui c'est qui l'a vu au moins une fois, Magnat jules ? Qui c'est comment qu'il est fait, bon Dieu ! ce caporal ?

Le sergent, qui vient des chasseurs et qui a été aussi gendarme, aphone, désespéré, crayonne et additionne pour la quarantième fois ses listes. Il a enfin déniché Papazian Stepane, mais c’est pour reperdre Papazian Sempad. Tout joyeux, il avait cent six hommes sur cent quatre vingt avant la soupe. Il lui en faut à cinq heures près de deux cent cinquante, et il n'en retrouve plus que quarante neuf. Autre méchef : il lui reste sur les bras soixante bougres, tout disposés à répondre, mais qui ne sont pas sur l'état. [1] homonyme, l'excellent sergent Rebatet Joseph, prévient affablement ses clients éventuels : “ Inutile de venir me faire chier, j'ai autre chose à foutre. Et d'abord, je n'ai rien pour vos gueules de lourds ”. A peine a-t-on distribué des gamelles et des couverts.

Les fascicules bleus ne se le font pas dire deux fois. Pas habillé, pas soldat. Autant ça dure, autant ça de pris. Ceux des patelins les plus proches sont déjà retournés en douceur à la maison. Les autres entrent et sortent sans arrêt. C'est à travers cent bistrots qu'il faudrait faire l'appel.

Une vaste et débonnaire philosophie anime ces paysans. Entre gens de bourgades voisines, beaucoup se reconnaissent aux portes des baraquements :

  • Tiens ! le Gustave ! Et alors ils t'ont donc embauché aussi dans cette entreprise ?

Une grosse poignée de mains calleuses, une bourrade sur l'épaule, et vite on entonne les deux premiers litres de blanc au plus proche café. Pour les villageois, la guerre est d'abord une sortie.

Mais si l'amertume est rare, le zèle est absolument nul. Un unique sujet défraie tous les propos : les visites d'incorporation qui vont bientôt suivre, et les chances que l'on a de dégoûter les toubibs. Tous les maux humains sont inventoriés, soupesés, et leur valeur à la bourse de la réforme débattue sans fin. Ce sont des maquignons qui flairent et tâtent leur propre viande, en discutent le prix avec de longs détours.

  • Moi, j'ai de l'emphysème. Si je passais à Valence, avec les certificats que je peux leur y montrer, j'aurais la réforme à tous les coups.
  • Moi, j'ai un cal osseux à un bras que je me suis cassé. Ça vaut au moins le changement d'armes.
  • C'est toujours ça de gagné. Dis donc, moi j'ai une bath éventration. Ça m'empêche pas dans mon travail, je suis regrolleur à Villeurbanne. S'ils pouvaient me filer sur les C.O.A. de Lyon ?
  • Moi, j'ai une fistule qui suppure depuis l'année dernière. Avec ça, dans l'active, on était sûr d'y couper.
  • Moi je suis auxiliaire, à cause que j'ai les pieds plats, et pour la vue. Et puis j'ai aussi de l'insuffisance thoracique et un ulcère de l'estomac. Avec ça j'ai pas à m'en faire...
  • Pas à t'en faire ? C'est à voir. A Grenoble, j'ai le beau-frère à ma femme qui a passé l'autre semaine. Ils en ont pris dans l'auxiliaire avec des ulcères, des types qui avaient des radios et qui pesaient pas cinquante kilos.
  • C'est tout de même malheureux à voir des choses pareilles. On est toujours les cons. On devrait être au courant des droits qu’on a.
  • Des droits ? T'as ceux qu'y te donnent. Non, ce qu'y faut, c'est avoir un cas à faire valoir. Ainsi moi, j'ai eu une pleurésie purulente. On m'a scié une côte. J'ai le poumon gâté et de la bronchite chronique. Ça, tu comprends, c'est un cas.
  • Oui, il a raison, s’écrie-t-on en le félicitant. Il faut faire valoir son cas. C'est comme moi...

Devant cet hôpital, je me crois tenu de dire :

  • Moi, je n'ai pas d'illusion, je suis bon comme la romaine. Je n'ai pas été malade depuis l'âge de quatorze ans et je fais le poids.

Ils hochent la tète en regrettant cordialement ma malchance.

  • Evidemment, si tu n'as pas de cas à faire valoir...

J'ai cependant trouvé un véritable convaincu, C'est mon ami Argoud, un riche paysan des environs de Valence. Nous avons franchi ensemble le portail chancelant de notre G.U.P., et nous voilà déjà très solidement liés. Nous sommes allés dîner ensemble dans un bouchon avec un de ses voisins. Argoud a une physionomie vive. Il raisonne avec sel de l'armée et du funeste Front Populaire ; J'approuve vigoureusement en chargeant la juiverie. Argoud riposte sur le champ, l'air fort scandalisé :

  • Oh ! mais tu parles comme Ferdonnet, toi ! C'est de l'hitlérisme. Moi, je suis catholique pratiquant, mais je suis contre la haine religieuse. Ça n'est pas vrai que les Juifs ont voulu la guerre. C'est Hitler qui dit ça pour faire marcher tes nazis. Nous faisons la guerre pour détruire la barbarie fasciste. C'est la défense de la civilisation chrétienne. C'est une guerre sainte, il faut vaincre ou mourir. Nous ne sommes pas des soldats, nous sommes des croisés. Il ne faut pas s'arrêter avant d'avoir écrasé la tête à l'hydre nazie.

Argoud frappe sur la table. Ses yeux étincellent. Il a évidemment été catéchisé par quelque abbé chrétien démocrate, ce qui est assez extraordinaire pour un Dauphinois. Voilà du moins un Alpin qui sait pourquoi il se battra. Inutile d'insister. Je ne veux point ébranler une aussi magnifique résolution.

Nous dépêchons notre beefsteak aux pommes dans un silence un peu embarrassé. Pour rompre les chiens, le voisin, que la civilisation chrétienne n'empêche point de dormir, expose son cas de réforme, qu'il estime décisif. Aussitôt, le croisé Argoud manifeste un intérêt extrême, et renchérit, très fier :

  • Ah ! moi, j'ai mieux que ça. J'ai un varicocèle et des traces d'albumine. Je suis déjà auxiliaire. Je vais bien tâcher moyen d'attraper la réforme. Surtout qu'avec ce qu'on est en train de licher, ça serait bien malheureux si je ne faisais pas une double dose à la visite. Ça, pour sûr, je saurai faire valoir mon cas comme il faut.

Je n'esquisse même pas un sourire. Aucune ironie ne saurait atteindre le brave Argoud. Il est d’une complète ingénuité.

Les heures s'écoulent à grand' peine dans la sentine polaire du G.U.P. On a le coeur tout barbouillé de froid, de crasse, de désoeuvrement et de gros vin. Depuis trois jours que nous sommes là, nous avons, pour tout travail, pelé deux sacs de carottes gelées.

Les appels se succèdent toujours, plus fantomatiques que jamais, dans les hurlements du blizzard : “Agapian, Merdjian, Faure Félix, Poussegrive, le caporal Magnat Jules. On demande Magnat Jules au bureau de bataillon. Magnat Jules ! Magnat Jules ! Ah ! alors, celui-là...”

Au milieu d'une des guitounes, gît une sorte d'énorme vieillard, tassé sur une caisse, contre un des illusoires braseros qu'on a allumés. Son ventre d'hydropique ballotte entre ses cuisses courtes dans une chemise sale. Sous sa casquette pisseuse, il a une tête toute grise, une face de noyé, bouffie, violacée, avec une barbe comme celle qui pousse aux morts. Le bougre a trente-sept ans. Il est diabétique au dernier degré. Voilà dix jours qu'il est là, vivant de quelques cuillerées de bouillon. Il ne peut faire vingt mètres sur ses jambes, L'infirmerie n’en veut pas. Il faut qu'il attende le conseil de réforme qui statuera sur son sort, s'il n'est point trépassé d'ici là.

Dans les parages du diabétique, parmi les vieux balais, les arrosoirs percés et les épluchures, j’ai découvert une mirobolante pancarte, magistralement moulée : SECTION DU CANON DE 25 mm. Au milieu de notre extravagant chenil, l'annonce de cette artillerie m'a laissé tout pensif. Justement, dans le box à la pancarte, j'ai avisé un groupe de troupiers. Ils font bande à part, assez dédaigneux, beaucoup plus jeunes que nous, vingt-cinq à vingt-huit ans, avec des uniformes décents et aussi bien tenus qu'il est possible dans un pareil lieu.

Je m'enquiers, amène :

  • Alors, vous êtes les gars des antichars ?
  • Oui, petit vieux. Les antichars, c'est nous.

J'hésite, sentant l'énormité de ma demande :

  • .. le canon de 25 ? Vous en avez un ici ?

-Tu rigoles ! Le canon, il y a quatre mois qu’on le cherche. On est d'abord allé au camp de la Valbonne. On est resté trois semaines. Il n'y avait pas de canon. On est donc revenu au G.U.P. Ensuite, on est allé au camp de la Courtine, entraînement spécial des antichars. On a attendu quinze jours, un mois. Tous les matins, le canon allait arriver. Enfin, au bout de deux mois, on est encore revenu au G.U.P. On n'avait pas vu le canon. Nous serons peut-être comme ça, section du canon de 25 sans canon, pendant toute la guerre. Faut pas se frapper.

J'ai retrouvé dans une poche de ma veste les lettres héroïques aux amis de Paris. Ma foi ! j'attendrai un peu pour les terminer.

Je suis pauvre. J'ai mille francs en poche qui doivent durer longtemps. Je me suis mis à la gamelle. Il faut d'ailleurs m'y habituer. Elle est réellement innommable. On s'en doutait à voir l'antre nauséabond, entre les chiottes et la charognerie, où une demi-douzaine de voyous avinés perpètrent leurs brouets. Ils nous jettent en hurlant par un guichet des portions de colle ou d'eau sale, avec du pain vert de moisissure. On s'efforce d'avaler cela, entassés dans une effroyable sentine décorée du nom de réfectoire, quelques piliers de bois et quelques lattes dressées sur un tas d'ordure, et où la triste vinasse se fige dans les quarts. Les Arméniens et beaucoup de paysans se battent ignoblement autour des pitances. L'hygiène réglementaire est assurée par un balai qui pourchasse sur le sol les crachats, la boue, la crotte, et dont on essuie incontinent les morceaux de planches sur lesquels ou va manger. Je ferme le nez, les yeux ; pour apprécier mon sort, je pense aux camarades en train de tenir les avant-postes d'Alsace par moins trente degrés.

Les fascicules bleus débarquent toujours par flots. Voilà six jours que nous menons cette écoeurante existence de faux civils, rôdant avec nos valises aux poings à travers notre chiourme, accroupis au milieu des toiles d'araignées et des vieilles boites de conserves, somnolant sous une méchante couverture que nous devons du reste à la charité des copains, dans l'attente d'un ordre, d'un avis quelconque, d'une bribe d'indication. Les hommes commencent à convoiter une capote qui leur tiendrait du moins un peu plus chaud que leurs vestes râpées et leurs bourgerons.

L'échoppe des garde-mites fait maintenant recette. Elle livre de temps à autre à la circulation d'ahurissants fantoches, un Arménien dans une souquenille bleue qui dut faire Verdun et la Somme, surmontée de la casquette du gaillard, un paysan en culotte de golf kaki et chapeau noir. Mais il faut en finir. Je veux dépouiller mon enveloppe de pékin transi. Il sera d'ailleurs dit que je déciderai absolument seul tous les actes essentiels de ma vie militaire. Après une vaine journée de tentatives, j'ai enfin séduit un brave caporal du magasin : “Allons, viens ! me dit-il avec une tendresse fraternelle. Je vais t'habiller”, comme on le dirait à un vagabond presque nu.

Le magasin déborde d'effets flambants neufs. Malheureusement, les vareuses sont toutes taillées pour des colosses mythologiques de deux mètres de haut, et larges en conséquence. Quant aux culottes, elles conviendraient pour le rayon des écoliers. On essaie donc de se vêtir en remuant des ballots de hardes d'où s'échappent des nuages d'une poussière charbonneuse. La vareuse qui m'échoit, aux doublures bordées de crasse, ornée d'énormes boutons en métal jaune, descend en me boudinant presque jusqu'aux genoux. Par contre, sous les bras, elle me serre à m'étouffer. Les molletières sont des lambeaux de chiffons effilochés. Le pire, c'est la culotte, cette défroque tachée de cambouis, cette braguette noire. Une vaste capote à peu près propre sert de cache-misère. On fait d'émouvantes littératures sur l'armée française couleur de sillon. Ma capote est exactement de la couleur du crottin frais. Quant à l'illustre béret, que je m'étais fièrement réjoui de porter, c'est la “tarte” poussiéreuse et déteinte qui me pend jusque sur l'épaule.

Ainsi fait, je pars incontinent en corvée volontaire. Notre mission est de rapporter des couvertures que l'on va se décider enfin à nous distribuer. En guise de couvertures, nous nous trouvons devant des fins de coupe de tailleurs. Pour se protéger contre vingt degrés de froid les hommes médusés reçoivent un morceau de serge, de drap de smoking, grand comme une serviette. Deux ou trois paysans privilégiés déplient avec éblouissement un beau coupon de Prince de Galles gris perle : “Mon vieux, c'est péché de mettre ça dans la paille. Je trouverai bien toujours une vieille couverture de cheval pour remplacer, et ça me fera un chouette pardessus”.

Une nouvelle semaine commence. Les appels retentissent toujours aux quatre vents, avec les mêmes accents désespérés : “Caporal Magnat Jules !”. Les fascicules bleus continuent leur ronde placide, les mains dans les poches, avec la navette régulière entre la baraque et le bistrot : un pot de blanc par heure matinale, un pot de rouge par heure de l'après-midi. Au cours d'un de ces intermèdes, j'apprends d'un camarade que je suis muté depuis deux jours à la deuxième compagnie.

Je me précipite. Après quelques heures de laborieuses recherches, je découvre cette estimable unité à l'autre bout de Romans, dans le hangar d'une usine de produits chimiques, d'une poignante fétidité. Le sergent chasseur- gendarme est au milieu de la cour, la gorge emmitouflée d'une énorme écharpe de laine, s’arrachant des sons agonisants : “Caporal Magnat Jules ! Rebatet Lucien... Ah ! enfin ! c'est vous, Rebatet ? Bien. Surtout, ne vous éloignez pas”. Pour un peu l'infortuné me féliciterait.

Ici, parmi les défroques kaki, les défroques bleues, les défroques mi-kaki et mi-bleues, les capotes, les pardessus, les souquenilles de treillis, les peaux de mouton, les vestes de velours, les hommes civils par le haut et militaires par le bas, les civils par le bas et les militaires par la tête, c'est l'appel permanent, frénétique, un tournoiement de plantons, de cyclistes, de caporaux-chefs, traversé à chaque minute par la silhouette convulsée du commandant de compagnie, lieutenant Simon, excellent homme d'instituteur, le crayon-à l'oreille, un béret basque de séminariste sur le bout du crâne, les yeux écarquillés par dessus ses lunettes.

  • Tout le monde, rassemblement ! On demande tout de suite vingt-deux hommes en armes pour le poste de D. A. T. sur le terrain. Au trot ! Prenez les noms.

Un bruit de godillots et de crosses. On aligne après de dramatiques efforts vingt-cinq hommes, Lebel au poing, bardés de cartouchières. Maisil y en a quinze qui sont encore civils de pied en cap. Pendant ce temps, soixante gaillards en uniforme courent après un fusil.

  • On demande d'urgence un secrétaire à l'infirmerie !

Un bachelier se présente, détale toute affaire cessante pour ses nouvelles fonctions, revient deux heures plus tard, la mine contrite :

  • C'est dommage, la planque était bonne. Mais ils n’ont pas besoin de secrétaire. C'est un plongeur qu'il leur faut.

On a déjà demandé hier trois secrétaires. On vient d'apprendre qu'ils ont été mis à casser du bois. C’est égal ! on demande quatre, cinq, dix, douze secrétaires. Ils s'en vont, fatalistes, vers d'insondables oubliettes.

  • Une corvée pour rapporter des vivres de l'Ordinaire.

On réunit quinze gaillards pour pousser deux sacs de poireaux dans une charrette à bras. Mais il n'y en a plus que trois pour décharger vingt tonnes de charbon.

Dix bougres partent, en grande tenue de campagne, pliant sous un faix de mulet, pour un poste lointain. On a bu le pinard des grands adieux. “Au revoir, on enverra des cartes postales”. Au crépuscule, les voilà de retour. On ne les “comptait” plus à l'effectif de la compagnie. Il faut les recompter de nouveau. Sur cent vingt arrivants de la semaine, quarante sont déjà réformés et disparus. Et voici cent nouveaux fascicules bleus à l'état brut qui s’engouffrent par la grille. Et on en annonce deux cents autres à bref délai. Inextricables problèmes !

Le brave lieutenant Simon est à bout de résistance :

  • Voyons, Bonnardel. Nous devions en compter deux cent quarante quatre hier soir. Nous avons muté quarante trois plantons, chauffeurs, infirmiers, secrétaires, ordonnances. Nous avons envoyé dix-sept auxiliaires aux C. O. A. Mais attention ! ils comptent jusqu'à samedi. Nous avons reçu vingt-huit hommes de la première compagnie. Mais ils ne comptent chez nous qu'à partir du lendemain de leur mutation. Nous avons aussi huit réformés nouveaux. Il faudra voir depuis quand nous les perdons. Ah ! il faut faire habiller en kaki tous les hommes du service armé et en bleu tous ceux qui partent pour le C. O. A. : tenue de changement de corps. Il manque soixante dix sept hommes à l'appel de onze heures. Là-dessus, j'en ai douze à expédier au Conseil de réforme demain matin ! Quel métier ! Maintenant, je suis obligé de courir à la place. Mon pauvre Bonnardel, tâchez de me mettre ça debout.

Quatre aspirants, qui nous sont tombés depuis trois jours de Saint-Maixent en uniforme flambant neuf, gantés à trois boutons, contemplent cette scène bras ballants, bouche bée. Bonnardel les salue dignement et s'éloigne, l'air méditatif. C'est un tout petit bonhomme de quatre pieds neuf pouces, soldat de deuxième classe et marchand de journaux dans le civil. Un incontestable génie des états et des situations-rapports l'habite. Devant une demi-douzaine de sous-officiers et de scribes qui, vaincus, tournent dans leurs doigts le dernier ordre du bataillon, Bonnardel dépêche d'une plume vertigineuse cinq kilos de paperasses, organise vingt détachements, inscrit tout un train d'arrivants, met un nom, une classe, une profession, une décision médicale sur quatre cents visages. Bonnardel est le commandant de la 2e compagnie du G. U. P.

Hormis ce héros, tous les non-gradés considèrent en spectateurs souverainement détachés le tohu-bohu dont ils sont l'objet. Les fureurs, les supplications affolées de vingt porte-galons n'abrègent point d'un pas leurs petites promenades entre les apéritifs et les pousse-cafés d'alentour. Un événement d'importance toutefois les a remués : la soupe de la 2e est excellente. Le cabot-rata, le bon Rousset, curé de campagne dans l'Isère, au formidable accent “dauphinô” pourvoit avec un zèle sublime les marmites, devant lesquelles notre chef veille nuit et jour. On a mangé des quenelles hier soir.

Comme on achève un rabiot de frites miraculeuses, une monumentale apparition fait dresser toutes les têtes :

- “Salut à tous ! Les gars, je suis Muetton Joseph, cultivateur. Cent trente trois kilos ce matin à la balance de la gare. Les gars, il faut vous dire que j'ai bien des couilles comme un veau”. Et de nous exhiber sur-le-champ ces merveilles, en mugissant la Sérénade de Toselli, que ponctuent solennellement les rots du vin blanc dont il est plein à ras bord.

Mais le prodige dûment constaté et admiré à la ronde, la rentrée des reliques dans leur châsse s'avère laborieuse. Muetton est sans conteste le guerrier le plus étrangement culotté de l'armée française. Les braies les moins déshonnêtes dont on ait pu le couvrir s'arrêtent à mi-cuisses et refusent absolument de poursuivre l'ascension. Entre ce point et le nombril, la pudeur de l'alpin Muetton était jusqu'ici sauvegardée par un complexe de ceintures de flanelle, de ficelles, de bretelles, d'épingles, de caleçons. Sa reconstitution se révèle illusoire. Et Muetton, estimant qu'il a suffisamment servi aujourd'hui la patrie, s'éloigne bientôt vers la ville dans un tangage de haute mer, en exhibant un détail de ses trésors tous les trois pas.

Les visites d'incorporation ont commencé pour toute ma fournée. Ce sont des cérémonies interminables. Elles offrent tout loisir pour contempler à l'état de nature un bon millier de mâles français. Il s'en faut de beaucoup que ce spectacle soit réconfortant. La race de ma province a sans doute toujours été plus résistante que belle. Mais elle est réellement abîmée, négligée. Il faut dix bouches pour réunir trente-deux dents intactes. Les ptoses, varices, hernies, ulcères, scrofules sont en nombre incroyable. Les moeurs d'un régime et d'un peuple se jugent aussi dans ce défilé de paysans, avec leurs ventres énormes et mous sur des cuisses rachitiques et des genoux en boulets, leurs échines arquées, leurs omoplates décollées, leurs thorax étiques, leurs mâchoires pourries, leurs oreilles suintantes, leurs estomacs aigris, leurs foies décomposés. Je ne suis qu'un citadin de carcasse solide mais d'apparence fort modeste, un gratte-papier confiné dans des imprimeries empestées, avec quelque cinq mille nuits de veille derrière lui, mais du moins sobre et lavé. Je me situe dans une très honorable moyenne parmi tous ces hommes de la terre et du grand air.

Les médecins indifférents prélèvent la remonte exigée dans cet assez triste cheptel. Leurs consignes sont certainement très impérieuses et les déceptions pleuvent sur les hommes aux beaux “cas”. Un pauvre petit diable squelettique et déjà tout grisonnant se présente : “Quarante quatre kilos. Un mètre cinquante. Bon service auxiliaire, apte à faire campagne.” Un grognement scandalisé court le long de la file des hommes nus. Le malheureux nabot, en se reculottant, gémit les larmes aux yeux : “J'ai un mètre quarante neuf. Ils m'ont ajouté un centimètre, parce qu'au-dessous d'un mètre cinquante, ils ne devraient pas prendre...”

Les variqueux, les rhumatisants, les asthmatiques défendent leurs chances désespérément dans une dernière tirade que les toubibs coupent de la main. Argoud, l'héroïque croisé, est maintenu dans l'auxiliaire, et ne dissimule pas un très cruel dépit. C'est mon tour. Mon verdict est connu d'avance. “Bon service armé”. Puisque je suis soldat, autant l'être tout à fait. Mais il faut que j'ouvre au moins la bouche pour ne pas perdre la face devant les camarades.

  • Je ne suis pas bien costaud.

Le capitaine-médecin, debout devant moi, est un géant débonnaire, lui aussi un civil en uniforme. Il sourit,

-S'il ne nous fallait prendre que des athlètes complets !

Ses gros yeux malicieux et blasés ajoutent :

  • Du reste, pour ce qu'on vous fera faire...

 


CHAPITRE XV

L’ARMÉE DE BOUBAKI

Je suis soldat depuis un mois déjà. J'ai été bientôt réaffecté à la 1e Cie du G. U. P. Le cantonnement sibérien, comme on pouvait sans peine le prévoir, s'est mué dès le dégel en un cloaque bien plus infernal encore. La gadoue noire a tout envahi, charriant les résidus putréfiés des cuisines, grossie par les affluents qui dégoulinent des goguenots. Jamais ne fut plus véridique le refrain lapidaire de nos clairons :

Le Cent Cinquante Neuf est dans la merde
Jusqu’au cou.

Je me cramponne à ma tendresse pour le pittoresque militaire, Le fantassin français de 1940 demeure, comme il se doit, une sorte de clochard mâtiné de papou. Dans le vieil argot, le biffin du reste, n'était-ce point le trimardeur, l'homme au bissac qui a tout son bien sur le dos, qui porte toujours de la terre à ses croquenots, de la paille à sa défroque, qui gîte dans les terrains vagues et les granges, qui fait le tour des villes par les faubourgs les plus désolés, notre semblable, notre frère ?

J'ai éprouvé une inénarrable jubilation dans les premiers actes de ma vie militaire. Il y a quatre semaines, j’insultais des députés, des directeurs de journaux, je morigénais des ministres, mon nom honni ou applaudi était sous cinq cent mille regards. Me voilà maintenant pareil à un conscrit, marquant le pas dans le même rang que deux laboureurs allobroges aux longues et jaunes moustaches de Francs, la plus infime des créatures entre les mains d'un caporal-chef, voire même d'un “première classe” comme l'un des garde-magasins, garde champêtre de son état, qui exerce dans son sillage une tyrannie furibonde. Je passe une heure avec des hommes mûrs et raisonnables, mon ami le sergent Jannez, grave assureur lyonnais, père de deux enfants, ou le sergent Manhès, professeur de physique, à discuter le scandale d'un plat de pommes de terre frites qui a été distribué aux hommes mais point aux sous- officiers. En colonne, quand je m'aperçois au passage dans une vitre, sous le sac et le casque, l'arme à l'épaule, je me ris comme à une vieille connaissance rencontrée au milieu d'une incroyable mascarade.

Mais le décervélement des premiers jours fait un peu trêve. Des bribes de réflexions se rejoignent petit à petit dans ma tête. Notre gourbi est ignoble. La compagnie entière tousse à fendre l'âme, ce qui a du reste provoqué la corvée de gargarisme, une lessiveuse d'eau vaguement javellisée où l'on trempe son quart pour s’exercer en rond à des glouglous. Notre nourriture est repoussante. Ces misères, en pleine guerre, ne méritent point d'être notées pour elles-mêmes. On ne va pas se plaindre d'être enrhumé et affreusement sale, quand il y a des hommes dans les tranchées et devant la mort. Il est fatal qu'un dépôt soit essentiellement un dépotoir. Mais-on a le sentiment que les trois quarts de l'armée française gisent dans ces dépotoirs.

Il se peut que ce soit encore une des singulières nécessités de cette guerre sans combats. Mais il faudrait alors que cette situation paradoxale requît tous les soins des chefs. Les hommes des dépôts ne connaissent que des peines fort relatives. Mais, ce qui est bien pis, ils s'enlisent sans raison dans la boue et la crasse. Trois millions de soldats français sont en train de pourrir sur pied.

D’ailleurs, notre G. U. P. apparaît beaucoup moins humoristique, quand on songe que nous y formons la réserve immédiate de la 27e division, unité d'élite de l'infanterie française, et que si demain commençait la vraie guerre, nous irions aussitôt nous battre dans ses rangs.

Nous continuons à vivre au milieu d'une incohérence systématique, minutieusement réglée. Il y a parmi nous des gaillards de l'active qui n'ont pas encore fait un jour de front, quand des pères de famille de la classe Dix-huit en sont à leur cinquième mois de ligne Maginot. Trois jours après leur incorporation, cinq cents paysans de la montagne sont renvoyés chez eux en permission agricole de trente jours qu'ils passeront à contempler la neige. Cependant, toutes les compagnies auxquelles ils viennent d'être affectés sont démantibulées pour la dixième fois depuis la mobilisation et impropres au plus modeste service pour des semaines. Les conscrits de l'année ne sont toujours pas incorporés. Mais il nous arrive par fournées énormes des fascicules bleus, des récupérés des classes Quinze et Seize, des boiteux authentiques, pliés sur deux cannes, des hommes à qui manquent quatre doigts. Une de ces précieuses recrues, qui triture péniblement un paquet presque inintelligible de mots, m'ouvre sa bouche. Elle a été traversée à Vauquois par une balle qui a coupé la moitié de la langue. La cicatrice est horrible. Ce malheureux ne peut manger que des bouillies et des hachis. Il a quarante-cinq ans. Il est repris dans le service auxiliaire.

Les femelles de villages dont le mari est parti protestaient chez les députés et les conseillers généraux, faisaient pleuvoir des lettres anonymes parce que le voisin n'ayant que cinq ans de plus demeurait chez lui et gagnait gros. Par démagogie, on remplit à ce point les casernes de vétérans perclus, d'éclopés, de malingres qu'il n'y a plus de place ni de capotes pour les garçons de vingt ans.

Il faudrait être bien ingénu pour ne pas comprendre que le mécanisme militaire est détraqué chez nous par le haut.

Une circulaire a réclamé l'état des candidats officiers de réserve. Je me suis hâté de m'inscrire, retrouvant d'un seul coup ma plus belle ardeur “Quinze-Neuf”. Faire la guerre comme chef de section dans un corps alpin, malgré tout cela compterait dans une vie. Le commandant du G. U. P, M. le chef de bataillon Thorand, boutiquier en drap dans le civil, vénérable de la loge de Montélimar, qui a trinqué avec tous mes amis romanais, appuie ma demande chaleureusement.

J’ai été convoque chez le maître suprême de Romans, le colonel Planet, avec une quinzaine d'autres postulants. Un adjudant-chef de chasseurs nous commandait avec autant de grâce que s'il eût conduit en prison un peloton d'assassins. “J'amène les futurs généraux”, a-t-il proclamé, avec quel air de suprême ironie. Ses pernods du matin, lui restent évidemment sur l’estomac, à la pensée qu’un aspirant, un presque officier, son supérieur en tout cas, pourrait surgir dans quatre mois de ce vil détachement.

Le colonel Planet m'a reçu en pleine digestion, l'oeil vitreux, les joues tomate, son crâne sexagénaire plongeant à chaque phrase vers son bureau et trempant de sueur ses papiers. Laborieusement, il a ouvert son col, mis bas sa vareuse, il s'est extrait en soufflant et ahanant du gros chandail vert pomme qui le mettait à deux doigts de l’apoplexie. Enfin, la voix éteinte, en s'épongeant d'une main harassée :

- C'est vous le journaliste ! Qu'est-ce que vous voulez que je fasse pour vous ? Vous voulez devenir officier dans l'infanterie, à votre âge ? C'est très bien. Vous avez la foi. J'aime ça, je l'encourage. Mais vous êtes beaucoup, beaucoup trop vieux ! Trente-six ans, pensez un peu ! Nous avons plus de candidats que nous n'en avons besoin. Je veux bien dire que vous êtes un garçon recommandable. Mais vous n'avez aucune chance. Trop vieux”. Et avec accablement : “Allez ! au suivant”.

Entre temps, un petit incident a grevé d'un handicap qui doit être décisif ma carrière militaire. J'ai envoyé à Je Suis Partout, sous le pseudonyme de “l'Alpin”, un reportage de bonne humeur, de couleur franche, mais animé, je puis l'assurer, d'un esprit excellent, sur mes premières journées de fantassin. Les règlements m'y autorisent. Mon papier a eu un vif succès parmi le nombreux état-major de la garnison romanaise. Mais un drame a éclaté tout à coup, j'ai parlé dans cet article du quart de rhum bu à mon premier repas de soldat dans la cuisine de la C. H. R. Alors que tous les cuisiniers revendent aux ménagères, refilent à leurs petites amies et à leurs femmes le rhum par seaux, le pinard par bonbonnes, le café par kilos, le riz et la viande par charrettes, que les commissions d'ordinaire trafiquent sur la sardine et le sucre par camions, l'Intendance générale de Lyon est entrée dans un courroux terrifiant, s'est révolutionnée de fond en comble, en apprenant qu'un quart de rhum avait pu être versé à un deuxième classe, qui n'était même pas en uniforme, dans une compagnie où il ne comptait même pas. Le capitaine de la C. H. R., M. Vincent, instituteur et militant socialiste, a vu fondre sur lui une demi douzaine d'enquêteurs à quatre et cinq galons. Il a dû fournir en je ne sais combien d'exemplaires le relevé de toutes ses écritures, et les dieux savent ce que sont les écritures d'une C. H. R., depuis le premier jour de la mobilisation. Le général commandant la région a été saisi du cas. Je n'outre rien...

Je laisse à penser en quelle estime le capitaine Vincent peut tenir le journaleux fasciste qui lui a valu cette algarade... M. le chef de bataillon Parodin, commandant d'armes, Corse, et lui, officier de métier, m'a convoqué dans son bureau. Il exécutait visiblement une consigne embarrassante, n'ayant aucun motif valable pour me punir. Après un éloge dithyrambique de mon patriotisme, il n'a pu me cacher que le capitaine Vincent aurait voulu me voir passer en conseil de guerre. Ce voeu, lui ai-je fait observer, était d'autant plus excessif que mes articles avaient eu à Paris le visa de colonels censeurs. Ce détail a donné à l'excellent commandant le coup de grâce, au point que j'ai dû finalement le réconforter. Ce sont des satisfactions involontaires et innocentes pour un humble deuxième classe, mais qui ne le destinent certainement point à la cote d'amour.

Mes frères les troupiers, eux du moins, m'ont apporté quelque consolation. Je retrouve auprès d'eux cette naïve et soldatesque philosophie à laquelle j'ai tant aspiré.

Le premier contact avait été bien décourageant. L'isolement moral m'apparaissait sans remède, tandis que je désespérais d'échapper à la promiscuité physique. Une vingtaine d'horribles voyous, d'une terrible ubiquité, me cachaient presque tous les autres. J'avais oublié aussi le langage du peuple, si élémentaire, si lent, qu'on perd tout espoir de le parler, d'entrer jamais en communication avec cette autre planète.

Mais peu à peu, des liens se nouent, une intelligence, une âme transparaissent au hasard d'une corvée, d'un exercice, d'une bonne aubaine qui nous a rapprochés pendant deux heures. On découvre que le silence, qui pouvait passer pour de l'hébétude, n'est que la réserve prudente du paysan, du paysan dauphinois par dessus le marché, qui passe pour le plus méfiant, et qui ne l'est peut-être ni plus ni moins que tous les autres paysans français.

J'ai dû une de mes premières lueurs d'espoir à un gros et joyeux lyonnais, mon ami Puygrenier, un de ces irréguliers, de ces excentriques que l'on trouve dans le peuple aussi bien que dans les autres classes, et qui seraient autrement plus amusants à décrire que des bohèmes de lettres plus ou moins artificiels. Rien du sempiternel marlou à la Carco, mais le cabochard, le véritable indépendant que les places de tout repos ennuient, qui a le sentiment très vif de la monotonie et s'est essayé à cinq ou six métiers par un goût impénitent du mouvement. Terrassier, bistrot, marinier, boiseur au métro de Paris, camelot selon les jours et les ans, il a connu tous les milieux révolutionnaires, tous ces petits cénacles nés autour de quelques faux hommes d'action, de quelques roublards, quelques terroristes d'estrade près de qui le naïf idéal populaire avait cru s'épanouir. Puygrenier a dû être bolchevik, anarchiste et trotskyste. Il est fort possible que son livret matricule le marque : à surveiller.

Il faut entendre Puygrenier sur le chapitre des communistes, des socialistes et de tous les croyants de mai 36. Il en a même contre la distinction classique entre les meneurs et leurs dupes :

  • Des gonzes qui ont pu se laisser induire en erreur comme ça, ça devrait plus avoir droit à rien. La connerie de ce poids-là, ça devrait se payer d'une façon ou d'une autre.
  • Oh ! Puy, ils sont bien punis, puisqu'ils font maintenant les pierrots avec le kaki sur les fesses.
  • Tu parles ben d'une consolation ? Est-ce que je fais pas le pierrot comme eux, moi ? Est-ce que tu l'as pas aussi, toi, le complet Daladier ? Non, mon pote. Il aurait fallu pour ces gonzes une punition collectiviste. Mais je sais ben que c'est encore une affaire d'utopistes, de la philanthropie à rebours, quoi ! Alors faut se contenter en se disant que rien n'existe, pas plus la justice que le communisme. C'est drôle, ça fait tout de même plaisir de se le penser.

Je montais l'autre nuit une garde sans histoire, à l'entrée de notre cantonnement. Le poste est une cabane de guingois, la plus précaire et la plus sale de notre îlot de réprouvés. Le poêle avait bien voulu ronfler un peu. Nous étions suffisamment pourvus en bidons de rouge. Il y avait là Cléry, caporal et manipulant des postes, un facteur des Hautes-Alpes, un paysan de l'Isère, un mécanicien et moi-même. Nous parlions de nos métiers respectifs, de leurs tracas, de leurs avantages. Le mien ne leur disait pas grand' chose, puisque je ne suis ni de Paris-Soir pour le prestige, ni de l'Humanité pour être cordialement blagué et secrètement admiré. Mais ils m’initiaient à la vie des Postes, au dur labeur du tri nocturne, aux lourdes responsabilités du receveur, et ces simples images d'un travail essentiel me rafraîchissaient de bien des palabres politiques, des arguties musicales, des médisances littéraires.

Le mécanicien, Berthollon, est un invraisemblable trouffion, un tout petit bonhomme pareil au Simplet de Blanche-Neige, avec une capote comme une houppelande de clown, battant ses talons, lui couvrant les doigts jusqu'aux ongles, et surmonté de la plus énorme “tarte” du G. U. P., qu'il enfonce jusqu'aux oreilles. Mais sous cette défroque de marmiteux, qu'il fignole du reste dans le dessein d'embêter les gradés, pétille un oeil bleu plein de gaîté et de malice. C'est un bricoleur qui vous raconte les techniques et moeurs d'une douzaine d'industries, un exemplaire vivant du “Petit inventeur”.

Nous parlions en bons juges de l'éternelle sottise humaine. Berthollon confessait fort bonnement qu'il avait voté pour la bande à Blum, qu'il avait été un fameux c... et que pourtant il recommencerait sans doute si l'occasion s'en présentait, parce qu'on ne peut tout de même pas être avec des vaches comme les patrons, et qu'il est à peu près fatal que l'ouvrier se fasse coyonner quand on lui promet d'embellir le sort des hommes. Nous étions sur la pente un peu glissante des rêveries égalitaires. Mais un invité venait d'entrer, le petit Julien, un pauvre bougre de l'Assistance Publique, qui depuis est remonté en ligne.

- Moi, dit-il, je pense pas qu'on doive être des égaux et que ça soit une bonne chose. C'est parce qu il y en a trop qu veulent être les premiers que tout est mai foutu. Je suis été placé à dix ans. J'ai appris à lire et à écrire au régiment. Je sais rien de plus. Je suis qu'un domestique de ferme. Je peux rien devenir d'autre et je le demande pas. Il faut bien de partout qu'il y ait un haut et un bas.

Nous sommes tous tombés d'accord sur cet admirable rappel de la hiérarchie nécessaire.

Ces Dauphinois et ces Lyonnais, par nature positifs et sceptiques, en gardent un pli de salutaire désillusion. Les vrais communistes, dont on m'avait fait à Paris un épouvantail, sont fort rares : on ne va pas moisir dans la “biffe” quand toutes les cellules vous réclament devant les tours des usines. Deux ou trois moscoutaires que j'ai repérés sont sournois, prudents, affectent d'être des soldats convenables.

J'ai une grande tendresse pour mes amis fantassins. Je le savais depuis longtemps : l'armée reste un des derniers lieux de notre monde qui rende les hommes à leur fraîcheur naturelle. Les garçons des villages les plus niais, des usines les plus puantes, pourvu qu’ils soient simples grivetons de rang ou sergents tout au plus, y reprennent aussitôt un charme de folklore. Le brave alpin Ferrier confie ses tristesses à son voisin de paille, Rousset, le bon curé-caporal, qui avait trop bien réussi aux cuisines pour qu'on l'y laissât et qui a été remis promptement, à trente-neuf ans, au maniement d'armes et au demi-tour :

- Toi qu'es curé, la moralité, ça t'intéresse. Eh ben, j'ai pas eu ma permission ce dimanche pour aller voir ma bourgeoise à Grenoble. Alors, quoi ? Je suis été faire le con au claque. Je me suis saoulé la gueule, j'ai baisé une vieille putain. Tout ce qu'il faut pour ramasser une belle chaude-pisse. Voilà ce que c'est que d'empêcher les hommes mariés d'aller tirer leur coup en famille.

L'excellent Rousset opine :

- Mon pauvre vieux ! Je sais bien que c'est immoral. Il n'y a que les officiers qui aient droit à leurs femmes ou à leurs poules. Mais, qu'est-ce que tu veux ! c'est la guerre. Encore heureux si tu n'es pas cocu à la fin.

Je ne parle point seulement des charmes de ce pittoresque. Ici, les âmes sont lavées, reposées des grimaces et de l'hébétude du servage pour le pain quotidien. Elles sont nues et naïves. Pour elles aussi, c'est le conseil de révision. Elles seraient toujours aptes pour le bon service de la France. La pâte a été gâtée, elle n'est point foncièrement mauvaise. Mais elle est sans levain.

Hélas ! où le prendrait-elle ? Un certain nombre de crétins officiels, de littérateurs, de vieillards aux nobles consciences, quand ils parlent à Paris du moral de la troupe, songent peut-être réellement à l'idée qu'elle se fait de sa mission, à ses pensées sur le drame où elle est jetée. Fort heureusement pour les démocraties, le fameux “Pourquoi te bats-tu ?” n'a pour ainsi dire jamais cours sous l'uniforme. Il est autrement important de veiller à ce que le casse-croûte supplémentaire des matins de marche ne s'envole point encore pour grossir le boni du capitaine ou la caisse noire de ces cochons de cuistots. Deux centaines de Français remis sous l'uniforme, qu'ils aient vingt ans ou quarante ans, auront toujours à se raconter suffisamment d'histoires de gendarmes dupés, de colonels rivés à leur clou, de fausses permissions, de cabots d'ordinaire qui mouillent le pinard, pour prendre leurs maux graves ou légers en patience. Mais après ? Mais encore ? Eh bien ! je ne vois plus qu'une resquille goguenarde ou une vaste et invincible passivité.

A l'appel des affiches blanches, les hommes sont venus, vieux chevaux de guerre bien domestiqués, sachant l'événement obscur, convaincus aussi par expérience qu’il en est toujours ainsi, que l'humble Français de ce siècle est ballotté au gré d'inaccessibles personnages, et de leurs querelles, qu'il serait bien vain d'approfondir. Les insolentes inégalités qu'ils ont en spectacle ne leur inspirent même pas un mouvement de rébellion. Ce ressort-là aussi, chez eux, est détendu. L'autre nuit, avec deux caporaux et huit hommes, nous montions la garde à la prison, corvée fastidieuse entre toutes. Sur le coup de huit heures, le chef de poste arriva, un sergent tout pareil aux autres, et que cependant, rien qu'à la tète, nous saluâmes du même mot : “Merde, un garde mobile !” C'en était un en effet, de vingt-six ans, frais et prospère, et qui se révéla aussitôt plus tracassier et d'une morgue plus stupide que douze adjudants réunis. J'en étais exaspéré au point que vers minuit, quand il venait pour la dixième fois dans la cour vérifier ma jugulaire et mon fourreau de baïonnette, je lui lâchai en face, sous la lune, mon paquet : “N'as-tu pas honte d'embêter ainsi de pauvres diables, qui ont trente-cinq ans et quinze sous par jour, quand tu touches dix-huit cents balles, nourri, logé, blanchi et couchant avec ta femme, pour ne pas te battre, toi, un soldat de métier ?” J'étais le seul encore capable de ce sursaut, qui a laissé du reste le mobile pantois. Mais quatre jours plus tard, comme nous n'avions pas de sous-off avec nous, les camarades ont délibérément lâché la garde, passé la nuit au bordel, et pour être plus sûrs de leurs prisonniers, il les ont emmenés avec eux chez les garces, y compris un espèce de sinistre fou muet, déserteur en prévention de conseil de guerre, qui la veille s'était rué sur une sentinelle couteau au poing.

L'indiscipline est partout, irrémédiable, à la fois sournoise et absolue. Sur les rangs, en armes, les hommes du bout de la colonne s'assoient sur une caisse, sur un vieux bidon de pétrole, la cibiche aux lèvres, le fusil entre les jambes, pendant que l'on fait l'appel. La présence d'un capitaine n'y change rien.

La palme revient certainement à deux compères inséparables, l'un grand, épais, noiraud, avec une énorme voix gargouillante et placide, vêtu d'oripeaux d'un bleu délavé, couverts de graisse et de suie, l'autre porteur d'un museau pointu de renard, tout en crins jaunes et raides, rusé, joyeux et prudent, une vraie figure de fabliau dans une gigantesque capote caca d'oie qui balaie presque le sol. Ils se sont arrangé une thébaïde au fond d'un hangar à bois et à charbon. Ils y coulent leur cinquième mois de sieste, hirsutes, incroyablement mâchurés, cassant avec animation deux bûches par jour pour les gradés qui viennent à passer par là. Personne ne les a vus une seule fois tenir un fusil, apparaître dans les rangs. Mais ce n'est encore rien. Depuis le début de la guerre, chaque soir les deux lascars se faufilent dans un train, vont coucher chez eux du côté de Tullins, à quarante kilomètres, et reviennent au petit matin.

Chaque samedi, au rapport, les officiers distribuent quatre permissions de vingt-quatre heures, et rappellent d'une voix grondante les foudres réservées aux contrevenants. Les troupiers, l'oeil mi-clos, le dos voûté, écoutent respectueusement cette terrifique harangue : “Trente jours de prison... Passer le falot... Bataillons disciplinaires... Départ immédiat en ligne”. Une demi-heure plus tard, cinq cents Alpins se bousculent à la gare, cinq cents autres sont postés, musettes aux flancs, aux stations d'autocars. Le dimanche, sur les quatre bataillons de Romans, on ne réunirait pas l'effectif d'une demi compagnie. Et il en est de même à Lyon, à Paris, à Romorantin, à Issoire, en Champagne, en Picardie, en Gascogne, en Poitou. Deux jours par semaine, le tiers de l'armée française prend de l'air. Aucun code, aucun châtiment ne sauraient prévaloir contre cette tranquille et invincible marée d'indépendance. Toutes les gendarmeries réunies de l'univers n'y suffiraient pas. Il faudrait muer tous les états-majors en conseils de guerre, toutes les casernes en prisons, et affecter cinquante divisions à leur garde. Faute de quoi, toute la majestueuse hiérarchie militaire ferme les yeux sur quinze cent mille cas chroniques d'absence illégale et de désertion en pleine guerre.

Ainsi, l'armée Daladier retourne irrésistiblement à l'état de la horde démocratique, des informes troupeaux de toute décadence, où le soldat-citoyen met aux voix l'ordre de bataille et retourne chez lui quand la soupe n'est pas bonne. Militaires et civiles, les hautes puissances de la République sont muettes et tremblantes devant ces électeurs en kaki. On n'est pas davantage capable de les vêtir que de les loger et de leur parler, mais on se risque encore moins à les commander.

Cette guerre est tellement inintelligible qu'on est déjà fort émerveillé que les hommes veuillent bien rester plus ou moins à leurs places, revenir nonchalamment après leurs petits tours de liberté. Ils restent, ils reviennent parce qu'ils ont sur leurs épaules cent cinquante années de “guerres du peuple”, de service militaire obligatoire. C'est une hérédité que l'on ne secoue pas en un jour. Neuf Français sur dix ont dans le sang un second métier, celui des armes. Cet atavisme nous a sauvés vingt-deux ans plus tôt et pourrait sauver toujours bien des choses. Encore faudrait-il que les hommes pussent faire ce métier, au lieu de la parodie qui s'étale sous leurs yeux.

Après cinq mois de G. U. P., dont les fascicules bleus n’ont connu que les dernières semaines, après cinq ou six cents rassemblements, autant d'appels et quelques milliers de notes de service, notre compagnie forme le monstre le plus insane, le plus hétéroclite qu'un capitaine d'habillement en délire, qu'un Ramollot frappé de fièvre chaude aient jamais pu imaginer. Les âges s'y échelonnent de vingt-deux à quarante-cinq ans. Des Kroumirs qui font leur seconde guerre, des vétérans de la classe 36 qui en sont à leur troisième année sous les drapeaux, y coudoient des anciens auxiliaires qui ne savent pas mettre baïonnette au canon. Le tiers de l'effectif est constitué par la bande des “non-instruits” que les poilus appellent l'armée de Bourbaki, ou encore la brigade internationale. C'est le surprenant assemblage des Arméniens, caves ou bouffis d'une graisse verdâtre, rongés d’hémorroïdes, d’ophtalmies, d’ulcères, affublés de loques effrangées comme des épouvantails à moineaux, à qui on désespère d'apprendre correctement même le garde-à-vous, et des vieux “alpini” et bersagliers du Piave, chevronnés et couturés de blessures. On y a adjoint le clochard russe, à qui la tambouille a rendu une apparence de vie, mais dont les genoux et les dents claquent toujours, deux espèces de brigands espagnols, plus un long sec, grisonnant et taciturne croquant des Hautes-Alpes.

Un aspirant de vingt-deux ans, charmant, timide, sportif, dans une vareuse martialement coupée et une incomparable culotte à la Saumur, vient d'échouer à la tête de l'armée Bourbaki. Il commande, tout rouge de confusion et d'une enfantine envie de pouffer, le maniement d'armes aux Arméniens qui se flanquent la crosse du lebel sur les orteils, portent le sabre-baïonnette sur la braguette, le havresac sur les jarrets, tandis que les grognards piémontais suivent le mouvement avec une philosophie rigolarde.

On a, toutefois renoncé à “instruire” Bouboule, le seul Arménien devenu populaire, un poussah grêlé, effroyablement calouche, haut comme un mousqueton, mais plus large que la barrique d'eaux grasses, expliquant dans un effarant sabir comment il ne faut pas s'en faire et ne pas chercher à comprendre, le Casimir de notre coin, comme lui aide-cuistancier de dernière classe, fonctions qu'il accomplit avec une ombrageuse dignité.


 

 


CHAPITRE XVI

L’ÉCOLE DES GUERRIERS

En grande pompe, nous avons inauguré les travaux de campagne, dans de vagues prairies, a trois ou quatre kilomètres de la ville. Tout le monde doit travailler, mais il y a six pioches et quatre pelles pour deux cents hommes. Dix héros écorchent le sol au hasard pendant que les autres sont vautrés derrière les buissons. Il s'agit de construire des emplacements de fusils-mitrailleurs. Un aspirant méticuleux s'affaire et se désole, un mètre de maçon d'une main, le manuel du gradé de l'infanterie de l'autre : “Attendez ! Attendez ! Il faut un rectangle de tant sur tant, avec tant de profondeur ”. Bientôt, l'aspirant, maigre, blond et candide jeune homme, est tout seul à brandir la pioche, la sueur au front, les doigts écorchés, au milieu d'un cercle hilare et vivement intéressé de terrassiers, de laboureurs, de bûcherons qui tournent béatement leurs énormes pouces sur leurs ventres.

Le capitaine vient rehausser de sa présence nos labeurs. On ne peut se figurer plus morose ganache, portant la méchanceté et la bêtise sur une hure de vieux cocu gastralgique. Il conduit, paraît-il, à Grenoble, les destinées d'une entreprise de charrois. Il est scellé dix-huit heures par jour, parmi ses dix scribes, devant un petit bureau d'écolier. Au milieu de la vertigineuse chienlit du G.U.P., il médite le format - modèle 52 bis ou 294 ? - sur lequel doit être dressé l'état des courroies de gamelle ou des plombiers zingueurs de la compagnie. La farce ne serait pas complète chez nous sans cette incarnation du règlement le plus obtus, qui déambule, importante, trois plis de hargne au front, à travers notre débandade brenneuse.

Dans officier, il y “officiant”, me disait l'année dernière l'excellent Trochu, le conseiller municipal. J'aimerais qu'il vît officier notre capitaine. C'est pour la rémission de mes péchés militaristes, de ma crédulité, de mon entêtement, que je dois être sous un chef pareil.

Les hommes, qui possèdent pour ces sortes de choses un infaillible flair, ont tout de suite compris que le ressort de ce vilain ours est la peur, et ils l'ont dénommé “le père La Chiasse”. En effet, que les soldats périssent de froid, soient vêtus comme des chemineaux, qu'ils mangent de la crotte bouillie, que les cuisiniers trafiquent honteusement de leurs vivres, La Chiasse n'en a cure puisque personne au-dessus de lui ne daigne considérer ces détails. Mais que la note de service sur le recensement des selliers-bourreliers ait été tapée en cinq exemplaires au lieu de six, et le voilà qui s'affole et se déchaîne, menace d'emprisonner, de casser, d'expédier sur l'heure au front. Comme la plupart des ignares, l'imprimé l'épouvante, il s'absorbe des heures dans l'exégèse d'une circulaire sur l'adjudication des eaux grasses, songeant à tous les pièges qu'elle doit cacher. Il a près de soixante ans, il est au sommet de ses grades de réserviste, et cependant il est plus tremblant devant un supérieur, qui est marchand de nougat dans le civil, qu'un serf gratte-papier, dont la pitance et celle de ses quatre gosses tient à la mansuétude de dix chefs de service et de quinze administrateurs. L'arrivée du chef de bataillon le met en transes. La venue d'un général lui coûterait certainement plusieurs kilos. La paisible anarchie des hommes, contre qui il n'a pas plus de moyens que le Grand Quartier Général lui-même, le tord d'une angoisse chronique. Il se rattrape férocement en refusant toutes ces menues faveurs par quoi un chef peut gagner ses soldats, punissant de prison un bronchiteux tordu par la toux qui réclame une contre-visite, déchirant les permissions de minuit que quelques honnêtes troupiers, les meilleurs sujets de la compagnie, ont la naïveté d'offrir à sa signature. Il retarde de deux jours le départ d'un pauvre diable en pleurs dont la petite fille va mourir. On frémit à la pensée qu'un aussi odieux abruti pourrait encore commander sous le feu on ne sait quelle inepte boucherie, que d'autres abrutis tout pareils commandent certainement quelque part le long de la ligne Maginot.

Pour l’instant, le père La Chiasse est donc parmi nous, sur le terrain, occupé à nous enseigner l'art des batailles, avec un accent de gardeur de vaches. Cet Ubu entre tant d'Ubus que cette guerre a investis d'une caricature de pouvoir, se révèle, pour être complet, gonflé d'une énorme suffisance.

  • Moi qui vous parle, je suis commandant d'une compagnie en temps de guerre. C'est quelque chose. Ce n'est pas n'importe qui qu'on peut mettre à la tête d'une compagnie d'un G. U. P. Il faut être capable. Moi, je suis capable. Avec moi, vous apprendrez ce que c’est que la guerre. Parce que moi, je suis un officier qui a fait la guerre. Je ne suis pas un théoricien comme il y en a. Je veux vous mettre en face des réalités concrètes.

Pour nous le prouver, ce guerrier réaliste entame incontinent une leçon de choses.

  • Ce terrain où nous sommes va vous servir pour savoir comment qu'un combat se passe. Il faut vous dire que c'est un terrain mal choisi, parce qu'il est trop découvert et que s'il y avait l'ennemi en face, on serait tout de suite descendus. Mais nous allons faire comme s'il y avait des bosses pour se cacher. Je voulais faire construire un réseau en fils de fer pour que vous vous exerciez à passer dessous. Mais il n'y a pas de fil de fer. On aurait pu fabriquer des fascines avec les arbres de la lisière, mais on n'a pas l'autorisation de les couper. Il est défendu aussi de faire des tranchées à cause des propriétaires. Mais vous pouvez remplacer tout ça par un effort d'imagination.

Et nous entreprenons une étonnante manoeuvre où les positions sont figurées par un trait de canne, le réseau de barbelés par une ficelle tendue, les mitrailleuses par trois cailloux, le canon antichar, le fameux 25, par une branche d'arbre. Les poilus de trente-huit ans sautillaient à travers ces accessoires comme des gamins à la marelle.

Nous en sommes restés là de l'école du combattant, et nos trous de fusils-mitrailleurs ne seront jamais terminés. Depuis cette grave séance, la colonne, chaque fois un peu plus maigre, s’en va trois après-midis par semaine, guidée par un aspirant qui tient au bout des doigts un ballon de football. Une tiède partie s'engage entre une vingtaine d'hommes empêtrés de leurs gros souliers. Les autres s'avachissent dans les creux, grillent une pipe allongés sur le dos, vont siffler le café et le vin rouge dans la ferme voisine qui s'est muée en caboulot. Ceux qui sont paysans contemplent silencieusement ces troupiers qui s'amusent à la balle, sur le beau champ de blé resté en friche faute de bras.

Si on le voulait, cependant, on trouverait un dérivatif utile à l'ennui et à la paresse où s'enlisent ces soldats. Il n'est pour ainsi dire pas un homme qui ne s'intéresse à ses outils de guerre, n’engage de savantes controverses sur la Hotchkiss, le mortier, le V. B. Il y a toujours dix volontaires pour un lorsqu'il s'agit de démonter, de graisser quelques armes.

Mais nous ne possédons presque rien. Nos fusils sont de trois modèles, dont pour la moitié de ridicules Gras. Les fûts sont fendus, les guidons tordus, les canons branlants. Avec un pareil matériel, on manquerait une porte cochère à trente mètres.

Le colonel a prescrit des exercices de grand style, avec des grenades-citrons. La garnison entière y passera plusieurs fois. Pour ce coup, nous allons faire sérieusement notre apprentissage. Tous les matins, depuis trois semaines, le sergent Jannez s'en va, avec une douzaine de lascars, creuser dans la campagne la tranchée et l'abri nécessaires. Le travail est achevé. On commencera lundi prochain l'entraînement. Mais le terrain a été si heureusement choisi que la pluie du vendredi fait ébouler la tranchée. Jannez repart avec ses bougres et ses pioches. Huit jours plus tard, c'est l'abri qui s'effondre. Les fantassins de Romans ne connaîtront jamais la grenade-citron.

On a enfin organisé un tir au fusil-mitrailleur. Il n'a fallu que six petits mois pour y parvenir. La compagnie est au grand complet. Les hommes sont alertes, ravis de ce divertissement. Sur quatre fusils-mitrailleurs, deux s'avèrent inutilisables au premier feu. Les chargeurs de rebut dont on nous a gratifiés enrayent les deux autres presque à chaque rafale. Tant bien que mal, cependant, la séance se poursuit. Les Arméniens trouvent le moyen de tirer à trois mètres devant eux, soulevant un nuage de cailloux et de mottes de terre qui les épouvantent ; ils se redressent hagards, crispés sur la détente, arrosant tout de balles autour d'eux, semant une panique éperdue... Mon tour vient. Je n'ai jamais touché le F. M. 24. A peine ai-je contre mon épaule la merveilleuse petite arme que je me sens un homme nouveau, invincible. O mitrailleuse si souvent caressée en rêve, devant les ignobles troupeaux du Front Populaire, les estrades de Blum, de Thorez, de Daladier, de La Rocque, les ghettos dorés et les Sodomes des fêtes bien parisiennes ! Cent fusils-mitrailleurs bien pointés et la face de la France... je tire comme un dieu, goulûment, passionnément, par petites rafales posées. Malgré deux enrayages, j'ai mis tout mon chargeur dans une carte de visite. Le brave sergent Prat, douanier et chasseur de chamois, qui m'assiste, siffle d'admiration. Je voudrais mitrailler jusqu'au soir. Je deviendrais un as. Mais le clairon apparaît au-dessus d'un talus dans le vent sec. C'est un conscrit qui a sous son casque la taille et la mine d'un gamin de douze ans, un enfant-soldat de 92 :

T’as tiré comme un cochon !

Vas-y voir, vas-y voir !

“Allez, petit ! Souffle tout. Montre que t'en as deux. Sois pas économe du biniou”.

Relèv' ta ch'mise, ma femme, ça y est. J’ai vu ton cul, j’sais comme il est...

C'est fini. Pour la première et dernière fois, j'ai tiré mes vraies cartouches de la guerre.

Nous avons marché un peu, des étapes anodines de vingt, vingt-cinq kilomètres. Je retrouve avec enthousiasme mon âme d'infatigable piéton, de fantabosse invétéré. Marcher dans un matin glacé et rose, en humant l'air vibrant qui sent la neige vierge, le corps souple et bien chaud dans une triple carapace de laine, un fredon à la bouche, un gros fusil à l'épaule, trotter gaillardement, la capote dégrafée, une bonne sueur aux reins, sous un soleil de mars ardent déjà, vers la ferme où l'on boira la piquette fraîche, je connais dans ce monde peu de bonheurs plus purs.

Je me désole chaque fois de voir notre file encore raccourcie. Ces fantassins de l'an Quarante auraient pourtant grand besoin de se refaire les jambes. Les résultats de nos bénignes épreuves sont consternants. Au dixième kilomètre, nous avons déjà des traînards. A la moindre rampe, on souffle et on lambine comme de petits vieillards. Beaucoup, au retour, s'affalent jusqu'au lendemain sur leur paille sale, les côtes éreintées, les pieds en sang. Les autos, les cars, les motocyclettes ont du amollir les paysans de ces terres trop riches. Les citadins valent presque mieux.

Je m'évertue à jouer le bon apôtre. Je me garderais bien de prêcher un zèle dont je ressens plus que quiconque la vanité, mais j'invoque ce qui demeure de salubre dans notre piètre existence : “Ne restez donc pas là à moisir bêtement dans cette écurie. On est bien mieux dehors. Venez faire un tour avec nous”. Mais ces hommes qui ont toujours biné, fané, porté des faix, ne peuvent point comme moi savourer l'effort physique. Rien du reste ne pourrait le justifier à leurs yeux. Ils ne sauraient point exprimer l'insanité de cette guerre ils n'en parlent presque jamais. Ils l'éprouvent cependant confusément. Elle leur enseigne qu'il faut en faire le moins possible. Il leur serait inconcevable de l'accepter comme je l'essaye, pour l'amour d'un sport, pour ce qu'elle nous impose malgré tout de viril. Leur pente naturelle est celle d'une passivité morose ou goguenarde.

  • Voyons, les enfants ! Une petite promenade pour vous dégourdir les jambes ! On ne sait jamais ce qui nous arrivera. Ce n'est pas inutile de s'entraîner un peu.
  • Ah ! ben, tu peux causer. S'ils voyaient que je marche, ils seraient capables de m’inscrire pour le prochain renfort au casse-pipes.

Assisté du bon curé Rousset, qui peine beaucoup sur la route mais est plein de courage, j’en ai décidé deux. Ils se harnachent en geignant. S'ils ont quelques ampoules ce soir, je serai voué aux gémonies. Sur plus de trois cents troupiers, nous sommes trente en rangs. Les autres préféreront se vautrer dans les coins les plus sordides, rôder des heures durant autour de notre affreuse geôle, pour échapper aux chasses perpétuelles et infructueuses des sous-offs. Tirer au cul dans la merde, tant pis pourvu qu'on tire au cul. La crasse, la fétidité de nos étables sont indifférentes à ces hommes, pour la plupart aussi sales que leurs cochons.

Il y aurait cependant parmi nous les éléments d'une troupe un peu lourde, mais solide : ceux du “canon de 25” qui sont arrivés à conserver dans notre cour des miracles une sorte d'esprit de corps, quelques-uns des montagnards, race encore magnifique, longue et musclée, lorsque la consanguinité ne l'a pas abîmée, guides de l'Oisans qui se désespèrent dans nos brumes de plaines, gaillards du Briançonnais, du Gapençais, nés avec les lattes de bois au pied, garçons des villes du Sud Est : employés, ouvriers d'usine qui ont su préférer les sports d'hiver à l'anisette et qu'attirèrent au Quinze-Neuf les sections d'éclaireurs-skieurs, et même les plus jeunes de nos maçons piémontais. Cette élite entraînerait bientôt tout ce qui est encore ici digne et capable de porter une arme. Mais il faudrait la dégager de la gangue, de l'animalité morne, de cette extravagante bicaillerie d'Arméniens, lui assigner quelque but, quelque activité à peu près cohérente.

Nous aurions un besoin extrême de chefs ayant un peu de fermeté, un peu d'imagination et beaucoup de sollicitude. L'encadrement des sous-officiers de réserve est mieux qu'honorable, jeunes professeurs, assureurs, cultivateurs dégrossis, ouvriers spécialisés, brevetés de l'école de Haute-Montagne, auxquels s'ajoutent nos amis les douaniers alpins, coureurs de sentiers qui n’ont plus rien à voir avec l'affreux gabelou des gares, Prat, Rochas aux noms de granit, le joyeux sergent Roger, catalan qui se pique de belles-lettres. Plusieurs ont une compétence, une finesse et une application fort au-dessus de leurs modestes galons. Hormis quelques réfractaires ingénus et quelques gouapes, nous les traitons tous en camarades, et cependant ils sont les moins mal obéis.

Mais au-dessus d'eux ? Je m'applique auprès des poilus, par un besoin instinctif d'ordre, une horreur du relâchement démagogique, à défendre ou à expliquer “rempilés” et officiers. Je profite de la moindre occasion pour dire : “Tu vois, avec son air de vache, au moins il s'occupe de nous”, ou encore : “Ils sont tout de même bien gentils, ces pauvres petits bougres d'aspirants”. Les hommes me regardent en haussant les épaules. Je leur rappelle tout à coup que je ne suis des leurs que par hasard, que je suis un bourgeois, un qui a eu de l'instruction, avantage qu'ils ne souffriront jamais d'attribuer à quelque agilité plus particulière de l'esprit, mais au privilège de ceux qui ont eu le temps et l'argent pour s’amuser dans les livres. Les manches cerclées forment pour eux un autre monde, fermé et hostile, dont ils n'attendent, de quelque manière que ce soit, rien de bon.

Je dois avouer que mes “protégés” ne me font point la tâche facile. J'ai parlé de notre capitaine que j'abandonne volontiers au mépris jovial ou sombre de chacun. Nos aspirants essayent bien de faire ce qu’ils peuvent. Ces honnêtes blancs becs sont trop ridiculement déplacés parmi les grognards que nous sommes, beaucoup trop timides et hésitants, pour que les troupiers puissent leur accorder quelque estime. Nous avons parmi nous un sous-lieutenant de quarante ans, à médaille militaire, Le Guinilho (je ne garantis point l'orthographe) que chacun a nommé d'abord “mon adjudant” parce qu'il en réalise le type le plus achevé, qu'il en était un effectivement jusqu'au début de la guerre. Il ne relève du reste jamais la bévue. Il ne s'est point habitué à son grade, et ses rares confidents savent que les repas au mess le supplicient. Il est retenu dans notre dépôt par force et s'y ennuie à périr. J'aime sa tête bretonne, aux yeux d'acier sous le béret. Voilà un vrai soldat, avec qui j'irais volontiers sous le feu. Mais les hommes sont fort indifférents à ces considérations d'artiste. Ils ne vont pas au delà du vocabulaire homérique de Le Guinilho, et cette gueule perpétuellement remplie de jurons sonores représente pour eux la quintessence du fayot.

L'adjudant Bertet, de carrière lui aussi, skieur émérite au visage superbement tanné, serait peut-être dans un autre système un modèle de gradé intelligent et humain. Mais il est visiblement sans illusions sur notre vie de caserne loufoque, et ce n'est plus qu'un fonctionnaire blasé et nonchalant.

Il y a bien le commandant Thorand, cent dix kilos dans sa vareuse de chasseur, dignitaire maçonnique et bonze radical, qui jouit d'une popularité assez considérable. Disons aussitôt qu'il la cultive en invitant chauffeurs, cuisiniers et ordonnances à boire avec lui le pernod devant le Tout-Romans, chez Fayet. Nous aurons quelque peine à en faire le centurion de nos rêves.

A l'autre pôle, il y a le commandant Guglielmi, dit Spada, un ancien caporal corse, verdâtre, tout petit, avec un képi bosselé et cassé à la Soixante-Dix, de grandes moustaches noires de palikare, dans lesquelles se perd son patois caillouteux, pratiquement analphabète, d'un Courteline tellement parachevé qu'il en est à peine vraisemblable. Ridiculisé par tout l'état-major, faisant autour de lui le désert à cent mètres, il promène, solitaire, d'un bout à l'autre de la ville, sa vocation refoulée de chaouch, s'interrogeant sans fin dans sa tête naïve et féroce sur ces ordres supérieurs qui le brident désormais, se payant sauvagement sur l'ivrogne ou le bleu assez inhabiles pour venir se fourvoyer sur son chemin.

Le chien de quartier naguère pouvait faire sourire. Il devient odieux lorsqu'il rôde toujours, à six cents kilomètres des lignes où des civils en uniforme font métier de mourir. Si Spada est trop borné pour qu’on puisse lui confier mille hommes au combat, son cas n'est-il point pire encore ? Qu'est-ce que des soudards qui deviennent inutilisables le jour où tonne le canon ?

Nous avons encore cet affreux capitaine M..., guerrier des plus professionnels lui aussi, qui s'accroche depuis six mois au bureau des effectifs, qui est parvenu à en faire chasser un par un trois officiers réservistes nommés à son remplacement. Tous les bureaux regorgent d'ailleurs d'adjudants de trente-cinq ans, illettrés, bien nourris, et d'une écrasante superbe, qui font campagne à haute solde entre les comptes de cordonnerie et le composteur.

Non, ce ne sont pas ces gens-là qui referont des soldats avec le troupeau sceptique et avachi que nous sommes.

Je rapproche ce que je peux observer autour de moi de tant d'histoires déjà entendues, de celles qui nous arrivent des quatre coins de la France chaque jour. Il ne s'agit vraiment plus de légende pittoresque et de gaîtés du bataillon. Quelque chose s'est disloqué dans la hiérarchie de l'armée française. Le principe. irremplaçable et si beau en soi de la subordination militaire y joue au rebours des valeurs réelles. La discipline rigide, avec tout ce qu'elle pouvait avoir de nécessaire, s'est affaissée. Mais ce qui s'y est substitué est pire que les brutalités les plus injustes. C'est la barrière des classes, ce sont les préjugés sociaux transportés parmi les uniformes. Entre les hommes de troupe et les gradés de toutes espèces, généraux, officiers, sous-officiers de métier, les rapports sont trop souvent ceux du prolétariat et de la bourgeoisie, grande, moyenne et petite, du dépouillé et du possédant, non plus à la mode autoritaire et violemment triomphante, mais à la mode du capitalisme démocratique, ouvriers avilis, patrons lâches mais enfermés dans leur égoïsme et leur morgue étriquée, la hargne, la haine ou l'ignorance séparant plus que jamais les deux camps.

J'entendais l'autre jour près de moi chez Fayet de tout jeunes officiers qui parlaient armée, fils de fabricants ou de commerçants riches de la province, plus ou moins bacheliers apparemment. Le premier disait : “Si, je vous l'assure, il y a quelquefois parmi les deuxièmes classes des gens très bien”. Les autres se récriaient à grand bruit, comme sur un propos d'une anarchique indécence. Petits benêts, mais affligeante méthode que l'éducation militaire qui peut les laisser libres de penser aussi niaisement.

Je ne veux rien outrer ni généraliser. Mais autour de nous et de cent de mes camarades dispersés du Nord au Sud, c'est l'évidence que les officiers ne savent rien de nos vrais besoins, tant physiques que moraux, et ne font rien pour les découvrir. Je connais bien certain capitaine de chasseurs, ancien notaire, aujourd'hui sur le front, je suis sûr qu'il est capable de se pencher sur le sort de ses petits poilus, non pour les dorloter mais pour les avoir dans sa main, les tremper, les unir, en faire des hommes de combat. Je ne veux pas douter qu'il en soit ainsi dans le dessus du panier de l'armée française. Mais encore une fois, la moitié de cette armée est une masse informe. C'est elle que je connais et dont je parle ici. L'énormité de son poids mort m'effraie. Que ne risque-t-il pas de peser dans les destinées du pays ?

Dans cette tourbe, l'inertie est la règle. J'ai vu celle des hommes. Celle de leurs chefs n'est pas moindre. Ils se laissent glisser au gré des loisirs imprévus, de l'oubli des affaires et des querelles conjugales, plus crédules que le troupier sur le chapitre de la victoire sans batailles, parce qu'ils ont le tort de lire et qu'ils connaissent des truismes, des précisions techniques et des chiffres. Le résultat est le vaste abrutissement d'une vie de caserne où l'on ne fait même plus l'exercice.

Je loge depuis quelques jours, nanti d'une autorisation presque régulière, chez M. Barnarat, qui tient un vaste et poisseux café dans le centre de Romans. J'y partage un taudis obscur, idéal cependant auprès du G.U.P., orné de nus de femelles découpés dans Paris-Flirt, avec mon ami Mouton, cordonnier à Saint-Vallier, qui nourrit l'ambition contrariée mais tenace de se faire embaucher chez le maître bottier.

  1. Barnarat, lyonnais d'origine, offre un type superbe de citoyen démocratique. Son emploi du temps quotidien mérite une petite narration.

Levé sur le coup de neuf heures, M. Barnarat commence à se traiter par deux ou trois chopines de vin blanc. Vers onze heures et demie, il consulte son horloge et proclame que l'instant des apéritifs sérieux a sonné. Homme de règles et de principes, il a sa marque de pernod, dont le choix a été le fruit d'une longue expérience, qu'il fait venir de loin, et qu'il est seul à boire dans Romans, ou l'on fabrique une douzaine d'anis considérés. Il en étanche cinq à six verres jusqu'aux environs d'une heure et demie où il rompt le pain, en débouchant du Beaujolais. Le déjeuner ne va point, cela s'entend, sans une bonne demi-tasse de marc ou d'armagnac. M. Barnarat s'autorise le petit verre avec la clientèle jusqu'au moment où il se rend à sa partie de boules, qui occupe le principal de son après-midi. Avec les boules, le vin rouge du pays est obligatoire. Il ne m'a pas été donné d'estimer en personne par quel nombre de pots M. Barnarat lui rend hommage, mais je lui fais confiance, d'autant que le jeu de boules est altérant. Je ne parle naturellement point des jours de championnat, où le gosier de notre héros défie toutes les statistiques.

Aux alentours de six heures, M. Barnarat regagne son café. Un cercle d'amis fidèles l'y attend pour célébrer le sommet de la journée, le grand, véritable et solennel apéritif. C'est le moment où volontiers, M. Barnarat entame le récit de sa dernière campagne, qu'il a faite en septembre en qualité de lieutenant de garde-voies entre Saint-Vallier et Saint-Rambert d'Albon. Il a été renvoyé à ses foyers au bout de trois semaines, et son amertume s'exhale chaque soir à neuf au quatrième verre de son pernod. Car je n'ai point besoin de dire que le pernod préside la séance. M. Barnarat, je le jure, ne sera point quitte qu'il n'en ait vidé ses dix verres où l'eau tient la moindre part, et la tablée du compère lui tient tête vaillamment. Chacun a son cru de pernod favori mais la purée d'absinthe est de même couleur dans tous les verres. Un seul des chevaliers n'y goûte point. Tourmenté par ses viscères, il avait vu un docteur qui lui dit : “Supprimez votre pernod”. Il s’est donc mis depuis au noir mandarin. Je dois dire pour l'histoire que, de toute la compagnie, il est de loin le plus maltraité, la face lie de vin, bavant, la main tremblante, ouvrant péniblement un oeil strié et glaireux, d'un gâtisme accusé à moins de quarante-cinq ans.

Le ton s'échauffe et s'envenime. Bousculant l'homme au mandarin dont la salive file, les buveurs s'affrontent, se vouant mutuellement à la male mort. M. Barnarat vitupère l'intolérance religieuse à la face du tailleur, qui lui réplique par une diatribe forcenée sur la quadrette victorieuse au concours de boules de Pâques 1925.

On boit la tournée de la réconciliation vers neuf ou dix heures ! Il n'est point si rare que la cérémonie se prolonge jusqu'à minuit, et non plus qu'on atteigne le quinzième ou vingtième pernod. M. Barnarat s'en va manger la soupe avec quelque morceau, dûment arrosé, de boudin ou de caillette. Enfin, avant de clore sa porte, il vide avec les derniers clients quelques couples de demis bien tirés, qu'il entremêle plaisamment d'un ou deux chasse-bière, à moins que les bouchons de champagne ne sautent en l'honneur d'une “Fanny” retentissante, d'une belote magistrale ou de quelque autre grand événement.

Il me faut confesser que cet éminent éclectique a pu aborder la soixantaine avec la pupille alerte, le pied encore léger, la taille cavalière, le poil dru et brillant. On a pu voir toutefois qu’il est ménager de ses forces. Sa femme, levée à l'aube, debout quinze heures durant et qui ne boit que de l'eau minérale, porte sur son échine lasse et sa figure flétrie tous les stigmates des maux épargnés à son maître et seigneur. [2]

A peine viens-je de nouer une amitié qu'elle sombre dans la vinasse. J'échangeais quelque propos amer et salubre avec ce brave homme. Deux heures plus tard, je voudrais en reprendre le fil. A la place du sage sentencieux et paisible, je retrouve un pantin qui me rote dans le nez. Mon bon copain Cléry, le caporal, philosophe d'une nuit où il fut miraculeusement à jeun, s'est révélé bien vite comme un poivrot chronique. Badot, l'affectueux marlou, peut lui tenir compagnie., Magnat, le caporal fantôme, retrouvé au fond d'une prison villageoise, cuvant on ne sait combien de décalitres, est un morne animal dont on ne tire pas vingt mots intelligibles par jour. Et celui-ci, et celui-là...

Les paysans naguère s'en tenaient peut-être à l'aramon, laissaient aux ouvriers et aux employés des villes le privilège des bistouilles distillées. Mais l'égalité s'est faite, les prédilections se sont confondues. Les hommes se saoulent à mort, sauvagement, en vingt minutes, avec n'importe quoi.

Nos cantonnements sont peuplés de déchets alcooliques, de nabots dégénérés, déjetés, ravinés, parmi lesquels comptent comme par hasard nos deux seuls Marseillais, deux ignobles guenilles humaines. Ces misérables, cuits déjà dans le ventre de leur mère, sont à ce point imbibés et ravagés qu'au troisième quart de vin ils chancellent, hagards. Et pourtant, ils entonnent leurs huit et dix litres par jour. Sur leurs culottes fangeuses, leur vomi d'hier rejoint en traînées violâtres celui de l’avant-veille. Sur leurs faces de gnômes hébétés, la sanie s'agglutine en croûtes à la boue des ruisseaux où on les a ramassés. Ils sont effrayants et pitoyables. Mais les chambrées s'en tordent les côtes. Il n'y a pas de personnages plus populaires, voire plus admirés.

N'importe quel bavardage tourne invariablement à des récits de dégueuleries. Les seuls exploits mémorables sont des records de brutes, vingt-cinq pernods, trois litres de marc à deux. On ingurgite l'anis par purées compactes, à pleins verres, avec un haut-le-coeur entre chaque goulée. C'est le vice morose et mécanique dans toute son imbécillité.

Il semble que l'alcool ait brûlé jusqu’à leur sève. Je sais que la biffe n'a jamais été une favorite de la Vénus des camps. Mais on ne peut imaginer, pour les amours militaires, plus parfait paradis que les rues de Romans, où frétille une nuée de petites ouvrières pimpantes et toutes chaudes. Quelle que soit la concurrence d'un groupe d'aérostiers parés de l'irrésistible casquette, l'occasion est innombrable et des garces de seize ans viennent relancer les troupiers jusque dans les guérites. Pourtant, les couples sont rares, la gaudriole bien platonique et bien tiède parmi les monstrueux hoquets de l'ivrognerie. Même au casse-bretelles, les hommes font beaucoup moins de mal aux pensionnaires qu'à la cave. Boire le coup est moins fatigant que de le tirer... L'effort de la saccade lui-même devient excessif pour les reins de ce peuple qui s'abandonne.

J'ai eu cette semaine quelques heures de vrai plaisir, où tous les charmes vivifiants de l'armée m'avaient reconquis.

Nous sommes partis pour une marche-manoeuvre d'une trentaine de kilomètres. Le portail du cantonnement s'est ouvert sur notre colonne bigarrée qui n'a jamais été si longue. Pour une fois, tous les tire-au-flanc ont été débusqués et tout le monde a l'air de marcher du meilleur coeur. Nous échappons pour un jour entier à la pestilence des troquets et de nos écuries Le matin est sec et ventilé, l'allure un peu lourde, un peu lente, mais solide. Les Arméniens hurlent des scies monotones et exotiques, étranges “Auprès de ma blonde” de cette guerre, mais ils trottent ma foi ! comme des bourricots. Ce matin, sans y regarder de trop près et avec un peu d'optimisme, on pourrait presque les prendre pour des espèces de soldats.

On abat quinze à dix-huit kilomètres sans trop de béquillards. Je l'ai toujours pensé. Que les hommes soient secoués, qu'ils marchent au coude à coude et les voilà sauvés. A travers boqueteaux et fossés, la manoeuvre commence, aussi classiquement indéchiffrable qu'il se peut. C'est notre illustre capitaine qui a conçu le thème. Il s'y est si magistralement pris que l’assaillant, qui devait forcer les positions, détale à toutes jambes après cinquante mètres d'attaque, tandis que vingt assaillis lui font une poursuite acharnée et que le gros de la résistance l'attend de pied ferme, mais en lui tournant résolument le dos. On nous a distribué des paquets de cartouches à blanc. On en profite pour fusiller aussitôt le capitaine. On organise aux quatre coins de l'horizon une pétarade qui consomme la ruine de toute sa stratégie. Peu importe. On court, on saute, on prend l'air.

La soupe chaude apportée par une camionnette nous attend dans les hangars du village voisin. On a rempli les bidons aux portes de quelques fermes. Quatre gamines de quinze ans font les belles à bicyclette, et des grisons à ceux de la classe 36, la compagnie n'a plus d'yeux que pour ces paires de mollets nus. Nous sommes une bande d'écoliers qui éprouvent l'allégresse physique d'avoir fait jouer leurs poumons et leurs muscles, et viennent même de trouver l'ordinaire possible.

Une petite demi-heure de sieste et qu'on reparte. Mais les officiers gueuletonnent à huis clos. Un pousse-café n'a jamais tué un fantabosse. En un clin d'oeil, les six bistrots de l'endroit sont bondés. Les officiers digèrent. La halte s'éternise, les chopines couvrent les tables. On boit à la régalade au milieu de la rue, on boit assis sur les trottoirs. Les officiers gagnent enfin une conduite intérieure, nous déléguant un aspirant émerillonné. On compte à vue d'oeil sous les casques cent pochards. Il faut rentrer à bras, traîner sur les genoux les plus mûrs. Nous semons les autres, zigzagants et vociférants, sur trois kilomètres de route. La compagnie est enfin restituée à sa porcherie, titubante, hoquetante, ayant fait son plein de chaque soir.

Je suis rempli de lassitude. Rien ne peut plus la chasser. J'étais arrivé à l'armée en apportant avec moi, bagage assez cocasse, mon goût d'amateur de vie militaire, disons mieux encore, de dilettante. Je vois devant ce mot la mine scandalisée des professionnels de tous grades. Mais chacun donne ce qu'il peut. Je ne saurais offrir, et ce n'est point ma faute, un élan patriotique. Il m'a bien fallu mettre, non sans peine, mon patriotisme au placard, puisqu'il ne conçoit et ne réclame que la paix. Mon dilettantisme est beaucoup plus utilisable que presque tout ce que j'ai vu autour de moi, apathie, fainéantise, sournoise rébellion. Il suffirait pour me préparer convenablement à un certain nombre d'éventualités, dangereuses tant pour le pays que pour ma petite personne, et je ne vois pas que l'on puisse exiger davantage de moi. Mais je suis bien bon de justifier ce dilettantisme. Il faut croire qu'il est lui-même encore superflu, puisqu'il n'a pas jusqu'ici trouvé le moindre emploi.

Il est fort découragé, et vraiment il ne me reste plus grand' chose, hormis les térébrantes pensées qui reparaissent : nous sommes en train de crever dans cette guerre comme des enlisés dans des sables, il est impossible de la faire, il est encore moins possible de s'en dégager.

Je rencontre parfois au café Fayet un charmant petit aspirant, Gruffaz, qui vient des zouaves. Il a vingt-trois ans. C'est un lecteur fidèle de nos journaux. Il fut ardemment munichois et antijuif, ce qui ne l'empêcha point, lui savoyard, d'être ravi de son retour chez les alpins. Je lui dois mes dernières velléités d'esprit de corps. Il est crâne, impatient du risque et sceptique en même temps. Mais lorsque je veux l'entraîner vers les plus cruelles lumières, il se dérobe. Il ne peut supporter l'aspect de ces réalités.

J'entends, toujours chez Fayet, de nouveaux aspirants et jeunes sous-lieutenants, venus pour l'instruction des “ bleus ”. Ceux-là sont, sans la moindre nuance, casoar, gants blancs, plaies et bosses et cors de chasse. Il m'est impossible de ne pas les trouver horripilants. On leur a crié : “Guerre”, et cela a retenti sur leurs épidermes comme des baguettes sur la peau d'âne. Pas un atome d'idée derrière ce mot. Leurs têtes sont des échos, des tambours. Sans eux cependant, il n'y aurait aucune armée possible, ce sont pour la patrie les meilleurs instruments de la conquête ou de la défense. Oui, mais dans cette guerre, nous n'avons rien à défendre ni à conquérir. On a le sentiment que sans ces fiers étourneaux, l'absurde aventure ne serait pas possible. Et ce n'est point après tout, une vue si simpliste.

Dans les guerres à peu près cohérentes, un cas comme celui de notre G. U. P. était net. Ou bien le dépôt devenait insupportable et l'on préférait encore la vie du front, ou bien la peur dominait et l'on s'incrustait au dépôt. Cette fois, le dépôt est plus odieux que jamais, mais la vie de l'avant existe à peine. Les aspirants s'excitent : “Vivement qu'on monte au baroud !” Quel baroud, mes puceaux ? Les cent cartouches brûlées de part et d'autre du Rhin ? La situation sans changement sur la Blies ? Le prisonnier qui a été fait devant Forbach ? Le moyen de se passionner pour ces simulacres burlesquement cérémonieux ! Là-bas, ne touche-t-on pas du doigt mieux encore qu'ici la stupidité de notre équipée ? Les hommes disent parfois : “Voilà le printemps. Le grand coup peut arriver”. Mais sans grande conviction, et pour ma part je n'en crois rien. Ce sont encore des souvenirs qu'on traîne de l'autre dernière. Les Fritz ne sont pas fous. Et quant à nous, pour attaquer, peuchère !

Mais ce qui existe sûrement, derrière Rhin et Moselle, ce sont d'autres dépôts, d'autres pourrissoirs à troupiers, et ces lugubres plaines jaunes, ces villages recroquevillés, ces puanteurs industrielles du bassin de Briey ou du pays de Metz. Allons ! il n'existe aucune raison valable de leur sacrifier le plumard de M. Barnarat.

Cependant, voici des nouvelles. Le “canon de 25” va s'ébranler pour la troisième fois, mais il paraît que c'est décidément la bonne. Il sera renforcé d'une trentaine de nos benjamins. Le sous-lieutenant Le Guinilho commande la troupe. Les hommes s'affairent, s'astiquent, palabrent avec une pointe de vanité blagueuse. A ces apprêts, une petite fièvre m'a trotté derechef sous la peau. Je me rappelle le grand départ du 2e zouaves, en 1915, dans mon village où il était venu se reformer, les hommes arborant ces souliers jaunes tout neufs, qui étaient le signe de la montée vers la mort. J'avais onze ans. Comme j'aurais voulu suivre les zouaves ! Franchement, le G. U. P. devient intenable. Que sera-ce sans le “25” qui formait sa seule cellule encore un peu virile ? J'ai demandé à Le Guinilho de m'emmener. Il me ricane au nez : “Pensez-vous ! J'ai des ordres pour ne prendre personne au-dessus de la classe 28”. Il n'ajoute pas, mais je le devine sans peine, que je suis aussi à ses yeux une espèce de morpion d'intellectuel et qu'il ne va pas s'embarrasser de ça : “Au fait, continue-t-il, nous allons d'abord dans un camp, et si vous avez envie de la riflette, vous y serez peut-être avant nous. Tout le G. U. P. détale. Vous êtes désigné pour un renfort de pionniers, dans la zone des armées”.

Ah ! barca ! que je sois pionnier si le sort le veut. D'ailleurs, les journaux se mettent à exhaler un fumet de crise ministérielle qui m'a vite distrait des canons même antichars. Je savoure les aveux à peine dissimulés de ce désarroi qui nous venge. Hé ! leur guerre a du plomb dans l'aile, et plus vite encore que nous ne le pensions. L'aigreur de la querelle en dit suffisamment long. C'est la maffia qui se chamaille devant une nouvelle “expérience” qui tourne au plus mal : l'expérience Maginot après l'expérience Blum. C'est maintenant qu'il est succulent de reprendre les discours à peine refroidis de la résolution inébranlable, des disputes partisanes noblement reniées, de l’unité morale dans la nation pour la victoire. Lorsqu'il s’agit d'étaler sa déliquescence, ce régime ne déçoit jamais. Il devance même toujours nos espoirs. Huit mois après avoir pris la plus effrayante décision de notre histoire, le gouvernement se déjuge et s'affaisse. Bravo ! nous n'attendions pas cela si vite. Les records de l'ignoble et du grotesque sont battus.

Les aspirants baroudent imperturbablement : “Ah ! dis donc les 13/2 millimètres antiaériennes jumelées ? Ah ! mon vieux, qu'est-ce que ça doit faire comme travail. Et sur de la troupe à découvert ! Tu parles d'un carton ! Taragadagadag !” Je voudrais leur brandir sous le nez les feuilles du jour : “Mais lisez donc, petits foutriquets ! Occupons-nous un peu de choses sérieuses. Comprenez donc enfin que tout fout le camp !” Notre farce militaire ne m'est plus supportable. Je voudrais prendre à témoin chacun de la pureté de mes dernières prophéties. La censure est débordée. Elle est d'ailleurs mise en accusation publique à la Chambre, dans la presse, par Frossard qui fulmine excellemment. On clame la dérision de notre propagande. On accuse le honteux débagoulage de notre radio. Le pitoyable carton-pâte du mythe Daladier s'effondre. Les marxistes S.F.I.O. exigent d'accéder au pouvoir. Au huitième mois de la guerre, on envisage froidement un nouveau ministère Blum. Voyons ! qui n'a pas compris ? Qui oserait encore accorder un kopek de crédits à ces infâmes paillasses, prétendre encore qu'on peut derrière eux marcher à une victoire ? Pour comble, la Finlande est en train de succomber, ce n'est plus qu'une question d'heures, sans que les démocraties lui aient seulement envoyé un bataillon. Ah ! si cet infâme vaudeville pouvait se terminer dans quelque gâchis parlementaire ! Mais ce serait trop beau.

Je voudrais être à Paris. Je suis exaspéré par l'absence des vraies nouvelles, celles que l'on n'imprime pas. Qu'au moins nous changions vite de place. Cela me fera peut-être patienter quelques semaines.

Heureusement, je n'ai plus beaucoup à attendre. Le “canon de 25” s'est embarqué pour le camp d'entraînement de Granville, en Normandie. Neuf hommes sur dix avaient la conviction que Granville est sur le front. Ils se sont ébranles comme pour la bataille. Les trois quarts étaient saouls à tomber. Le G. U. P. a contaminé même les gars du canon. On aura bien de la peine à leur enlever sa marque.

Après-demain, c'est notre tour. Mais nous savons déjà que nous n’allons pas bien loin.

CHAPITRE XVII
5 / 440 PIONNIERS

Nous sommes bien partis pour la zone des armées, mais pour celle des Alpes. Le ridicule est fidèlement attaché à mes pas de troupier.

J'ai du moins découvert, chemin faisant, l'admirable vallée de la Drôme, que je rougis d'avoir ignorée jusqu’ici. A huit heures du matin, elle a toute la lumière, les valeurs ocrées, bleutées et argentées des Corots d'Italie ; leur dessin aussi, vieilles citadelles méridionales, petits villages en colimaçons, premiers cyprès de pleine terre, châtaigniers et chênes verts agrippés aux collines sobres. Bientôt, les lignes, toujours aussi pures et nettes, se font plus tourmentées. Le coteau devient montagne, la Drôme bleue et rapide devient torrent et parle des neiges qui barrent l'horizon. La nature est en veine d'imagination et prodigue toutes ses fantaisies. Eboulis colossaux et harmonieux, ravins, falaises, gorges, cimes, chaque tournant du chemin est une surprise nouvelle. Le ciel latin est de tous côtés escaladé par des rochers étranges et élégants. C'est le paysage qui comble toutes mes prédilections, le Midi et l'Alpe, la noblesse d'une terre déjà provençale, mais soulevée d'un lyrisme qui fouette incomparablement l'esprit.

Il s'agit bien de lyrisme ! Nous allons à Briançon, en renfort au 5e bataillon du 440e régiment des pionniers, hybrides de vieux fantassins et de sapeurs. Notre sort, dans les derniers jours, a été ballotté au gré de vingt ordres minutieux, péremptoires et contradictoires. J'ai failli devenir aviateur “rampant”, mitrailleur, voltigeur. Puis, j'étais pour les pionniers le dernier de la liste, en “majoration”, avec une demi-douzaine de terrassiers, deux coiffeurs et un mécanicien. A la minute suprême, les terrassiers ont été biffés, les coiffeurs, le mécanicien et le journaliste définitivement et soigneusement sélectionnés pour le régiment des remueurs de terre.

Nous avons emmené avec nous Marseille, cheminot des Hautes-Alpes dans le Civil, alcoolique à la troisième génération pour le moins, et dans le militaire le plus effarant ivrogne du G. U. P. On nous l'a légué pour en débarrasser Romans. Son dernier exploit, il y a trois Jours, a été de dégueuler sur l'uniforme du capitaine qui venait de le ramasser, à minuit, ivre-mort, dans le ruisseau. Marseille, vrai paquet de fange et de poils hirsutes et jaunâtres, vient de s'immortaliser hier par ce dialogue avec le commandant Thorand qui inspectait notre détachement au garde-à-vous.

  • Marseille, n'as-tu pas honte de te dégrader à ce point, d'aller rouler par terre comme une bête ?
  • Mon commandant, c'est que j'ai le cafard de faire le con ici.
  • Hé ! bon Dieu ! réplique Thorand, si nous faisons tous les cons ici, est-ce que tu ne sais pas que c’est à cause d'Hitler ?

Le 5e bataillon du 440 loge dans une des ailes de la caserne Berwick, l'ancien quartier du 159e. Les pionniers qui nous accueillent ont de bonnes têtes placides, et bien nourries, le type classique des “pépères” de 1915. Nous croisons des figures d'un haut relief tenant du colporteur et du pâtre, à barbes de fleuve, bissac, pèlerines, gourdins au poing. Le lieu respire une rustique sérénité.

Nous posons les premières questions d'usage.

  • Il n'y a pas grand' chose à foutre, nous répond-on. Ça pourrait aller s'il n'y avait pas Boudier. C'est le commandant, placier en soutien-gorge dans le civil. Ce n'est pas que ce soit le mauvais bougre, mais on ne peut pas faire plus pied. Vous allez vous rendre compte. Le voilà qui vient vous passer en revue.

Le commandant Boudier fait, on doit le reconnaître, une composition extrêmement réussie. Béret sur l'oreille, badine sous le bras, moustache gauloise aux pointes relevées à la houzarde, cuisses légèrement arquées, la voix claironnante, le windjack barré de quinze décorations, c'est un véritable Flambeau à quatre ficelles. L'accent bref, bourru et cordial, est un chef-d’œuvre. Il nous harangue comme si nous allions franchir demain le Saint-Bernard.

- Soldats, vous venez de la plaine. Vous voilà maintenant aux frontières de la patrie, face à l'ennemi. Vous êtes venus sans fusil. Mais cela n'a point d'importance. Vous êtes les combattants de la pelle et de la pioche. Vous allez livrer ce dur combat avec toute la vaillance de nos traditions.

Aussitôt, il enchaîne :

  • Est-ce qu'il y a parmi vous un trombone ?

Silence dans le rang.

  • Quels sont parmi vous les musiciens ? Naturellement, je ne demande pas les pianistes !
  • Deux ou trois gaillards sortent.
  • De quoi jouez-vous ?
  • Du piston, mon commandant.
  • C'est toujours la même chose. Ils jouent tous du piston. Jamais je n'arriverai à avoir mon compte de clarinettes et de trombones. Ah ! que c'est insupportable, bon dieu de bois !

Enfin, il consent à s'enquérir de nos métiers pour nous répartir dans la bataille de la mine et du terrassement.

Il fait cela à la “petit caporal” : “Ton nom, toi ?” et il me pince l'oreille. J'ai résigné toute délicatesse, mais les familiarités de ce Gaudissart-Ratapoil me lèvent la peau.

Berwick est une belle et spacieuse caserne de pierre avec des douches, des lavabos sans nombre, le chauffage central partout, un effort réellement moderne. La cuisine de notre aile, à laquelle président intelligemment un boucher de Vienne et un pâtissier de Grenoble, est très honnête. Nous pourrions mener une vie fort convenable. Malheureusement, les hommes ont apporté avec eux leur crasse envahissante. Nos superbes constructions sont aussi souillées et fétides qu'un port de la Mer Noire. Encore parait-il que les pionniers ont amélioré la maison. Au départ du Quinze-Neuf, on a enlevé un train entier d'immondices. L'armée française est indécrottable.

Je suis affecté à la 1e compagnie, capitaine de Bardonnèche, avec une dizaine d'autres Romanais. Les anciens nous félicitent : “Vous avez de la chance. Bardonnèche, ça c'est quelqu’un. Et il n'y a pas meilleur.”

En dépit de sa particule, le capitaine de Bardonnèche est une figure fortement plébéienne, rougeaude et épaisse sur une massive carrure. C'est effectivement un des petits seigneurs du Briançonnais, mais à la façon du siècle et du régime. Il est instituteur, S. F. I. O., militant et conseiller général de

Largentière, le bourg industriel à quinze kilomètres d'ici. On le donne pour un député fait d'avance dès qu'il y aura des élections. Il m'accueille avec bruit.

  • Alors, c'est vous, le fameux Camelot du Roy, le collaborateur de Maurras et de Daudet, qui écrivez des articles pour faire engueuler les officiers ? Vous allez me faire le plaisir de marcher droit, ici.

Mais ce ne doit être qu'une façon de galéjer, de montrer qu'il connaît son monde et de rappeler à la galerie la vigueur de ses convictions, car il enchaîne aussitôt avec cordialité :

  • Est-ce que ce n'est pas malheureux de voir ça ! Un journaliste, et qui vous pèse tout de suite soixante-cinq kilos tout mouillé, quand il nous faudrait trente portefaix... Qu'est-ce que nous pouvons bien en faire de ce brave journaliste ? Nous le mettons débardeur à la manutention, ou bien nous l'envoyons à la mine ? Allons, nous le sacrons mineur. Comme ça, il maniera le gros crayon.

Je ne demande pas mieux. La mine est tout en haut de Briançon, juste sous la gigantesque et médiocre France de Bourdelle. On en parle avec un vif respect. Les troupiers blancs de poussière, qui arrivent en retard à la soupe, ont d'altières et sonores exigences : “C'est pas tout ça. Vivement que les cuistots nous servent, et avec du rab. On redescend de la mine, nous autres.” J'y grimpe donc avec un des coiffeurs et un horticulteur. Nous sommes remplis d'ardeur et de curiosité, Les machines à air comprimé ronflent bruyamment, des câbles, des tuyaux, des pics jonchent le sol. Le chantier est sous la direction d'une dizaine de gradés du génie. Les hommes, eux aussi, sont presque tous des sapeurs, vêtus de combinaisons bleues.

La mine est formée par une série de galeries creusées en plein roc. Tel est du moins le plan que d'autres sapeurs, à plusieurs galons, ont dû en tracer. A la vérité, les galeries sont encore, après quelque six mois de travaux, à l'état de niches fort modestes. Celle où nous allons oeuvrer contient difficilement quatre hommes. Une complète incertitude règne sur l'emploi possible de ces trous.

On fore des chambres de mine dans le rocher au marteau piqueur, le gros crayon du capitaine, on bourre de dynamite et l’on fait sauter. Pour la première matinée, une panne de machines nous prive de nos marteaux, et l'on nous met à brouetter quelques cailloux. Le second jour, nous nous escrimons avec nos marteaux. Nous y sommes à peu près aussi habiles qu'un bûcheron à faire de la dentelle. Il faut tenir à bout de bras au-dessus de sa tête ces trente kilos trépidants, et faire mordre le granit à des fleurets usés comme de vieux clous de galoches, le tout dans un nuage de poussière et sous les glapissements de deux jeunes rempilés du génie. Il est superflu de dire que nos résultats sont plutôt négligeables. Le principal est une vibration que je garde dans mes os jusqu'au milieu de la nuit. Le troisième jour enfin, avec l'aide des sapeurs et des rempilés, nous faisons exploser nos mines. Nous recueillons triomphalement de quoi remplir trois casques de déblais.

Avec nous est venu de Romans un vrai mineur, Orcat, des charbonnages de la Mure. On vient de s'aviser que l'emploi de charretier auquel il a été affecté ne convenait peut-être qu’imparfaitement à ses aptitudes. Orcat est dépêché à là mine avec nous. C'est une forte tête. Il s'esclaffe librement devant notre matériel et notre technique : “Eh bien ! avec ça, vous n'êtes pas fauchés. D'ici que vous soyez de l’autre côté de la montagne, il n'y a pas loin, c'est moi qui vous le dis.” Les sergents rempilés ripostent avec aigreur. Une âpre contestation s'engage. Ils en réfèrent à l'adjudant qui va chercher le lieutenant. Orcat expose flegmatiquement comment il faut forer ici et là pour percer rapidement plusieurs mètres. Mais on lui fait sentir avec vigueur qu’un ouvrier ne va pas se mettre à transformer les règlements du plus savant corps de l'armée française. Orcat a compris. Nous aussi. Ce n'est pas encore à la mine que nous nous ferons de sérieuses ampoules. Nous chargeons et poussons une demi-douzaine de brouettes, nous amorçons la moitié d'un fourneau, durant nos cinq heures de travail. Cette cadence doit être fort normale, car désormais, personne ne nous inquiète plus.

La grande affaire de chaque séance est la lecture du Petit Dauphinois, que grimpe jusqu'à nos sommets un crieur. Daladier chancelle, Daladier est par terre. Je souhaite de toutes mes forces une crise aussi longue et vaseuse que possible. Je m'entretiens abondamment avec Orcat qui me plaît. Il a la dureté d'un rude prolétaire et celle du montagnard, avec le vieux fonds agressif des gars de l'Isère, les “brûleurs de loups”. Pour Orcat, la situation est fort nette. La guerre a été déclarée pour pouvoir mettre le peuple en kaki et lui clore le bec. Son mépris du régime tout entier est tel qu'avec toute sa naïveté brutale, je me sens beaucoup plus proche de lui que de tant de beaux esprits et bourgeois parisiens. Mais sur son dégoût, on n’a jamais rien semé d'autre que la propagande communiste. Sans qu'il l'avoue, on devine bien que les mots d'ordre de sa cellule restent son seul catéchisme.

En vingt-quatre heures, Daladier est remplacé par un incroyable ministère Reynaud. Je reste, comme tout le monde, obnubilé par les pitreries de la politique interne. On oublie que rien n'a plus d’importance, sinon la volonté de Londres, et que sous l’aiguillon du bellicisme anglais, une molle canaille est remplacée par une canaille du type dur. On vitupère les poings serrés le ministère à la Blum que le misérable petit Reynaud nous ramène : vingt deux ministres, treize sous-secrétaires d'Etat, les socialistes réinstallés. Quel symbole que ce Blocus, l'arme capitale, le grand espoir démocratique, dont le ministère revient à l'un des plus imbéciles fantoches du Front Populaire, Georges Monnet ! Si Frossard faisait si âprement campagne contre l'information, c'est qu'il guignait la place. Il vient de l'obtenir.

Pour les poilus, le détail de l'événement est vague et indifférent. Ils auraient peut-être eu, malgré tout, un petit sursaut d'espoir en voyant reparaître Blum. Le reste importe peu : “C'est du pareil au même.” Inutile de chercher à les endoctriner. Ils sont infiniment plus attentifs à d'absurdes bourdes qui courent les unités et dont voici la dernière : Daladier, d'accord avec Gamelin, épargne la vie du poilu, mais Laval est un buveur de sang qui manigance des coups pour faire déclencher une grande offensive. Comment leur expliquer qu'ils insultent ainsi l'un des deux ou trois hommes d'Etat qui aient condamné cette guerre, le seul peut-être qui aurait pu nous l'éviter ?

Je me refuse à croire que le scandale du cabinet Reynaud puisse durer. La presse est très hostile. Je veux nourrir de nouveaux espoirs, cette clique doit être balayée. Reynaud obtient une voix de majorité devant la Chambre, après Dieu sait quels trucages. Qui oserait, en pleine guerre, appeler cela un vote de confiance, célébrer encore l'unanimité de la nation ? C'est un désaveu écrasant. Que la Chambre se liquéfie donc, que les ministères dégringolent les uns sur les autres. On ne continue pas la guerre à une voix de majorité, obtenue en sabotant les urnes, en maquillant les bulletins comme dans une élection à la Guadeloupe. Tous les autres politiciens détaleraient. Mais ce bandit de Reynaud est le plus cynique de la confrérie. Il s’accroche avec d'arrogantes et grinçantes tirades.

L'Action Française fulmine dans le désert, selon l'habitude. Tout le monde fait le gros dos, terrifié devant les conséquences entrevues d'une nouvelle chute, en s'inventant des raisons pour trouver possible, voire louable, cette réunion d'idiots et de gredins. La situation, sans doute, ne laisse point d'être choquante, déplaisamment inédite. Mais nous sommes en guerre, messieurs. Ne doit-on point obéir aux exigences du patriotisme ? Par patriotisme, on se rassemblerait derrière un nègre, derrière Ferdinand Lop. Ah ! le pays d'eunuques !

Bon gré, mal gré, je replonge dans la vie du Cinq-Quatre cent quarante.

Parce qu'il est formé de quasi-territoriaux dont beaucoup grisonnent, le commandant Boudier s'est fignolé cette image, qu'il a sous sa coupe une vieille garde de grognards, de durs à cuire, et doit tous nous voir sous l'aspect de grenadiers chevronnés. Mais cette fantasmagorie lui est rigoureusement personnelle.

Au G. U. P. de Romans, on pouvait conserver un espoir, celui d'en sortir, ou de voir apparaître dans la mélasse de ce carrefour quelques éléments nouveaux. Le Cinq-Quatre cent quarante est encore plus décourageant parce que définitif.

En dehors de la mine increusable, l'opus magnum du bataillon est une route sur les bords de la Guisane, à cinq minutes de la caserne. Elle offre la particularité de ne mener nulle part et d'être de toute manière remarquablement superflue, puisqu'un chemin carrossable court sur l'autre rive que l'on atteint par un pont, à quelques pas de là. Depuis le début de la guerre, on a bien ouvert deux cents mètres de la route. On a entamé pour cela le bas d'une croupe spongieuse et croulante. On y pratique d'effarantes sapes. Le tout menace ruine un peu plus chaque matin, et il est miraculeux que l'on n'ait point encore retrouvé la montagne, la route, les sapes et quelques douzaines de pionniers au fond de la rivière. Mais nos hommes l'ont si bien compris qu'un coup de pioche est devenu un événement dans leur équipe.

Pour le reste, on vaque à la garde de quelques mystérieux petits postes et au train-train de notre subsistance. Les cuistots mis à part, et trois ou quatre scribes, si les cinq cents hommes du bataillon fournissent deux cents heures de travail effectif par jour c'est assurément un record.

J'oubliais les musiciens ! Le commandant Boudier est un amateur fanatique de pas redoublés. Il a constitué une musique d'au moins quarante instruments. Sur les airs de Sidi Brahim, de Pan Pan l'arbi, du Boudin de la Légion, elle souffle et bat à longueur de journées l'épopée du Cinq-Quatre cent quarante. Le commandant qui gagne son bureau s'arrête sous la fenêtre où les cuivres mugissent, et le poing sur la hanche, la moustache bravant le ciel, sourit orgueilleusement au rêve qui passe, comme dans le chromo de Détaille.

L'énorme quadrilatère des casernes, outre notre bataillon, est rempli par des lambeaux d'unités disparates. Vingt quatre trompettes d'artillerie logent en dessous de nous, énormes gars de vingt-deux ans, mieux planqués que dans un îlot de la Polynésie. En face, ce sont les innombrables muletiers d'un bataillon de forteresse, presque tous des conscrits, les résidus de deux bataillons de chasseurs, d'un régiment régional, de l'autre côté de la rue je ne sais plus quelle compagnie hors rang. Tout ce monde vit les mains dans les poches, passant dix heures à étriller un mulet, à récolter pour M. Reynaud deux douzaines de boites de conserves qui forgeront “l'acier victorieux”, à scier une brouette de bois pour les cuisines.

Pour armes, chez nous, aux pionniers, nous possédons théoriquement une brassée de flingots et de mousquetons de tous âges, avec lesquels nous risquerions sans doute de nous faire mal puisqu'on les tient sous verrous aux magasins. Cet arsenal est complété par deux fusils-mitrailleurs 1916 hors d'usage.

La besogne essentielle est devenue la cueillette des pissenlits. Des compagnies entières s'égaillent à travers champs, de midi au crépuscule. Avec des anchois et des oeufs durs, on confectionne des salades pantagruéliques. On voit sur tous les chemins des kyrielles de mitrailleurs, de sapeurs, d'artilleurs, de tringlots aux besaces gonflées de verdure. Toute l'armée des Alpes est mobilisée pour le ramassage des pissenlits.

Enfin, pour se remettre de ces labeurs, on boit, en chambrée, aux cuisines, au mess des sous-officiers, où l'on débarque les caisses d'apéritifs par pleins camions, au chalet, aux bistrots de la gare, de la route des sanas, de la Gargouille, de la Citadelle. L'obsession du pinard nous a poursuivis. Nous redescendons maintenant chaque midi de la mine avec notre plein de vin blanc. J'ai bientôt fait connaissance avec les plus illustres poivrots. Leurs exploits composent une geste inlassablement chantée. Les licheurs de pernod romanais étaient des raffinés auprès de ces rustres haut-alpins qui puent perpétuellement la cuve à quinze pas. Le planton du bureau est mûr tous les matins à huit heures, et il n'est pas le seul. Le corps de garde au complet s'est saoulé avant-hier à rouler par terre. Dans ma section, le distingué Chiron n'a pas désempli depuis dix jours. Entre autres fantaisies, ce gentleman, quand il est de chambre, compisse en zigzags le plancher avant de s'armer du balai.

L'exemple, il est vrai, vient de haut. Nos propres officiers, et les commandants, les capitaines des troupes de forteresse ont été sans doute d'admirables soldats au cours de l'autre guerre. Ils l'ont tous faite dans les divisions alpines, aux chasseurs, au Quinze-Neuf, au Cent Quarante, et les initiés savent ce que cela veut dire. Mais aujourd'hui, la cinquantaine approchant ou dépassée, ils considèrent que cette nouvelle campagne est pour eux comme un temps de vacances. Il y a bien assez de cadets pour la gagner, puisque les casernes en sont remplies. A eux la grande liesse militaire. C'est leur tour.

Il se peut. Mais il existe certainement des spectacles plus édifiants que celui de ces vétérans dont certains doivent être grands-pères, qui courent les femmes de leurs sous-officiers, voire les pucelles briançonnaises, frottent dans les dancings, devant un parterre de soldats, leurs bedaines aux nombrils des gaupes platinées, se font claquer en public par des demoiselles dégoûtées ou honnêtes, arpentent en battant les murs les rues de notre ville.

Une des compagnies de notre bataillon est commandée par un minuscule basset de capitaine, ancien héros d'un bataillon de chasseurs, qui se présente ainsi : “Un mètre cinquante quatre, sept citations, trois blessures”. Il ne craint point de s’exhiber chaque soir à la Chaumière, la boite en vogue de Briançon, gambillant une espèce de polka d'ours de son cru, aux bras d'une monumentale moukère dont sa tête atteint les nichons, tandis que son ami B... siffle le champagne entre deux filles. Les deux compères, l'autre jour, sont arrivés au quartier, saouls à tomber. Afin que nul n'en ignorât, ils ont éprouvé dans cet état le besoin de passer la garde en revue, ils ont tangué pendant une demi-heure au travers de la cour, en s'insultant, s'embrassant, se bourrant les côtes et les épaules, sous les yeux de cent poilus ravis qui se pressaient aux fenêtres.

Un seul des officiers que je connaisse fait exception à cet affaissement. C'est notre capitaine de Bardonnèche. Les troupiers qui nous ont chanté sa louange sont bons juges. Ce n'est point que j'éprouve un bien vif penchant pour ce maître d'école qui s'est poussé dans les eaux du régime. Il y a chez lui du Homais retouché selon le style Blum. Il se fait des nationalistes un puéril épouvantail. Je reste ébahi de la grossièreté et de la confusion des idées, chez cet homme qui a fait une véritable carrière en politique et que tout un canton consulte et admire comme une lumière de sagesse. Il se déclare respectueux de toutes les convictions, apparemment pour innocenter les communistes, mais voue sans distinction toute la droite au poteau. La vertu de conviction ne saurait probablement exister pour lui sans la foi dans les immortels principes.

- Alors Rebatet, me crie-t-il, venez donc me parler un peu de votre Maurras, ce salaud qui insulte les gens dans leur vie privée.

Ou encore : “Ça doit vous plaire, l'hitlérisme, à vous qui êtes de l'Action Française ?” Impossible de lui expliquer que l'Action Française est au contraire d'une germanophobie aveugle et maniaque et que j'y fais justement figure d'hérétique. Pour de Bardonnèche, je suis à la fois un traître munichois et un affreux belliciste. Voilà l'un des hommes choisis pour former la tête des enfants et qui pourrait devenir à la Chambre un des arbitres de nos destinées.

Mais le capitaine de Bardonnèche est ici le seul officier que l'on voie sur les chantiers. En dépit de sa légion d'honneur et de ses citations, il est antimilitariste. Il a fait toute l'autre guerre au 52e d'infanterie, avec bravoure, mais dans des sentiments que je comprends d'ailleurs bien. “Les poilus ont été des héros et des martyrs sublimes, dit-il. Leurs chefs étaient des imbéciles, les généraux des ganaches et des assassins”. Il affirme cela devant n'importe quel troupier, et sans doute il a tort. Mais il est sobre. Il est à sa tâche de sept heures du matin à sept heures du soir beaucoup moins parmi les paperasses qu'il lit ou signe d'un trait que la pèlerine sur le dos, les godillots aux pieds, courant par monts et par vaux dans la boue et la pluie, visitant les travailleurs, si l'on peut dire, et les postes écartés de sa compagnie. Il comble évidemment de faveurs ses électeurs de Largentière. Mais il veille à la santé, au moral et au ravitaillement de tous. Il sait tempêter auprès des fossiles et des trafiquants de l'intendance pour avoir toute la ration de tabac de ses hommes. Il inspecte chaque jour les cuisines. Je n'ignore pas les tares et les responsabilités des instituteurs. Je déteste leur sectarisme, leur obtuse vanité. Mais de toute la campagne, je ne connaîtrai que trois hommes qui fassent consciencieusement leur métier d'officiers de troupe. L’un d’eux est l'instituteur de Bardonnèche, les autres deux de nos aspirants de Romans, instituteurs eux aussi. Ces antimilitaristes auront été des soldats plus honnêtes et plus utiles que les officiers bourgeois, croix de feu et déroulédiens.

J'ai tout loisir d'étudier le capitaine de Bardonnèche. Après quelques semaines à la mine et au sciage du bois, il m'a embauché dans le bureau de sa compagnie. Le travail n'y est pas mince. Avec la gamme infinie des hautes paies, des indemnités, les barèmes des calculs militaires sont arrivés au chef- d'oeuvre de la chinoiserie. La solde journalière de chaque homme, ou peut s'en faut, accuse sur les autres une différence de 0 fr. 374 ou de 0 fr. 843. Ajoutez-y le remue-ménage constant des permissionnaires, des malades, des subsistants, des détachés. Le prêt est un casse-tête désespérant. Le bon sergent-chef

Crozier, si méticuleux et ordonné, qui gère dans le civil toute la comptabilité d'une grande firme cinématographique, le sergent Brochier, instituteur rompu à l'arithmétique, le caporal Chovin, agent d'assurances à Valence, n'en arrivent pas à bout après six jours pleins de labeur acharné, de reports inextricables, d'additions horizontales, verticales, sur des centaines de colonnes, de vérifications hallucinantes où l'on trouve toujours à la première fois 9 fr. 43 en trop, à la seconde 17 fr. 27 en moins. Tout cela pour allonger royalement aux hommes seize ou dix-sept sous en moyenne par jour.

J'apporte à ces calculateurs éperdus mon concours qui est faible et risque d'embrouiller à jamais leurs centimes. Mon domaine est surtout celui des fiches. Je range toute la compagnie sur des bouts de carton. J'ai la libre disposition des livrets matricules, auquel est épinglé le fameux devoir réglementaire que les conscrits exécutent en arrivant au corps. C'est un beau coup d'oeil sur la science du peuple français. Les trois quarts des hommes présents ici étaient à vingt ans pratiquement illettrés incapables d'écrire vingt mots qui se pussent déchiffrer. Et leurs connaissances de notre pays ! “Richelieu était un grand général qui a vécu au temps des rois. La Seine arrose Paris, Nantes et Toulouse”. Le bilan est joli pour l'école gratuite, laïque et obligatoire. Quels progrès depuis ces pauvres diables ont-ils accomplis ? Ils ont appris à lire l'Humanité et Paris-Soir. On songe à ce que peuvent bien représenter ces imprimés dans leurs cervelles. Oui, mieux vaudrait cent fois un peuple franchement et complètement analphabète.

Je fais aussi, chemin faisant, de curieuses statistiques. Nous avons au moins vingt-cinq hommes sur cent cinquante qui, entre les jours d'infirmerie et d'hôpital, les permissions de convalescence, de détente, de semailles, les permissions exceptionnelles, n'ont pas en sept mois accompli trente jours de service effectif au bataillon. La moitié de la compagnie compte à peine cent jours de présence. De deux choses l'une : ou bien l'on a réellement besoin de tous les mobilisés, et alors c'est une gabegie infâme, le sabotage démagogique de l'armée ; ou bien l'on n'en a pas besoin, et il est criminel de disloquer et de paralyser la nation.

Ce vieux fou de Churchill supplante presque entièrement le Révérend Chamberlain. Les furibonds du bellicisme deviennent les maîtres. Pourtant, le ministère Reynaud file un mauvais coton. A vue d'oeil, on ne lui donne pas trois semaines de vie.

Le pluvieux Chamberlain a fait savoir que le blocus de l'Allemagne ne donnait point les résultats escomptés, et qu'il fallait inaugurer une nouvelle politique de guerre économique. Cela ressemble étrangement la N. E. P. de Lénine, à la pause de Blum, aux aveux de tous les échecs dont ces théoriciens de l'impossible ont été prodigues. Nous avions donc raison pour la vanité du blocus comme pour le reste. Il est bien démontré maintenant que l'Angleterre a essayé de fermer depuis sept mois les ports de l'Allemagne tout en prétendant continuer ses négoces, et que le Reich se ravitaille à sa barbe par les trous qu'elle tolère ainsi. Quant au resserrement du blocus, pour accomplir cette grande oeuvre, ô gloire, ô espoir, nous avons, on l'a vu, désigné pour notre part l'idiot du village, Georges Monnet.

On peut bien s'esclaffer en apprenant que ces messieurs se sont réunis à Londres dans un grand conseil interallié pour “rechercher les moyens d'intensifier la guerre”. Peut-on mieux confesser qu'on ne sait, comme je l'ai tant rabâché, où entamer décemment cette guerre ? Avoir voulu si frénétiquement le conflit, le tenir enfin, et au huitième mois de la grande croisade, en être encore réduit à la quête d'un champ de bataille !

Mais voici un très gros pétard. En grande pompe, les Alliés annoncent que leur patience est à bout, et qu'ils ont “décidé d'interdire à la navigation allemande l'usage des eaux territoriales norvégiennes”. On apprend en même temps que des mines viennent d'être mouillées dans le Skagerak et le Kattégat.

C'est encore un faux-semblant, une mesure accessoire, les seules qui soient en notre pouvoir et que l'on veut nous faire prendre pour l'essentiel.

En l’honneur de l'opération, les fanfares anglaises et françaises attaquent le morceau des grandes offensives. Mais le premier coup de cymbale vibre encore que la riposte allemande arrive foudroyante. Elle n’a pas mis vingt-quatre heures. Nous sommes le 9 avril. En une matinée, le Danemark est occupé. Dans la journée, on apprend que la Wehrmacht est à Oslo, à Stavanger, à Bergen, à Trondhjem, à Narvik que l'on va chercher, effaré, tout en haut de la carte, au delà du cercle polaire. C'est ahurissant. Mais c'est fort simple aussi. Il a suffi que les démocraties interdisent l'accès des eaux norvégiennes à l'Allemagne, pour que la croix gammée y flottât aussitôt comme chez elle. L'audace et la rapidité de l'ennemi sont éblouissantes : comme pour la Rhénanie, comme pour Vienne, pour Prague, pour Varsovie, comme partout. Ah ! Je ne me suis point trompé. C'est bien là qu'est la force et l'esprit. Comment pourrait-on s'empêcher d'admirer ces Siegfrieds qui surgissent au milieu des éclairs, bousculant les porte-parapluies, les outres à whisky, et les petits bazardiers de Londres et de Paris ?

La radio est en branle comme une cloche de sacre. On flétrit l'attentat, comme si on ne l'avait point provoqué, on acclame la Norvège que la veille on sommait par un ultimatum. La célérité de Hitler est la preuve de son affolement et du coup terrible que l'on vient de porter à l'Allemagne. L'homme à la gabardine, comme dit l'académicien Mauriac dans un de ses prêches-mélos, se rue en désespéré contre la porte de bronze qui s'est fermée sur lui.

Mais cela devient plus sérieux. La Home Fleet appareille, les escadres françaises cinglent vers le Nord. Ah ! Ah ! les démocraties cette fois n'ont pas été prises sans vert. Cette fois, au tonnerre hitlérien, le tonnerre du Droit répondra.

Une grande effervescence règne dans notre caserne. On guette par sections entières, devant la grille du quartier, les marchands de journaux qui arrivent sous des faix de papier et sont dévalisés en un instant. Des grappes de poilus s'amassent à la cantine autour de la radio. Je n'aime point cela. Voilà donc pourquoi les feuilles l'autre matin annonçaient en manchettes prodigieuses : “Mr Churchill devient le principal animateur de la guerre”. On reconnaît la marque du vieil apoplectique, de l'agité des Dardanelles dans cette équipée polaire. Mais cet animal-là va-t-il déclencher la vraie guerre ? La guerre infaisable, si exaspérante fût-elle, avait du bon. Elle désagrégeait les ministères, elle était en train de démontrer jour après jour l'impuissance de tous ces ânes. Mais ils ont trouvé le moyen de mettre la marine en danse. Sans conteste, c'est notre fort. Nous sommes dans le cas de remporter un succès à grand spectacle. Je sais trop bien qu'il ne peut rien résoudre. Ce ne sont pas les super-croiseurs qui, montés sur roues, perceront la ligne Siegfried. Le rôle de la marine m'est plus suspect que jamais, parce que c'est l'instrument de ces soliveaux d'Anglais. Mais avec les bonimenteurs que nous possédons, on va mener un vacarme incroyable autour d'un combat naval convenablement réussi. Et du coup cet infâme Reynaud va surnager. Cette odyssée meurtrière est montée comme une diversion dans la plus pure tactique parlementaire, pour repêcher un cabinet en train de sombrer.

Les manchettes de plus en plus pharamineuses annoncent qu'une gigantesque bataille est engagée sur mer. Je reconnais sans peine dans cette flamboyante typographie le style des “hot news”. Le Prouvost et le Lazareff de Paris-Soir lancent la bataille Reynaud selon les méthodes éprouvées des décerveleurs new-yorkais, comme le dernier film de Garbo ou le meurtre de la femme à barbe. Les poilus s'arrachent ce colossal feuilleton.

On va de triomphe en triomphe. Tous les détroits danois sont minés. Hitler a stupidement jeté ses troupes dans une souricière dont la trappe est tombée. Les corps expéditionnaires anglais et français s'embarquent pour aller les cueillir. La grande bataille navale se développe formidablement. On commence le compte des navires allemands coulés. Il s'enfle d'heure en heure. Les totaux défient tout examen. Ce n'est pas possible, on doit additionner deux et trois fois les chiffres de la même dépêche.

  1. Paul Reynaud va parler à la radio. La voix arrogante et grinçante s'élève. Victoire ! Victoire ! “La route permanente du minerai de fer suédois vers l'Allemagne est et restera coupée ”.

Qu'est-ce encore que cette charlatanerie ? La prise de Narvik pouvait être inquiétante pour le Reich sept mois plus tôt. Mais nous sommes au printemps. Le golfe de Botnie est libre de glaces et la Suède reste neutre. On ne va pas nous faire croire que les Allemands seront incapables d'organiser le transport du minerai par cette voie. On les prive tout au plus d'une commodité. Se figure-t-on que les aciéries de l'Allemagne en guerre vont chômer pour cela ?

Mais la Chambre debout acclame M. Reynaud. C'était prévu. La marine a renfloué le ministère.

Il faut croire que l'Armada démocratique n'avait levé l'ancre que pour ce triomphe-là. Car aussitôt, elle se volatilise. On se rue aux nouvelles de la gigantesque bataille navale. Mais elle s'est déjà perdue dans le brouillard.

Les “Te Deum” n'en continuent pas moins. Leur fracas compense leur majestueuse imprécision.

Les escadres ayant mystérieusement regagné la coulisse, la vedette est maintenant au corps expéditionnaire, dont on vient de saluer avec de triples hourrahs le joyeux débarquement sur les côtes norvégiennes.

Le docte Thierry Maulnier écrit, dans Je Suis Partout hélas ! où Alain Laubreaux ne peut remplir toutes les colonnes :

“La mer du Nord est à la Grande-Bretagne. Les Allemands pourront-ils renforcer et ravitailler les quelques détachements qu'ils ont peut-être réussi à débarquer dans les régions de Trondhjeim et de Bergen ? Ils ne continueront à disposer, pour leurs communications avec la Norvège que des deux bras de mer du Kattegat et du Skagerrak, mais ils ne peuvent communiquer ainsi qu'avec l'extrême-sud de la Norvège et la région d'Oslo. La région de Narvik et des minerais de fer suédois leur reste pratiquement inaccessible aussi bien par la mer, où règne la flotte anglaise, que par terre, où manquent les voies de communications. Les Alliés peuvent attaquer et détruire en Mer du Nord les unités navales allemandes, débarquer a leur gré des troupes en Norvège, occuper quand ils le voudront la région de Narvik”.

Les grands chroniqueurs de notre invincibilité accommodent ces splendides raisons à toutes les sauces de l'épithète, de la morale et de la géographie. Mais les poilus, maintenant, gardent tranquillement dans leur poche les dix sous de

Paris-Soir. Ils ne sauraient sans doute pas expliquer que nous voilà lancés dans une campagne pénible et pleine d'aléas, au diable vert de nos bases, quand l'ennemi assure les siennes solidement, et que Reynaud vient de se livrer à un scandaleux chantage. Mais dans leur simple sagesse, ils le comprennent beaucoup mieux que les académiciens de Paris. Ils devinent qu'on leur a encore menti, que l'aventure fait obscurément long feu, et que le seul bilan d'une vraie victoire, c’est celui des Fritz qui ont conquis le Danemark, et la moitié de la Norvège.

Les deux grandes flottes sont l'orgueil des démocraties d'Occident. On les a comptées mille fois comme le plus irrésistible atout de la victoire. Elles ont opéré une sortie sensationnelle, telle qu'on n'aurait osé l'espérer. Le résultat est nul. On apprend peu à peu que les bateaux à un milliard l'unité se sont pompeusement retirés après avoir coulé quelques destroyers. Notre maîtrise de la mer est matière d'évangile. Mais en dépit de cette maîtrise indiscutée, on est contraint d'avouer que les Allemands de Norvège se renforcent par bateaux à leur guise, tandis que c'est notre corps expéditionnaire qui pâtit, isolé, sans ravitaillement et inférieur en nombre.

Les communiqués se font modestes. Bref, nous reculons sur toute la ligne. Les rats hitlériens sont en train de nous fourrer dans la nasse où on devait si promptement les cuire. Allons ! tout se déroule régulièrement. La guerre reste fidèle à ses origines.

J'admire encore que les russomanes de Londres et de Paris aient soigneusement laissé, pour leur équipée nordique, s'écouler tout l'hiver où les Finlandais se sont si bien battus, où cette entreprise aurait eu un sens profond, politiquement, économiquement, où ils auraient trouvé un allié à pied d'oeuvre. Ils ont attendu que cet allié soit écrasé, qu'il ne pût plus être question de faire aux bolcheviks la moindre éraflure, pour s'élancer à l'aveuglette.

Mais ce scénario me passionne de moins en moins. La sottise monotone de chaque péripétie émousse ma curiosité quant à l'épilogue. Je retrouve la sereine indifférence du militaire, et cette fois je m'y enfonce bien. Mes amis du bureau sont des garçons délicieux, des modèles de philosophie. J'ai toutes les faveurs des seigneurs de la cuisine. Je me demande comment on peut s'embarrasser de mobilier, de vaisselle, quand une gamelle et une botte de paille fraîche subviennent si parfaitement à tous nos besoins.

Il fait beau et je suis dans les Alpes de mon Dauphiné, les montagnes que sans doute je préférerai toujours. On n'y entend point le cor d'Obéron, comme dans les forêts et sur les lacs à fées du Salzkammergut. Leur romantisme est abrupt, hautain, quelquefois écrasant. Elles sont assez belles, à leur manière farouche et magnifiquement plastique, pour se passer d'être accueillantes. Leur variété est infinie. Sur ce versant, ce sont les mélèzes noirs, les cascades, les glaciers, le Canada, la Norvège. Tournez la tête, sur l'autre versant, voici le roc dénudé, doré, veiné de rouge, avec un pin tordu qui écarte ses branches sur un fond d'azur éblouissant. C'est le midi dont d'accent chante déjà au fond de la vallée.

Je suis allé au Mont-Genèvre. Il est libre pour les touristes. Le petit village fourmille de skieuses parisiennes, ravissantes et pépiantes. Les jeunes officiers du secteur sont chargés de représenter l'élégance mâle avec leurs windjacks blancs, et font des ronds de jambes aux terrasses des hôtelleries, où l'on prend le bain de soleil devant la dernière neige.

Parmi ces mondanités et ces coquetteries, l'armée a installé ses odeurs de graisse d'armes, de rata, de vieux cuir et d'écurie qui se mélangent au sillage des femmes fardées.

Les chasseurs tiennent ce secteur avancé et mondain. Non point les pimpants “diables bleus” défilant sur la Promenade des Anglais les jours de bataille de fleurs, mais de rustiques chasse-pattes auvergnats, effrangés et terreux. Les corvées de quartier se déroulent imperturbablement au milieu des cabriolets de sport, des jolies filles animées par le vent et de deux ou trois vieilles anglo-saxonnes excentriques. Les treillis boueux voisinent avec les beaux pantalons fuseaux, les chandails multicolores, les foulards à fleurs et les boucles blondes. Dans quelque soupente fumeuse, imperméable à l'air le plus tonique de France, un sergent-chef comptable et ses scribes jaunissent sur les rébus des situations administratives.

Le poste frontière est installé à deux cents mètres de la douane, dans un chalet décrépit. Sur le balcon, à la place où il y avait naguère les sabots du montagnard, un fusil-mitrailleur est pointé. Un autre dans un jardin, fiché sur un piquet, regarde le ciel, D. C. A. réglementaire et candide.

Cette maison jaune, à portée de mousqueton, c'est la douane italienne. Mais le chasseur mal rasé, qui monte la garde entre deux chevaux de frise, sous le mât du pavillon tricolore, médite peu sur son éminente fonction de dernier soldat de la terre française. Il est même assez copieusement saoul.

Je sais, par les rapports journaliers de la place, que sur ces lignes de crêtes et sur ces passes, les patrouilles italiennes et françaises fraternisent continuellement. Officiers de chasseurs et officiers d' “Alpini” s'invitent à tour de rôle dans leurs postes : “Relations extrêmement cordiales”, disent les comptes rendus. Les troupiers ont un tarif pour l'échange du pernod et du véritable vermouth de Turin.

Nous sommes aujourd'hui au 15 avril 1940. Comme la guerre est loin d'ici !

Encore un cheval de crevé. On a éprouvé le besoin de fournir toute une cavalerie à nos officiers, à ceux du parc d'artillerie et du génie. Il n'est pas un de ces quinquagénaires qui ait jamais mis le pied dans un étrier, et les chevaux trépassent un par un d'inaction. Les mulets les imitent, tandis que les paysans dont les écuries ont été vidées par les réquisitions implorent en vain qu'on leur prête quelques bêtes.

Voilà la demi-brigade de chasseurs, le Neuf-Un par devant, le Huit-Six au milieu, le Neuf-Cinq par derrière. Les cors soufflent à pleins pavillons. Mais les hommes, en troupeau, ne marquent même plus le pas. Si nous moisissons sur place, les chasseurs, hâves, boitant, déteints, sont en train de s'en aller par morceaux sur les routes. L'état-major du secteur fortifié rattrape sur eux l'immobilité de ses autres troupes. De Barcelonnette au Lautaret, de Gap au Genèvre, ils sont à leur huitième mois d'un manège perpétuel et mystérieux, un bataillon chassant l'autre devant lui dès qu'il croyait avoir touché le port.

Mais c'est la dernière fois que je verrai les chasseurs reparaître, toujours un peu plus éreintés et délavés, comme les ministres dans les chevaux de bois de la République. Des personnages parisiens ont estimé que je ne pouvais décemment demeurer pionnier de seconde classe. Ils m'ont découvert un emploi plus adéquat à mes dons, au S. R. s'il vous plait, au 5e bureau, frère jumeau du 2e. Le 5e bureau recueille les renseignements, le 2e les exploite.

Je n'ai manifesté qu'un médiocre enthousiasme. La conjugaison des bureaucraties militaire et parisienne me répugne au plus haut chef. Je préférerais aussi ne rien devoir aux personnages en question, avec qui je n'ai plus l'ombre d'un sentiment commun. Avouons enfin ce petit ridicule : J'ai malgré tout un peu plus l'air d'un soldat sur la paille alpine que devant une écritoire des Invalides. Mais un des officiers du S. R., le capitaine V... que j'ai rencontré naguère à la table d'un de ses parents, me propose une mission amusante. Il s'agirait de converser deux ou trois fois par semaine, dans le Simplon Orient, avec quelques voyageurs choisis arrivant du sud-est européen. Dans l'armée, on appelle cela “contacter”. Le “contacteur” du Simplon est un jeune capitaine d'artillerie, mathématicien émérite, mais si maladroit et gauche qu'il n'a pas lié deux conversations en trois mois. On a eu l'idée, militairement exceptionnelle, de confier cette besogne à un journaliste, opérant en complet veston.

Ma foi ! pourquoi ne serais-je pas ce journaliste ? Je n'aurai jamais d'autre occasion d'exercer ce métier curieux de demi-espion. Il est bon de secouer l'engourdissement qui me gagne, dans ce bataillon de pionniers en chômage, parmi les cueilleurs de pissenlits et les rabâchages d'ivrognes. Hors des corps francs, où je n'irai jamais, il m’est indifférent de faire cette guerre n'importe où. On n'est pas plus embusqué dans le septième arrondissement qu'à Metz ou Briançon. Je me suis laissé tenter. Ma mutation vient d'arriver. Je vais faire une escale obligatoire au fatidique G. U. P de Romans. Il est presque vide, plus lugubre et sordide que jamais. Mais les honorables rempilés et Saint-Cyriens du “noyau” sont toujours bien accrochés à leur poste. Bouboule est encore là, ainsi que mon ex-capitaine, qui ne comprend pas un mot à mon cas, subodore des irrégularités épouvantables, me colle un numéro matricule et m'enjoint d'aller faire l'exercice séance tenante. Si le lieu était de mon goût, je pourrais certainement y finir la guerre.

Après des pérégrinations désespérées, je me décide à rédiger moi-même mes paperasses. Je découvre un trificellidé assez audacieux pour les signer et, le 25 avril, je m'embarque pour Paris.


 

 

 

 


IV

CEUX DU S. R.

 

[1] faut dire que le G. U. P. est une vraie passoire, et que le fascicule bleu file par tous ses trous. Cinq ou six ingénus, dont je suis, se sont enquis bonnement : “Où est-ce qu'on nous déguise ?” Mais tous les autres s'esclaffent : “T'es si pressé que ça de te mettre en pierrot ?” Du reste, le garde-mago, mon

[2] est dommage que l'armée ait remercié le lieutenant Barnarat de ses bons services, au lieu de l'adjoindre par exemple à l'état-major de notre intrépide G. U. P. Mis à part son tempérament, d'un acier incorruptible, il en serait le vivant fanion, le digne symbole,

A la vérité, ce sujet est plutôt navrant. J'ai voulu croire à des accidents, à l'honorable tradition du pinard, roi des guerres françaises. Les dieux savent que personne ne rechigne moins que moi au piot lorsqu'il est de franche cuvée. Une pocharderie harmonieuse, deux ou trois fois l'an, me semblera toujours un convenable moyen d'éclairer l'existence et de se rafraîchir la tête. Le cher romanais Vossier a compensé mes brouets militaires par quelques frairies de saucissons en croûte et de poulardes à la crème, où le liquide valait le solide, ce qui n’est pas peu dire. J'aime que le bon curé Rousset ne soit en rien abstème. J'ai blagué volontiers mon ami Georges Blond, qui se voue aux inquiétantes chimies des jus de fruits, de ses campagnes vengeresses contre le pastis. Il faut croire que je vivais réellement fort loin de l'haleine populaire de la France. Hélas ! je la connais maintenant.

Le vin, avec sa séquelle, est devenu chez nous le grand fléau de la guerre. On comprend trop vite qu'il était déjà un des fléaux de la paix. Mais notre vie croupie l'a étendu et aggravé d'incroyable façon. L'espoir du litre ou du verre est décidément l'unique ressort capable de redresser ce bataillon d'affalés.

 

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III

ALPEJSKIE

ROZDZIAŁ XIV

FIRMA PRZEJAZD

Nie miałem prawa do pożegnań na Gare de l'Est, które zawsze są bardzo bohaterskie i dramatyczne, nawet gdy jedziemy do regionalnego batalionu w Meaux. Poszedłem na wojnę przez Gare de Lyon, nocą i bez najmniejszego rozmachu.

Nad Paryżem wiał czarny dwudziestostopniowy mróz. W bystrze okrytym lodem zgromadziło się kilkaset zmobilizowanych osób: dwa wozy marokańskich Berberów, autentycznych synów Proroka, w turbanach, pantoflach i pasiastych gandourach, przeciwstawiając się niewzruszonemu fatalizmowi tajemnic swojej podróży i mrozowi, Czesi w każdym wieku, jednakowo pijani na śmierć i nieustannie wykrzykujący złowrogie pieśni, Słowacy niewiele mniej pijani i bardzo bojący się obecności czeskich oficerów, oddziału Polaków i włoskich masonów. Było nas tylko dwóch Francuzów, drugi w mundurze, a nawet czynnej służbie, łowca czołgów z Wersalu, który w sierpniu strzegł jeńców hiszpańskich na południu, gdyż zaginął przez swoją kompanię, odrzucony przez wszystkie urzędy, błąkając się swobodnie po kraju i sąsiedni dziedziniec, krótko mówiąc sytuacja bardzo przyjemna, z wyjątkiem tytoniu.

Nie, nigdy nie wyobrażałem sobie takiego odejścia.

Groźny mistral, gromadzący na swojej drodze ogromne bloki lodu, pędzi po porannym niebie. Jestem w Rzymianach, wyznaczonym miejscu moich pierwszych wyczynów. Nie sanitariusz na stacji. To u operatora latarni zapytałem o drogę do jakichś baraków.

Chciałbym wiedzieć, który oddział mnie powita. Uczenie mnie tego nie zajmuje pierwszym futrzanym ludziom, których spotykam. Mają beret i numer piechoty alpejskiej. Jest to 159, Quinze-Neuf z Briançon, w którym znajduje się tutaj swój skład wojenny. Jest to pułk, który ma swoje listy szlacheckie. Tym lepiej. Przynajmniej będę nosić błyszczącą odznakę. Esprit de corps już mnie ekscytuje.

Po długich objazdach docieram do brzegu rzeki Isère, która niesie prawdziwe kry lodowe. W subtelnej mgle, która niczym chusteczka przeszywa moje dwa swetry i kurtkę narciarską, skulone postacie poruszają się boleśnie, podnosząc kawałki drewna niezdarnymi i statecznymi gestami wiejskich starszych kobiet. Z bliska, pomiędzy kominiarką a gigantycznym regulacyjnym beretem, szerokim jak koło samochodowe, pojawiają się fragmenty fioletowawych i kudłatych twarzy, zaczynające zamarzać nosy, zaciekłe dziesięciodniowe brody, potem bezkształtne krokiety, ziemiste kaptury, w których widnieją długie kosmyki zawiesić słomę. Przed chwilą byłem w sercu małego, bogatego miasteczka, z zadbanymi i dobrze zaopatrzonymi witrynami sklepowymi, ładnymi ciemnowłosymi dziewczynami z wdziękiem truchtującymi w ubraniach z kapturem. Wystarczy przejść się wzdłuż kantonu, aby znaleźć się w innym świecie, równie podstawowym jak świat Eskimosów.

Troglodyci zwracają się do mnie z wielką życzliwością.

- Jesteś niebieski? Głupotą jest przyjazd w sobotę rano. Nadal mogłeś sobie pozwolić na tydzień angielskiego. Wreszcie ! Będziesz musiał iść do GUP.Tutaj to nie to samo. To są baraki. W dzisiejszych czasach to nie jest śmieszne. Reszta z nas ma łóżka. Jesteśmy całkiem zrelaksowani.

Minęło całe dwanaście lat, odkąd ostatni raz nosiłem mundur. Odsuwam się na chwilę od brudnych rzeczy, które napotkaliśmy. Oczywiście obrona Francji nadal może obejść się bez mojego wzmocnienia. Ale co robić w tym mieście, w którym nikogo nie znam, w tym nieludzkim zimnie? Równie dobrze możesz od razu podjąć decyzję. W obliczu braku jakichkolwiek informacji i instrukcji pozwalam przemówić staremu instynktowi piechoty, który pojawia się wraz z zapachami wydobywającymi się z drzwi lub na wpół otwartego okna. Widzę napis: Kuchnia CHR Z pewnością jest to miejsce chętnie wybierane przez bezdomnych, wciąż balansujących pomiędzy statusem cywila a żołnierza.

Kuchnia zajmuje coś w rodzaju tunelu, w którym brudna woda tworzy potężne lodowisko, w którym świst i krzyżuje się kilkanaście prądów powietrza. W tle bulgocze wycofany wóz i kocioł dla świń, otoczone przejmującym dymem. Z gryzących chmur wyłaniają się kucharze, niczym kominiarze, którzy wpadli do dołu ze tłuszczem.

Od razu rozumiem, że przybywam w środku doniosłego wydarzenia. Zespół rzeczywiście skończył robić ogromną kiszoną kapustę. Kaprale, sierżanci, sekretarze, strażnicy sklepów przychodzą co chwilę, aby zapytać o jego stan, poważnie zasmakować końca widelca. Szef kuchni, który ma dwadzieścia pięć, dwadzieścia sześć lat, ubolewa nad brakiem wędzonych kiełbasek do boczku. Wzywa mnie na świadka: „Wiesz! Zrób w tym bałaganie kiszoną kapustę! Jak mnie widzisz, takiego obrzydliwego, to ja grillowałem w sali w Ledoyen, na oczach klienta, w białym toczku”.

Proponuję grupie aperitif: „No dobrze, idziemy napić się do Zizou, a potem, jeśli masz ochotę, zapraszamy Cię na zjedzenie z nami kiszonej kapusty”.

U Zizou jest to wąski i obskurny kaboulot, w którym rozmnaża się duża i ponura rodzina. Po wypiciu pastis wracamy do naszej jaskini. Zbliżają się pierwsze stoły żołnierzy, poruszających guzikami. Na oczach zastępu szef kuchni zgodnie z oczekiwaniami odzyskuje świadomość swoich wysokich funkcji, rozkazuje, decyduje z autorytetem. Służba temu tłumowi nie jest małą sprawą. A wszyscy mężczyźni w kuchni poszli wczoraj spać dwie godziny po wszystkich innych, aby odpowiednio zblanszować kiszoną kapustę, wstając na godzinę przed przebudzeniem. Pracują po trzynaście, czternaście godzin dziennie w nieludzkich warunkach, w chłodzie i brudzie, przy użyciu romańskiego sprzętu. Ale pozostają radośni i pełni życia. Śpiewają w brzęku naczyń, ze zwęglonymi i brodatymi twarzami:

Ach! moje serce musi kochać!

A mimochodem po mistrzowsku klepniemy po pośladkach Kazimierza, niezbędnego czterdziestokilogramowego karła, którego nie omieszkamy odkryć w zakamarkach i zagłębieniach koszar, którego żaden major nigdy się nie zreformuje; Casimir z Vaison-la-Romaine, mrużąc oczy obydwoma oczami, podskakując na nogach basseta, w mundurze, który musiał przeszukać wszystkie miski batalionu, w każdej chwili groził wrzuceniem przez lej spodni do kotła, ale który zawsze ucieka, zabawny i darmozjad.

Nagle następuje dramat, tak klasyczny, jak tylko Casimir może być.

  • Na litość boską! niebieskie nie dały spokoju!

Przywódca podskoczył z tragicznym spojrzeniem i przekleństwem na ustach. Blues, dzieciaki z 39-tki, sparaliżowane dwiema godzinami strzelanin na otwartej przestrzeni, tworzą w refektarzu zwartą i absolutnie bezwładną masę. Z miską w dłoniach, z wyprostowanymi czapkami, z rogami wystającymi pomiędzy wystawione uszy, patrzą na kucharza w żałobnym milczeniu, tępymi oczami, z nieopisaną tępością.

Z obiema pięściami na biodrach przywódca wyczerpuje zasoby swojej elokwencji.

  • Więc tacy jesteście w tym roku, jeszcze głupsi od wszystkich głupich ludzi, których widzieliśmy? Ach! tam, dobry Boże! Gdybyś tylko wiedział, jakie masz szczęście, że jesteś niebieski w środku wojny! Podczas gdy reszta z nas, w wieku 34, 35 lat, kiedy byliśmy na prawdziwych zajęciach, jaki mieliśmy bałagan!

Równie dobrze byłoby głosić po serbsko-chorwacku tym poborowym, którzy już tak dobrze nauczyli się udawać definitywną głupotę.

Nasz kucharz próbuje kolejnej liny:

  • Zobaczymy, chuj, czy to będą się tego trzymać weterani, żeby puchnąć ziemniaki, weterani, którzy są dziesięć lat, dwadzieścia lat starsi od ciebie, weterani, którzy wracają z frontu? Jeśli jesteś aż tak obrzydliwy, mówię ci, że już ci nie służę. Nigdy więcej. Zjesz je na surowo, ziemniaki. Bo jeśli nie będziemy mogli całować się w towarzystwie, gwarantuję, że to zrobisz.

Zmobilizowani towarzysze zapewniali mnie: „Zobaczysz, że za godzinę powróci do nas życie wojskowe”. Moja kolej, żeby szybko tego doświadczyć. Jeszcze nie „przychodzę”, jestem jeszcze ubrany po cywilnemu. Ale przemówienie kucharza poświęciło mnie przed rejestracją urzędów. Myślałem, że nigdy nie opuściłem otoczenia tych prymitywnych pieców. Popieram, komentuję słowami starych żołnierzy.

Wreszcie bluesaillon, który pożarł swoją miskę, podnosi się z żalem, ciągnąc za sobą żółte kalosze, powoli bierze ziemniaka i drapie go wyczerpanymi gestami męczennika. Dwóch, trzech, sześciu bluesów go naśladuje.Do grupy dołącza kilku weteranów, z dystansem, jak amatorzy. „Miękkie zabawki” będą ubezpieczone, jak wczoraj i jak jutro.

Nasza kolej, aby wejść do refektarza, pośrodku straszliwych płaskorzeźb przedstawiających sto pięćdziesiąt mis. Zbieram całą moją odwagę. Wystarczyło jedno spojrzenie, aby pozbawić się najmniejszej nadziei na odkrycie na struganych deskach, które służą za stół, pięćdziesiąt centymetrów kwadratowych, gdzie mam pewność, że nie wylądował żaden but. Ale słynna kiszona kapusta wkrótce ukrywa niepokojący wygląd mojej cynowej miski. Jest idealna, godna dobrej alzackiej brasserie. Dzięki serii ciągłych cudów jedzenie dotarło do nas prawie czyste. Wino, kawa, rum płyną obficie, jak we wszystkich kuchniach całej armii.

– A teraz zadanie charytatywne. Damy biednym ludziom coś do pracy – rozkazuje szef kuchni. Zabieram z nim danie obozowe. Pod drzwiami czeka na okazję pięć lub sześć starszych kobiet i kilkoro dzieci. Jest też starszy pan, blady, ubrany w jeszcze przyzwoitą aksamitną marynarkę i czapkę. Samice biegnące po kiszoną kapustę popychają go zawzięcie:

  • Dlaczego ten facet przychodzi tutaj, żeby zabrać nasze jedzenie? Otrzymuje emeryturę.

Spekulant nagle upada. Uszczypnie go w nos i stanie się trupem. Zimno go powaliło, my go podnosimy. Nie jest całkiem martwy. Jęczy: „Moja miska, ja też chcę moją miskę”. Zabieramy to do Zizou, przyklejamy do pieca. Cały się trzęsie i nie jest wcale mniej zielony.

Mieszka kilka kilometrów dalej. Dwaj polilusi, dobrzy ludzie, wstańcie:

  • Może moglibyśmy go zabrać. Położymy go do łóżka i ogrzejemy jego skórkę.

Idea tej pomocy zdaje się przywracać człowiekowi odrobinę życia. Wychodzi z połamanymi kolanami, niesiony niemal na wyciągnięcie ręki przez dwie alpejskie góry:

  • Ile wynosi jego emerytura?
  • Oh ! To musi wynosić około stu dwudziestu franków miesięcznie.

Rum i kiszona kapusta z CHR oraz wytłoki z Zizou dopełniły moją aklimatyzację. Wyznam nawet, że po czterech miesiącach wojny paryskiej z radością rozpoznałem te dawne wojskowe zapachy beztroski i braterstwa. Długą podróż do biur przebyłem z najbardziej cierpliwym uśmiechem. Pięćdziesięciolatkowie w szarych bluzach i bryczesach, agenci wojskowi, hybrydy urzędników, komorników i adiutantów, demonstrują swą przemożną godność batalionowi umundurowanych skrybów, który ciąży pod nimi poprzez olimpijskie i wyniosłe „lenistwo”. Udało mi się, z wielką wytrwałością, dostać się do ich gazet, a moja kampania natychmiast rozpoczęła się urlopem do poniedziałku rano.

Herb Quinze-neuf budzi we mnie heroiczną zadumę. W tej przyjemnej kawiarni, w której urządziłem biwak, przy dziesiątym alkoholu tego dnia rozpoczynam serię entuzjastycznych listów do moich przyjaciół w Paryżu. Kerillis, Daladier i Izrael zniknęły. Od teraz na świecie liczy się tylko piechota alpejska. Los przeznaczył mnie na elitarną broń. Przyjmuję jego dekret z radosną dumą. Dlatego będę walczył po najmężniejszej stronie. Narzucono mi wojnę. Albo. Nikt nie zrobi tego lepiej. Opieram swoje myśli na tych epickich obrazach. Bledną, splątują się. Zasypiam na łonie najczystszej chwały i nurkuję do przodu, z nosem w gazecie.

Dłoń spoczęła na moim ramieniu. Wynurzam się powoli, raczej ospale. Widziałem już gdzieś tego dużego, serdecznego, pluszowego diabła. Jest nazwany. To Vossier, generalny delegat Francuskiej Partii Ludowej w Rzymianach. W zeszłym roku brał udział w naszych konferencjach w Lyonie. Poznał mnie przez okno. Budzę się w samym środku pięciu najsilniejszych faszystów w Drôme, którzy zataczają nade mną krąg swoje wielkie dłonie i uśmiechają się szeroko.

Takie spotkanie to przyjemność. Na mojej poczcie bohatera jest duży blok atramentu. Skończę to jutro. Wypijmy, zjedzmy obiad. Napijmy się znowu, zjedzmy kolację, kiełbaskę ziołową po ravioli, clairette de Die po Ermitażu. O północy dotarliśmy na wielkie szczyty polityczne. Wieści z Paryża, towarzysze? Oh ! ale nic prostszego! To totalne, olśniewające żydowskie otoczenie, wszyscy Aryjczycy w khaki i wszyscy Żydzi przy stole. Było trochę ciężko, ale teraz jest dobrze. Front Ludowy? Blum? To była nieśmiała próba. Jest to obecnie arcydzieło wielkiej karamboli Izraela. Jak ? Wygrać wojnę? No dalej, bądźmy poważni. Z Gamelinem w ustach i Daladierem w tyłku? „Bycie wyruchanym przez Żydów to nowa Alzacja-Lotaryngia”. To powiedziała Céline, geniusz, nasz jedyny prorok, Louis Ferdinand Bardamu, ojciec Ojczyzny. Bardzo dobry! Prawda wraca do wina jak oliwa do floty. Bracia! widzimy wyraźnie i widzimy gówno. A my w tym tkwimy i nie wyjdziemy z tego sami. Ale to nie ma znaczenia! Le Quinze-neuf jest zbudowany na skale. Siedź! Hej! Die Fahne hoch! I przebicie języka angielskiego!

  1. de La Pérouse, pisarz kościelny i wojenny w Le Jour, opisał klimatyzowane kwatery współczesnej armii, z wyściełanymi pryczami, metalowymi stelażami łóżek, odkurzaczami i spłuczkami, na czym niczym bohater Przyjaciół Rzymian oparł się żarliwy i pobożny generał, którego autor dzierżył herb: „Pozwólcie mi wszystko pokazać. Nie zaniedbujmy żadnego szczegółu.”

Chciałbym zobaczyć tych panów w Romans-sur-Isère. Nie żeby brakowało koszar, bardzo dobrze klimatyzowanych i wystarczająco przestronnych, aby pomieścić cztery lub pięć batalionów. Stanowią jednak niezbywalną ostoję sakralnych urzędów – pułkownika, dowódcy broni, sztabu – zbiorów rezerwowych i dwudziestu mobilnych strażników, którzy władają ponad stumetrową fasadą i czterema piętrami, z kobietami i dziećmi. Z pewnością armia udoskonaliła swoje metody. Zawsze uważała, że ​​życie buta jest cenniejsze niż życie żołnierza, którego zastąpiono za darmo. Ogrzewa szable i bagnety i, że tak powiem, wyrzuca mężczyzn. Bo możemy stwierdzić, że żadna z chat wybranych dla trzech tysięcy rzymskich piechoty tak naprawdę nie ma dachu i czterech ścian.

Najbardziej pozbawiona tych lokatorów musiała być GUP, grupa jednostek przejściowych, posiadająca rządy tymczasowe. Obozuje na czymś w rodzaju hałdy żużla, ogrodzonej drutem, gdzie splątane są gruzy z chat na wesołym miasteczku, których użytkowania nie pamięta żaden Rumun. Tworzy to labirynt nisz, rozpadających się szop, połamanych blach, porozrywanych desek, połatanych tekturą, wszystko zjedzone, zardzewiałe przez deszcze, rzucane przez wiatr, w prowincjonalnym otoczeniu zaśmieconym wysuszonym gównem, gruzami fabryk w nieładzie sterty gruzów i śmieci domowych z całego przedmieścia, wśród których gnije zwłoki żółto-czarnego dyliżansu, odnawianego co najmniej od czasów MacMahona.

Od prawie czterech miesięcy w tej ruderze, na maleńkiej warstwie słomy, która waha się, czy zostać wykorzystana jako proch czy łajno, stu „przechodzących” mężczyzn marnieje od prawie czterech miesięcy. Temperatura w pomieszczeniu od trzech tygodni utrzymuje się na poziomie około dziesięciu stopni poniżej zera.

To tutaj następuje inwazja niebieskich zeszytów. Byłem jednym z pierwszych na działce. Przyjeżdżają teraz całymi wagonami, całymi wagonami. Wszyscy zostali wezwani natychmiast i bez zwłoki. Większość spóźnia się siedem, osiem dni. Niedawne doświadczenie dwóch mobilizacji nauczyło ich, że w tej wojnie można się nie spieszyć. Trzeba było jeszcze to ciągnąć, przywieźć ten węgiel, czekaliśmy na pozwolenie szwagra: „No, no, daj spokój! Jeśli Onezyma tam nie będzie pojutrze, będziemy musieli znaleźć sposób, żeby się tam dostać. W ten sposób manifestuje się wolna wola człowieka demokratycznego. Armia nie może się temu powstrzymać, jest zbyt przytłoczona, aby przyjrzeć się bliżej.

Tutaj jest ich sto, dwieście, czterysta, osiemset. Wszyscy przybywają z Lyonu lub trzech departamentów Dauphinois, większość bardzo zamożnych rolników z najbliższych kantonów Isère i Drôme. Już pierwszy kontakt ma pewne cechy demoralizujące. Mam między innymi trzydzieści sześć lat i dwa miesiące. Wierzę i czuję, że jestem jeszcze młody. Widzę wokół siebie ten tłum chłopów o szorstkich, siwiejących włosach, spiętych, naznaczonych, porozciąganych we wszystkich kierunkach i z głębokimi zmarszczkami. Są to jednak moi starsi, zaledwie rok lub dwa lata, moi poborowi, często młodsi. Podczas drugiej wojny, jako dziecko, tak postrzegałem terytoria.

Włosi, których jest bardzo dużo, na pierwszy rzut oka dość trudni do rozróżnienia, robotnicy ziemni, tynkarze, murarze weneccy i lombardzcy, często przebywający w kraju od ponad trzydziestu lat, silni robotnicy, o czerwonych twarzach, z potężnymi rękami i ramionami. To nasi weterani, wszyscy po czterdziestce i wszyscy weterani, naturalizowani lub nie.

Na tyłach najodleglejszych baraków zebrało się ponownie duże plemię, przestraszone, skulone, o zielonkawej lub ołowianej cerze, z zaciśniętymi szyjami, zmartwionymi i poruszającymi się oczami. Są to Ormianie z Walencji i Wiednia. I w zwartej grupie księży w baskijskich beretach i besiclach, listonoszy, celników w mundurach wyłania się rosyjski włóczęga, w spłaszczonych lakierowanych butach, w starej alpakowej kurtce, mdlejący z mrozu i głodu, z wywracającymi oczami i który natychmiast pyta bolesnym głosem o drogę do szpitala.

Po wielu godzinach kręcenia się na chybił trafił z walizką w dłoni, reszta wisząca na plecach, uderzająca w podeszwy, kaszląca, dmuchająca w palce, zieleniąca się, siniejąca, pośrodku brudu w końcu zaczynają się wołania, które będzie trwać bez wytchnienia i wytchnienia przez pięć dni. Są to ceremonie doprowadzające do szaleństwa, nawiedzone przez niestrudzenie przywoływane duchy, ze wszystkimi akcentami rozpaczy i wściekłości, niesamowita litania, w której nazwiska Trebizondy przeplatają się z naiwnymi przezwiskami naszych starych rodzin, niewypowiedziane chrzty żartownisiów publicznej publiczności, monolog Bacha w surrealistycznym gramofonie:

- Akhanasarian Agop, Akhanasarian Ardzroun, Arsianian Eznig, Kalandarichvilian, Bombetta Pompeone, Djenderedjian, Dupont Louis, Khatchadourian, Kebabdjian, Kenadjian, Caille, Cocu, Kurkjian, Labitte, Perdrix, Cudagne, Katchadourian, Kherumian, Nigogossian Gronic, Nigogossian Setrac, Robin Paul , Tutundjan, kapral Magnat Jules... Prosimy o kaprala Magnata Julesa. Wreszcie ! Kto go widział chociaż raz, Magnat Jules? Kto to jest, jak jest zrobiony, dobry Boże! ten kapral?

Sierżant, który pochodzi od myśliwych i który był jednocześnie żandarmem, niemy, zrozpaczony, po raz czterdziesty ołówkuje i spisuje swoje listy. W końcu odnalazł Papazjańskiego Stepane'a, ale tylko po to, by ponownie stracić Papazjańskiego Sempada. Bardzo radosny, przed zupą miał stu sześciu ludzi na stu osiemdziesięciu. O piątej potrzebuje prawie dwieście pięćdziesiąt, a zostaje mu tylko czterdzieści dziewięć. Kolejna złośliwość: wciąż ma na rękach sześćdziesięciu robali, wszystkich gotowych do reakcji, ale których nie ma w państwie. [1] imiennik, znakomity sierżant Rebatet Joseph, uprzejmie ostrzega swoich potencjalnych klientów: „Nie ma potrzeby przychodzić i mnie wkurzać, mam inne rzeczy do roboty. A przede wszystkim nie mam nic do waszych ociężałych twarzy. Ledwo rozdaliśmy miski i sztućce.

Niebieskim broszurom nie trzeba powtarzać dwa razy. Nie ubrany, nie żołnierz. Dopóki to trwa, tyle trwa. Ci z najbliższych miejscowości już spokojnie wrócili do domu. Inni cały czas wchodzą i wychodzą. Należy zadzwonić do stu barów.

Rozległa i dobroduszna filozofia ożywia tych chłopów. Wśród mieszkańców okolicznych miejscowości wielu rozpoznaje się już u drzwi koszar:

  • Trzymać ! Gustaw! I dlatego ciebie też zatrudnili w tej firmie?

Wielki uścisk zrogowaciałych dłoni, klepnięcie po ramieniu i szybko nalewamy pierwsze dwa litry białego wina do najbliższej kawiarni. Dla mieszkańców wioski wojna jest przede wszystkim drogą wyjścia.

Ale jeśli gorycz jest rzadka, zapał jest absolutnie zerowy. Cały czas mówi się o jednym temacie: wizytach wprowadzających, które wkrótce nastąpi, i szansach, jakie mamy, aby wywołać obrzydzenie wśród lekarzy. Wszelkie ludzkie zło jest inwentaryzowane, ważone, a ich wartość na giełdzie reform jest dyskutowana w nieskończoność. To handlarze końmi, którzy wąchają i obmacują własne mięso, dyskutując o cenie długimi objazdami.

  • Mam rozedmę płuc. Gdybym pojechał do Walencji z certyfikatami, które mógłbym im tam pokazać, za każdym razem miałbym reformę.
  • Mam złamany odcisk kości na jednym ramieniu. Warto przynajmniej zmienić broń.
  • Lepsze niż nic. Hej, mam wypatroszenie. Nie przeszkadza mi to w pracy, jestem przerzutowcem w Villeurbanne. Gdyby mogli mi dać COA Lyonu?
  • Mam przetokę, która ropieje od zeszłego roku. Dzięki temu w trybie aktywnym z pewnością to osiągnęliśmy.
  • Jestem pomocnikiem, bo mam płaskostopie i na wzrok. A potem mam też niewydolność klatki piersiowej i wrzód żołądka. Dzięki temu nie muszę się martwić...
  • Nie martw się? To jest do zrobienia. W Grenoble mam szwagra mojej żony, który spędził drugi tydzień. Zabrali kilku od pomocników chorych na wrzody, chłopaków, którzy mieli prześwietlenia rentgenowskie i ważyły ​​mniej niż pięćdziesiąt kilogramów.
  • Nadal przykro jest widzieć takie rzeczy. Nadal jesteśmy idiotami. Powinniśmy być świadomi przysługujących nam praw.
  • Prawa? Masz te, które zostały ci dane. Nie, wystarczy mieć sprawę do przedstawienia. Więc miałem ropne zapalenie opłucnej. Moje żebro zostało odpiłowane. Mam uszkodzone płuca i przewlekłe zapalenie oskrzeli. To, jak rozumiesz, jest przypadek.
  • Tak, ma rację, wołamy, gratulując mu. Musisz przedstawić swoją sprawę. To tak jak ja...

Przed tym szpitalem czuję się w obowiązku powiedzieć:

  • Nie mam złudzeń, jestem dobry jak Rzymianin. Nie choruję od czternastego roku życia, a ważę.

Kiwają głowami, serdecznie żałując mojego pecha.

  • Oczywiście, jeśli nie masz podstaw do przedstawienia...

Znalazłem jednak kogoś, kto był naprawdę przekonany: był to mój przyjaciel Argoud, bogaty chłop z okolic Valence. Razem przekroczyliśmy chwiejną bramę naszego GUP i tutaj jesteśmy już bardzo solidnie związani. Poszliśmy razem na kolację w korku z jednym z jego sąsiadów. Argoud ma żywą fizjonomię. Rozumuje z solą o armii i katastrofalnym Frontu Ludowym; Zgadzam się zdecydowanie, obwiniając żydostwo. Argoud odpowiedział natychmiast, wyglądając na bardzo zgorszonego:

  • Oh ! ale mówisz jak Ferdonnet, ty! To jest hitleryzm. Jestem praktykującym katolikiem, ale jestem przeciwny nienawiści religijnej. Nie jest prawdą, że Żydzi chcieli wojny. To Hitler tak mówi, żeby naziści zadziałali. Prowadzimy wojnę, aby zniszczyć faszystowskie barbarzyństwo. Jest to obrona cywilizacji chrześcijańskiej. To święta wojna, musisz ją wygrać lub zginąć. Nie jesteśmy żołnierzami, jesteśmy krzyżowcami. Nie możemy przestać, dopóki nie zmiażdżymy głowy nazistowskiej hydry.

Argoud puka w stół. Jego oczy błyszczą. Najwyraźniej katechizował go jakiś opat chadecki, co jest dość niezwykłe jak na Dauphinois. Przynajmniej tutaj jest Alpinista, który wie, o co będzie walczył. Nie ma sensu nalegać. Nie chcę rezygnować z tak wspaniałego postanowienia.

W nieco zawstydzonej ciszy zajadamy się befsztykiem z jabłkami. Aby złamać psy, sąsiad, któremu cywilizacja chrześcijańska nie przeszkadza spać, przedstawia swój argument za reformą, którą uważa za decydującą. Krzyżowiec Argoud natychmiast okazał ogromne zainteresowanie i dodał z wielką dumą:

  • Ach! Mam lepsze niż to. Mam żylaki powrózka nasiennego i ślady albumin. Jestem już pomocnikiem. Spróbuję znaleźć sposób na osiągnięcie reformy. Szczególnie w obliczu tego przez co przechodzimy byłoby bardzo niefortunnie gdybym podczas wizyty nie podała podwójnej dawki. Dzięki temu na pewno będę wiedział, jak należycie argumentować swoją sprawę.

Nawet się nie uśmiecham. Żadna ironia nie była w stanie poruszyć dzielnego Argouda. Jest całkowicie naiwny.

Godziny mijają z trudem na polarnym strażniku GUP, a nasze serca są przesiąknięte zimnem, brudem, bezczynnością i ciężkim winem. W ciągu trzech dni, które tu spędziliśmy, obraliśmy dwie torby mrożonych marchewek.

Wołania wciąż następują po sobie, bardziej upiorne niż kiedykolwiek, w wyciu zamieci: „Agapian, Merdjian, Faure Félix, Poussegrive, kapral Magnat Jules. O Magnata Julesa pytamy w biurze batalionu. Potentat Jules! Potentat Jules! Ach! więc ten…”

Pośrodku jednej z chat leży coś w rodzaju ogromnego starca, skulony na skrzyni, naprzeciwko jednego z iluzorycznych palenisk, które zostały zapalone. Jej opadający brzuch w brudnej koszuli wisi pomiędzy krótkimi udami. Pod sikającą czapką ma zupełnie siwą głowę, twarz topielca, nabrzmiałą, fioletową, z brodą podobną do tej, która rośnie na umarłych. Facet ma trzydzieści siedem lat. Jest skrajnie cukrzykiem. Jest tu od dziesięciu dni, żywiąc się kilkoma łyżkami rosołu. Nie może przejść na nogach dwudziestu metrów, szpital go nie chce. Musi poczekać na radę ds. reformy, która zadecyduje o jego losie, jeśli do tego czasu nie umrze.

W pobliżu cukrzyka, wśród starych mioteł, przekłutych konewek i obierek, odkryłem wspaniały, mistrzowsko wykonany szyld: PRZEKRÓJ PISTOLETU 25 mm. W środku naszej ekstrawaganckiej hodowli zapowiedź tej artylerii dała mi do myślenia. Faktycznie, w pudełku z tabliczką powiadomiłem grupę żołnierzy. Wyróżniają się, dość pogardliwi, znacznie młodsi od nas, mają po dwadzieścia pięć do dwudziestu ośmiu lat, w przyzwoitych mundurach i tak dobrze utrzymani, jak to tylko możliwe w takim miejscu.

Pytam, przynieś:

  • Więc jesteście chłopakami przeciwpancernymi?
  • Tak, mały staruszku. Przeciwpancerni to my.

Waham się, czując ogrom mojej prośby:

  • .. działo 25? Masz tu takiego?

-Śmiejesz się! Armaty szukaliśmy cztery miesiące. Najpierw pojechaliśmy do obozu w Valbonne. Zatrzymaliśmy się na trzy tygodnie. Nie było armaty. Wróciliśmy więc do GUP. Następnie udaliśmy się do obozu Courtine, na specjalne szkolenie przeciwpancerne. Czekaliśmy piętnaście dni, miesiąc. Każdego ranka przybywało działo. Wreszcie po dwóch miesiącach znowu wróciliśmy do GUP-u, armaty nie widzieliśmy. Moglibyśmy tak wyglądać, jako część 25 armat bez armaty, przez całą wojnę. Nie bij się.

W kieszeni marynarki znalazłem bohaterskie listy do przyjaciół w Paryżu. Moja wiara! Poczekam trochę, żeby je dokończyć.

Jestem biedna. Mam w kieszeni tysiąc franków, które powinno wystarczyć na długo. Dostałem się do miski. Muszę się do tego przyzwyczaić. Ona jest naprawdę nie do opisania. Podejrzewaliśmy to, widząc cuchnącą norę, pomiędzy toaletami a szopą na padlinę, gdzie pół tuzina pijanych bandytów dokonuje swoich psot. Rzucają w nas porcjami kleju lub brudnej wody, wrzeszcząc przez okno, ze spleśniałym, zielonym chlebem. Próbujemy to przełknąć, stłoczeni w strasznym wartowniku ozdobionym nazwą refektarza, kilkoma drewnianymi filarami i kilkoma listwami postawionymi na kupie śmieci, a w kwaterach zastyga smutny melanż. Ormianie i wielu chłopów zaciekle walczą o żywność. Regulacyjną higienę zapewnia miotła, która wygania ślinę, błoto i odchody z podłogi, z której natychmiast wycierane są kawałki desek, na których ludzie będą jeść. Zamykam nos, oczy; aby docenić mój los, myślę o towarzyszach utrzymujących placówki w Alzacji przy minus trzydziestu stopniach.

Niebieskie broszury zawsze docierają falami. Przez sześć dni prowadziliśmy tę obrzydliwą egzystencję fałszywych cywilów, grasując przez sen z walizkami w pięściach, kucając pośród pajęczyn i starych puszek, drzemiąc pod paskudnym kocem, który zawdzięczamy dobroczynności przyjaciół, czekając o rozkaz, o jakąś poradę, o strzęp informacji. Mężczyźni zaczynają pragnąć płaszcza, w którym będzie im przynajmniej trochę cieplej niż w ich wytartych kurtkach i pąkach.

Sklep dla strażników ćm jest teraz dochodowy. Od czasu do czasu wprowadza do obiegu zdumiewające lalki, Ormianina w niebieskim soquenille, który musiał pochodzić z Verdun i Sommy, w czapce chłopskiej, chłopa w bryczesach golfowych khaki i czarnym kapeluszu. Ale musimy to zakończyć. Chcę rozebrać moją schłodzoną kopertę z Pekinu. Powie się też, że całkowicie sam będę decydował o wszystkich istotnych aktach mojego życia wojskowego. Po całym dniu daremnych prób w końcu uwiodłam odważnego kaprala ze sklepu: „No dalej! – powiedział do mnie z braterską czułością. Ubiorę cię” – jakby ktoś powiedział do prawie nagiego włóczęgi.

Sklep jest przepełniony nowościami. Niestety wszystkie kurtki są skrojone na mitologiczne kolosy o wysokości dwóch metrów i odpowiednio szerokie. Jeśli zaś chodzi o majtki to nadawałyby się do działu szkolnego. Próbujemy się więc ubierać, przenosząc paczki ubrań, z których wydobywają się kłęby pyłu węglowego. Należąca do mnie marynarka, z brudnymi podszewkami, ozdobiona ogromnymi żółtymi metalowymi guzikami, sięga mi prawie do kolan. Z drugiej strony, pod pachami, ściska mnie aż do uduszenia. Łydki to strzępy postrzępionych szmat. Najgorsze są majtki, te poplamione szlamem resztki, te czarne muchy. Za osłonę służy duży, prawie czysty kaptur. Piszemy poruszającą literaturę o armii francuskiej w bruzdowych barwach. Moja prezerwatywa ma dokładnie kolor świeżego nawozu. Jeśli chodzi o sławny beret, który z dumą nosiłem, to zakurzony i wyblakły „ciasto” wisi mi na ramieniu.

Tak uczyniwszy, natychmiast odchodzę do dobrowolnych obowiązków. Naszą misją jest przywóz koców, które w końcu zdecydujemy się nam rozdać. Jako okładki znajdujemy się przed krawieckimi obciętymi końcami. Aby uchronić się przed dwudziestostopniowym zimnem, oszołomieni mężczyźni otrzymują kawałek sergi, materiału smokingowego, wielkości ręcznika. Dwóch lub trzech uprzywilejowanych chłopów w olśniewający sposób rozkłada piękny perłowoszary kupon księcia Walii: „Mój stary, grzechem jest wrzucanie tego do słomy. Zawsze znajdę starą dedę dla konia na wymianę i będzie ładnym płaszczem.

Rozpoczyna się nowy tydzień. Wołania wciąż rozbrzmiewają na cztery wiatry, z tymi samymi desperackimi akcentami: „Kapral Magnat Jules!”. Niebieskie broszury kontynuują swój spokojny obchód z rękami w kieszeniach, regularnie kursując między koszarami a bistro: codziennie rano garnek białego, każdego popołudnia garnek czerwonego. Podczas jednej z takich przerw dowiedziałem się od towarzysza, że ​​dwa dni temu zostałem przeniesiony do drugiej kompanii.

Pędzę. Po kilku godzinach żmudnych poszukiwań odkryłem tę godną szacunku jednostkę na drugim końcu Rzymian, w hangarze fabryki chemicznej, o przejmującej cuchnącej woni. Sierżant myśliwy-żandarm stoi na środku dziedzińca, z gardłem owiniętym ogromną wełnianą chustą, odrywając się od bolesnych dźwięków: „Kapral Magnat Jules! Rebatet Lucien... Ach! Wreszcie ! Czy to ty, Rebatet? DOBRY. Przede wszystkim nie odsuwaj się. Przez chwilę nieszczęśnik mógł mi pogratulować.

Tutaj, wśród porzuconych khaki, porzuconych niebieskich, pół-khaki i pół-niebieskich, porzuconych, palta, palta, mundury, skóry owcze, kurtki aksamitne, cywile z góry i wojsko z dołu, cywile z dołu i żołnierze z głowy, to ciągłe, szalone wołanie, wir sanitariuszy, rowerzystów, kaprali, przez których co minutę przechodzi konwulsyjna sylwetka dowódcy kompanii, porucznika Simona, znakomity nauczyciel, z ołówkiem w uchu, w baskijskim berecie kleryckim na czubku głowy, z szeroko otwartymi oczami znad okularów.

  • Wszyscy, zbierajcie się! Natychmiast poproszono dwudziestu dwóch uzbrojonych mężczyzn o stanowisko DAT w terenie. Kłusujące tempo! Weź nazwiska.

Odgłos butów i tyłków. Po dramatycznych wysiłkach ustawiono w szeregu dwudziestu pięciu mężczyzn z Lebelem w ręku, odzianych w pasy z nabojami. Ale jest piętnastu, którzy nadal zachowują się kulturalnie od stóp do głów. Tymczasem sześćdziesięciu chłopaków w mundurach biegnie za bronią.

  • Pilnie potrzebujemy sekretarki w ambulatorium!

Przychodzi absolwent szkoły średniej, spieszy się z niezakończonymi sprawami do nowych obowiązków, wraca po dwóch godzinach ze skruchą:

  • Szkoda, kryjówka była niezła. Ale oni nie potrzebują sekretarki. Potrzebują nurka.

Już wczoraj poprosiliśmy o trzech sekretarzy. Właśnie dowiedzieliśmy się, że zostali wysłani, żeby rąbali drewno. Jest równy ! prosimy o czterech, pięciu, dziesięciu, dwunastu sekretarzy. Idą fatalistycznie w stronę niezgłębionego zapomnienia.

  • Zadanie polegające na przynoszeniu jedzenia od Zwyczajnego.

Zgromadziło się piętnastu stypendystów, którzy wepchnęli na wózek dwa worki porów. Ale do rozładunku dwudziestu ton węgla pozostały już tylko trzy.

Dziesięciu żołnierzy odchodzi w pełnym stroju kampanii, uginając się pod ciężarem muła, na odległy posterunek. Wypiliśmy wino wielkich pożegnań. „Do widzenia, wyślemy pocztówki”. O zmroku wracają. Nie byli już „liczeni” w siłę roboczą firmy. Trzeba je jeszcze raz policzyć. Spośród stu dwudziestu osób, które przybyły w tym tygodniu, czterdziestu zostało już zwolnionych i zniknęło. A oto sto nowych niebieskich książeczek w stanie surowym pędzących przez bramę. Wkrótce ogłoszonych zostanie kolejnych dwieście. Nierozwiązywalne problemy!

Dzielny porucznik Simon jest u kresu swego oporu:

  • Zobaczmy, Bonnardelu. Zeszłej nocy musieliśmy naliczyć dwieście czterdzieści cztery. Przenieśliśmy czterdziestu trzech sanitariuszy, kierowców, pielęgniarek, sekretarek, sanitariuszy. Wysłaliśmy siedemnastu żołnierzy pomocniczych do COA. Ale bądź ostrożny! odliczają do soboty. Z pierwszej kompanii otrzymaliśmy dwudziestu ośmiu ludzi. Ale u nas liczą się dopiero od następnego dnia po transferze. Mamy także ośmiu nowych reformowanych. Musimy zobaczyć, jak długo ich traciliśmy. Ach! konieczne jest, aby wszyscy żołnierze umundurowani byli w kolorze khaki, a wszyscy udający się do COA: strój zmiany korpusu na niebiesko. O jedenastej rano zaginęło siedemdziesięciu siedmiu mężczyzn. W związku z tym mam dwanaście do wysłania jutro rano Radzie ds. Reformy! Która praca ! Teraz zamiast tego muszę biec. Mój biedny Bonnardel, spróbuj mnie podnieść.

Czterech kadetów, którzy przybyli do nas trzy dni temu z Saint-Maixent w nowiutkich mundurach i rękawiczkach zapinanych na trzy guziki, kontempluje tę scenę ze zwisającymi rękami i otwartymi ustami. Bonnardel wita ich z godnością i odchodzi, wyglądając na zamyślonego. Jest bardzo niskim mężczyzną, mającym cztery stopy i dziewięć cali wzrostu, szeregowcem drugiej kategorii i w cywilu sprzedawcą gazet. Drzemie w nim niezaprzeczalny geniusz stanów i sytuacji w relacjach. Na oczach pół tuzina podoficerów i skrybów, którzy pokonani obracają w palcach ostatni rozkaz batalionu, Bonnardel wysyła zawrotnym piórem pięć kilogramów papierów, organizuje dwadzieścia oddziałów, rejestruje cały pociąg przybyszów, przypisuje imię, klasę, zawód, decyzję medyczną na czterystu twarzach. Bonnardel jest dowódcą 2. kompanii GUP

Oprócz tego bohatera wszyscy oficerowie niebędący rangą traktują zgiełk, którego są celem, jako suwerennie zdystansowanych widzów. Wściekłości, gorączkowe błagania dwudziestu nosicieli warkoczy nie skracają ani o krok ich małych spacerów między aperitifami a pobliskimi kawiarniami. Poruszyło ich jednak ważne wydarzenie: zupa z drugiego roku była wyśmienita. Kundel, poczciwy Rousset, wiejski ksiądz w Isère, ze strasznym akcentem „dauphinô”, z wysublimowaną gorliwością dba o garnki, nad którymi nasz szef kuchni czuwa dzień i noc. Wczoraj wieczorem zjedliśmy kluski.

Kiedy kończymy stojak z cudownymi frytkami, monumentalna zjawa sprawia, że ​​wszystkie głowy podnoszą się do góry:

- "Cześć wszystkim ! Chłopaki, jestem Muetton Joseph, rolnik. Dziś rano na wadze stacyjnej sto trzydzieści trzy kilogramy. Chłopaki, muszę wam powiedzieć, że mam jaja jak łydka”. I żeby od razu pokazał nam te cuda, wykrzykując Serenadę Toselliego, uroczyście przerywaną beknięciem białego wina, którym jest wypełniony po brzegi.

Ale cudowne dziecko należycie zauważone i podziwiane dookoła, ponowne wprowadzenie relikwii do ich sanktuarium okazuje się pracochłonne. Muetton jest bez wątpienia najbardziej bezczelnym wojownikiem francuskiej armii. Najmniej nieuczciwe warkocze, którymi mogliśmy go zakryć, zatrzymywały się w połowie ud i absolutnie odmawiały dalszej wspinaczki. Pomiędzy tym punktem a pępkiem skromność muettona alpejskiego była dotychczas chroniona przez zespół flanelowych pasów, sznurków, szelek, szpilek, majtek. Jej rekonstrukcja okazuje się iluzoryczna. A Muetton, wierząc, że dziś wystarczająco przysłużył się ojczyźnie, wkrótce wyrusza w kierunku miasta na boisku na pełnym morzu, co trzy kroki pokazując szczegół swoich skarbów.

Rozpoczęły się wizyty inkorporacyjne dla całej mojej grupy. To są niekończące się ceremonie. Oferują mnóstwo wolnego czasu, aby kontemplować dobry tysiąc francuskich mężczyzn w stanie natury. To przedstawienie wcale nie jest pocieszające. Rasa z mojej prowincji niewątpliwie zawsze była bardziej odporna niż piękna. Ale jest naprawdę zniszczony, zaniedbany. Do złączenia trzydziestu dwóch nienaruszonych zębów potrzeba dziesięciu ust. Istnieje niesamowita liczba ptoz, żylaków, przepuklin, wrzodów i skrofuli. Moralność reżimu i narodu można ocenić także na tej paradzie chłopów, z ich ogromnymi i miękkimi brzuchami na chwiejnych udach i słabymi kolanami, z ich wygiętymi kręgosłupami, wystającymi łopatkami, wąską klatką piersiową, zgniłymi szczękami i uszami sącząc się, ich żołądki są kwaśne, a ich wątroby rozkładają się. Jestem tylko mieszkańcem miasta, solidnie zbudowanym, ale o bardzo skromnym wyglądzie, handlarzem papieru zamkniętym w śmierdzącej drukarni, który ma za sobą jakieś pięć tysięcy nocy na jawie, ale przynajmniej trzeźwy i umyty. Umieszczam się w bardzo przyzwoitej średniej wśród wszystkich tych ludzi na ziemi i na świeżym powietrzu.

Obojętni lekarze czerpią wymagany zwrot z tego raczej smutnego stanu rzeczy. Ich instrukcje są z pewnością bardzo konieczne i rozczarowania spadają na mężczyzn z dobrymi „sprawami”. Biedny diabeł, szkieletowy i już siwiejący, przedstawia się: „Czterdzieści cztery kilo. Pięć stóp. Dobra służba pomocnicza, odpowiednia do prowadzenia kampanii. Zgorszony jęk przebiega wzdłuż szeregu nagich mężczyzn. Nieszczęsny krasnolud, odchylając się do tyłu, jęknął ze łzami w oczach: „Mam pięć stóp i czterdzieści dziewięć lat. Dodali mi centymetr, bo poniżej pięćdziesięciu metrów nie powinni brać...”

Osoby z żylakami, reumatyzmem i astmą desperacko bronią swoich szans w ostatniej tyradzie, którą przerwali lekarze. Argoud, bohaterski krzyżowiec, trzymany jest w jednostce pomocniczej i nie kryje bardzo okrutnego rozczarowania. Moja kolej. Mój werdykt jest z góry znany. „Dobra służba zbrojna”. Skoro jestem żołnierzem, równie dobrze mógłbym być żołnierzem. Ale muszę przynajmniej otworzyć usta, żeby nie stracić twarzy przed towarzyszami.

  • Nie jestem zbyt silny.

Stojący przede mną kapitan-medyk to dobroduszny olbrzym, także cywil w mundurze. On się śmieje,

-Gdybyśmy tylko musieli brać pełnowartościowych sportowców!

Jego duże, psotne i zblazowane oczy dodają:

  • Poza tym za to, do czego cię zmusimy...

 


ROZDZIAŁ XV

ARMIA BOUBAKiego

Jestem żołnierzem już od miesiąca. Wkrótce zostałem przeniesiony do 1. kompanii GUP. Kanton syberyjski, jak można było łatwo przewidzieć, z odwilży zamienił się w jeszcze bardziej piekielne szambo. Czarny błoto wdarło się do wszystkiego, niosąc zgniłe pozostałości z kuchni, nabrzmiewane przez dopływy kapiące z szumowin. Nigdy zwięzły refren naszych trąbek nie był bardziej prawdziwy:

Sto pięćdziesiąt dziewięć jest po
uszy w gównie.

Trzymam się z czułością dla malarstwa wojskowego.Francuski żołnierz piechoty 1940 pozostaje, jak należy, rodzajem włóczęgi zmieszanej z Papuasami. W starym żargonie biffin reszty, czyż nie był to włóczęga, człowiek z bisasem, który cały swój dobytek ma na plecach, który zawsze niesie ziemię w krokietach, słomę w porzuconych rzeczach, który leży na pustkowiach i stodołach , kto chodzi po miastach przez najbardziej opustoszałe przedmieścia, nasz bliźni, nasz brat?

W pierwszych aktach mojego życia wojskowego przeżyłem nieopisaną radość. Cztery tygodnie temu obraziłem posłów, redaktorów gazet, zbeształem ministrów, moje zniesławione lub oklaskiwane nazwisko było poniżej pięciuset tysięcy oczu. Oto jestem teraz niczym poborowy, odmierzający czas w tej samej randze, co dwaj allobrogowie z długimi, żółtymi wąsami Franków, najmniejsze stworzenie w rękach mistrza kaprala, a nawet „pierwsza klasa”, jak jeden z sklepikarze, z zawodu strażnik wiejski, który w ślad za nim sprawuje wściekłą tyranię. Spędzam godzinę z dojrzałymi i rozsądnymi mężczyznami, moim przyjacielem sierżantem Jannezem, poważnym ubezpieczycielem z Lyonu, ojcem dwójki dzieci, czy sierżantem Manhèsem, profesorem fizyki, dyskutując o skandalu związanym z daniem ze smażonych ziemniaków, które rozdano mężczyznom, ale nie podoficerów. W kolumnie, gdy zauważam siebie w oknie, pod torbą i hełmem, z bronią na ramieniu, śmieję się jak ze starego znajomego spotkanego w środku niesamowitej maskarady.

Ale bezmyślność pierwszych dni to trochę rozejm. Kawałki myśli powoli łączą się w mojej głowie. Nasz drań jest obrzydliwy. Całe towarzystwo kaszle jak szalone, co spowodowało też płukanie gardła, czyli obmywanie lekko bielonej wody, w której zanurza się ćwierćdolarówkę, by poćwiczyć bulgotanie w kółko. Nasze jedzenie jest obrzydliwe. Te nieszczęścia w środku wojny nie zasługują same w sobie na odnotowanie. Nie będziemy narzekać, że jest nam zimno i strasznie brudno, kiedy w okopach są ludzie i grozi im śmierć. Nieuniknione jest, że magazyn jest w istocie wysypiskiem śmieci. Mamy jednak wrażenie, że na tych wysypiskach leży trzy czwarte armii francuskiej.

Może to nadal być jedna z wyjątkowych potrzeb tej wojny bez walki. Ale ta paradoksalna sytuacja musiałaby wówczas wymagać całej troski przywódców. Mężczyźni w magazynach doświadczają jedynie bardzo względnych wyroków. Ale co gorsza, bez powodu grzęzną w błocie i brudzie. Trzy miliony francuskich żołnierzy gnije na nogach.

Co więcej, nasz GUP wydaje się znacznie mniej zabawny, gdy pomyślimy, że tworzymy bezpośrednią rezerwę 27. dywizji, elitarnej jednostki piechoty francuskiej i że gdyby jutro zaczęła się prawdziwa wojna, natychmiast wyruszylibyśmy i walczyli w jej szeregach.

Nadal żyjemy pośród starannie regulowanej, systematycznej niespójności. Jest wśród nas kilku mężczyzn w czynnej służbie, którzy nie przepracowali jeszcze ani dnia na froncie, zaś ojcowie rodzin z klasy osiemnastej są już piąty miesiąc na linii Maginota. Trzy dni po ich przyłączeniu pięciuset chłopów górskich zostało odesłanych do domu na trzydziestodniowy urlop rolniczy, który mieli spędzić na kontemplowaniu śniegu. Jednak wszystkie kompanie, do których właśnie zostali przydzieleni, zostały rozwiązane już po raz dziesiąty od mobilizacji i przez wiele tygodni nie nadawały się do najskromniejszej służby. Poborowi roku nadal nie przyjęto. Ale przybywamy w ogromnych partiach niebieskich książeczek, odzyskanych z klas piętnastej i szesnastej, autentycznych kulawych ludzi, pochylonych na dwóch laskach, mężczyzn, którym brakuje czterech palców. Jeden z tych cennych rekrutów, mozolnie przeglądający prawie niezrozumiały pakiet słów, otwiera przede mną usta. Została trafiona w Vauquois kulą, która odcięła jej połowę języka. Blizna jest okropna. Ten nieszczęśnik może jeść tylko owsiankę i mięso mielone. Ma czterdzieści pięć lat. Zostaje przyjęty z powrotem do służby pomocniczej.

Kobiety wiejskie, których mężowie opuścili, protestowały u posłów i radnych generalnych, zasypując anonimowymi listami, bo sąsiadka, starsza zaledwie o pięć lat, zostaje w domu i zarabia duże pieniądze. Przez demagogię koszary są tak pełne kalekich weteranów, kalek, chorowitych, że nie ma już miejsca ani płaszczy dla dwudziestoletnich chłopców.

Trzeba być bardzo naiwnym, żeby nie zrozumieć, że mechanizm militarny jest tu zepsuty od góry.

W okólniku zażądano statusu kandydatów na oficerów rezerwy. Pospieszyłem się zarejestrować, odzyskując nagle swój największy zapał do „Quinze-Neuf”. Wyruszenie na wojnę jako dowódca sekcji w korpusie alpejskim mimo wszystko liczyło się w życiu. Dowódca GU P, pan szef batalionu Thorand, w cywilu sklepikarz z suknem, czcigodny loży Montélimar, który wzniósł toast za wszystkimi moimi rzymskimi przyjaciółmi, gorąco popiera moją prośbę.

Wezwano mnie na spotkanie z najwyższym mistrzem Rzymian, pułkownikiem Planetem, wraz z około piętnastoma innymi kandydatami. Główny adiutant myśliwych wydawał nam rozkazy z takim wdziękiem, jakby prowadził pluton zabójców do więzienia. „Przyprowadzam przyszłych generałów” – oznajmił z wyrazem najwyższej ironii. Najwyraźniej poranne drzemki nie dają mu spokoju na myśl, że kadet, prawie oficer, a w każdym razie jego przełożony, może za cztery miesiące wyjść z tego podłego oddziału.

Pułkownik Planet przyjął mnie w pełni strawionego, ze szklistymi oczami, pomidorowymi policzkami, z sześćdziesięcioletnią czaszką opadającą z każdym zdaniem w stronę biurka i moczącą papiery od potu. Mozolnie rozpiął kołnierzyk, ściągnął kurtkę, sapiąc i dysząc, wyciągnął się z wielkiego, zielonego swetra w kształcie jabłka, co doprowadziło go na skraj apopleksji. Wreszcie ucichł mu głos i wycierał wyczerpaną ręką:

- Jesteś dziennikarzem! Co chcesz, żebym dla ciebie zrobił? Czy w twoim wieku chciałbyś zostać oficerem piechoty? To jest bardzo dobre. Masz wiarę. Podoba mi się, zachęcam. Ale jesteś o wiele, wiele za stary! Masz trzydzieści sześć lat, pomyśl o tym! Mamy więcej chętnych niż potrzebujemy. Chcę powiedzieć, że jesteś osobą godną polecenia. Ale nie masz szans. Za stary". I z przygnębieniem: „No dalej! Następny".

W międzyczasie mały incydent spowodował ułomność, która musiała zadecydować o mojej karierze wojskowej. Wysłałem do Je Suis Partout, pod pseudonimem „l'Alpin”, raport w dobrym humorze, szczery w kolorze, ale ożywiony, zapewniam cię, z doskonałym duchem, o moich pierwszych dniach w piechocie. Regulamin mi na to pozwala. Moja gazeta odniosła wielki sukces wśród licznego personelu rzymskiego garnizonu. Ale nagle wydarzyła się tragedia, mówiłem w tym artykule o ćwiartce rumu wypitej na moim pierwszym posiłku żołnierskim w kuchni CHR, podczas gdy wszyscy kucharze sprzedają gospodyniom domowym, przekazują swoim koleżankom i kobietom rum wiadrami, wino przez wózki gazowe, kawę kilogramami, ryż i mięso wozami, którymi komisje zwykle przewożą sardynki i cukier ciężarówkami, Intencja Generalna Lyonu wpadła w straszliwy gniew, zrewolucjonizowała się od góry do dołu, gdy dowiedziała się, że ćwierć rumu udało się go wrzucić do drugiej klasy, nawet nie umundurowanego, w towarzystwie, w którym się nawet nie liczył. Kapitan CHR, pan Vincent, nauczyciel i działacz socjalistyczny, był świadkiem, jak atakowało go pół tuzina śledczych z czterema i pięcioma paskami. Musiał dostarczyć w nie wiem ilu egzemplarzach zapis wszystkich swoich pism, a bogowie wiedzą, jakie są pisma CHR, od pierwszego dnia mobilizacji. Sprawą zajął się generał dowodzący regionem. Nic nie dodaję...

Sugeruję, jakim szacunkiem kapitan Vincent może darzyć faszystowskiego dziennikarza, który zasłużył na ten atak... Pan Szef Batalionu Parodin, dowódca broni na Korsyce i on, jako oficer zawodowy, wezwał mnie do swojego biura. Najwyraźniej wykonywał żenujące polecenie, nie mając uzasadnionego powodu, aby mnie karać. Po dytyrambicznej pochwałie mojego patriotyzmu nie mógł przede mną ukryć, że kapitan Vincent wolałby, abym poszedł na naradę wojenną. To życzenie, zwróciłem mu uwagę, było tym bardziej wygórowane, że moje artykuły uzyskały akceptację pułkowników cenzorów w Paryżu. Ten szczegół zadał doskonałemu dowódcy ostateczny cios do tego stopnia, że ​​w końcu musiałem go pocieszyć. Są to mimowolne i niewinne zadośćuczynienia dla pokornego drugiej klasy, ale z pewnością nie skazujące go na stopień miłości.

Moi bracia, a przynajmniej żołnierze, przynieśli mi pewne pocieszenie. Znajduję wśród nich tę naiwną i żołnierską filozofię, do której tak aspirowałem.

Pierwszy kontakt był bardzo zniechęcający. Izolacja moralna wydawała mi się bezskuteczna, podczas gdy rozpaczałem, czy uda mi się uciec od fizycznej rozwiązłości. Około dwudziestu okropnych bandytów, strasznie wszechobecnych, ukrywało przede mną prawie wszystkich pozostałych. Zapomniałem także języka ludzi, tak podstawowego i powolnego, że tracimy wszelką nadzieję, że będziemy go mówić i kiedykolwiek nawiążemy komunikację z tą inną planetą.

Ale stopniowo tworzą się więzi, inteligencja, dusza jaśnieje poprzez obowiązki, ćwiczenia, dobrą okazję, która połączyła nas razem na dwie godziny. Odkrywamy, że cisza, która mogłaby uchodzić za oszołomienie, jest jedynie roztropną rezerwą chłopa, w dodatku chłopa z Dauphinois, który uchodzi za najbardziej podejrzliwego i który być może nie jest ani więcej, ani mniej niż wszyscy inni francuscy chłopi .

Jeden z pierwszych promyków nadziei zawdzięczałem grubemu i wesołemu panu z Lyonu, mojemu przyjacielowi Puygrenierowi, jednemu z tych nieregularnych, z tych ekscentryków, których można znaleźć zarówno wśród ludzi, jak i w innych klasach, a którzy byliby o wiele zabawniejsi opisać niż mniej lub bardziej sztuczną bohemę literniczą. Nic z wiecznego marlou w stylu Carco, ale kaboszard, prawdziwy niezależny, znudzony miejscami całkowitego odpoczynku, który ma bardzo silne wyczucie monotonii i próbował swoich sił w pięciu lub sześciu zawodach poprzez zatwardziałe zamiłowanie do ruchu. Tarasarz, bistro, barkarz, drwal w paryskim metrze, handlarz w zależności od dnia i roku, znał wszystkie kręgi rewolucyjne, wszystkie te małe kręgi zrodzone wokół kilku fałszywych ludzi czynu, kilku łobuzów, kilku terrorystów platformowych w pobliżu którego naiwny, popularny ideał miał rozkwitnąć. Puygrenier musiał być bolszewikiem, anarchistą i trockistą. Bardzo możliwe, że w księdze rejestracyjnej go zaznaczono: należy na niego uważać.

Puygreniera należy wysłuchać w sprawie komunistów, socjalistów i wszystkich wyznawców 36 maja. Jest nawet przeciwny klasycznemu rozróżnieniu między przywódcami a ich naiwniakami:

  • Faceci, którzy pozwolili się tak wprowadzić w błąd, nie powinni już mieć prawa do niczego. Za głupotę tego ciężaru trzeba w ten czy inny sposób zapłacić.
  • Oh ! Puy, zostali dobrze ukarani, ponieważ teraz grają w pierroty w kolorze khaki na pośladkach.
  • Mówisz o pocieszeniu? Czyż nie robię pierrotów tak jak oni? Czy ty też nie masz garnituru Daladier? Nie, kolego. Ci goście potrzebowaliby kolektywistycznej kary. Ale wiem, że to wciąż kwestia utopii, a właściwie odwrotnej filantropii! Musimy więc zadowolić się wmawianiem sobie, że nic nie istnieje, ani sprawiedliwość, ani komunizm. To zabawne, nadal miło jest o tym pomyśleć.

Któregoś wieczoru bez żadnych incydentów stałem na straży u wejścia do naszej siedziby. Poczta to przekrzywiona chata, najbardziej niepewna i najbrudniejsza na naszej wyspie potępionych. Piec chciał trochę pomruczeć. Zaopatrzono nas w puszki czerwonego wina. Był tam Cléry, kapral i listonosz, listonosz z Hautes-Alpes, rolnik z Isère, mechanik i ja. Rozmawialiśmy o naszej pracy, kłopotach i zaletach. Moje nie znaczyło dla nich zbyt wiele, bo nie jestem z Paris-Soir dla prestiżu, ani z l'Humanité, żeby mnie serdecznie żartowano i skrycie podziwiano. Ale wprowadzili mnie w życie Poczty, w ciężką pracę nocnego sortowania, w ciężkie obowiązki odbiorcy, a te proste obrazy istotnej pracy odświeżyły mnie od wielu politycznych awantur, muzycznych sprzeczek i literackich obmów.

Mechanik Berthollon to niesamowity żołnierz, bardzo mały człowieczek jak Przyćmiony z Królewny Śnieżki, w płaszczu przypominającym płaszcz klauna, trzepoczącym obcasami, zakrywającym palce aż po paznokcie i zwieńczonym największym „ciastem” GUP-a, który przykłada do uszu. Ale pod tą złośliwą pogardą, którą dostraja w celu zirytowania przełożonych, błyszczy niebieskie oko pełne radości i psot. To złota rączka, która opowiada o technikach i zwyczajach kilkunastu branż, żywy przykład „Małego Wynalazcy”.

Wypowiadaliśmy się jako dobrzy sędziowie wiecznej ludzkiej głupoty. Berthollon szczerze wyznał, że głosował na bandę Bluma, że ​​był sławnym c... i że jednak bez wątpienia zrobiłby to jeszcze raz, gdyby tylko nadarzyła się okazja, bo nie można zupełnie nie być nawet przy krowach jak szefowie i że przebywanie w towarzystwie robotnika, gdy obiecano mu poprawę losu ludzi, jest niemal śmiertelne. Znajdowaliśmy się na nieco śliskim zboczu egalitarnych marzeń. Ale właśnie wszedł gość, mały Julien, biedak z Pomocy Publicznej, który od tego czasu wrócił do Internetu.

- Ja - powiedział - nie sądzę, że powinniśmy być równi i to dobrze. Wszystko jest zrujnowane, ponieważ jest zbyt wielu tych, którzy chcą być pierwsi. Umieszczono mnie w wieku dziesięciu lat. Nauczyłem się czytać i pisać w pułku. Nie wiem nic więcej. Jestem tylko służącą na farmie. Nie mogę stać się niczym innym i nie proszę o to. Wszędzie musi być góra i dół.

Wszyscy zgodziliśmy się co do tego godnego podziwu przypomnienia niezbędnej hierarchii.

Ci Dauphinois i ci Lyonnais, z natury pozytywnie nastawieni i sceptyczni, zachowują nutę zdrowego rozczarowania. Prawdziwi komuniści, przez których zrobiono ze mnie stracha na wróble w Paryżu, są bardzo rzadcy: nie będziemy gnić w „buffie”, kiedy wszystkie komórki was wołają przed wieżami fabrycznymi. Dwóch lub trzech Moscoutierów, których zauważyłem, jest podstępnych, rozważnych i udaje porządnych żołnierzy.

Mam wielką czułość dla moich przyjaciół piechoty. Wiem to od dawna: wojsko pozostaje jednym z ostatnich miejsc na świecie, które przywraca człowiekowi naturalną świeżość. Chłopcy z najgłupszych wiosek, z najbardziej śmierdzących fabryk, o ile są to co najwyżej zwykłe groby lub sierżanci, od razu nabierają folklorystycznego uroku. Odważny Alpine Ferrier zwierza się ze swojego smutku swojemu słomianemu sąsiadowi, Roussetowi, dobremu kapralowi, któremu zbyt dobrze udało się pracować w kuchni, aby go tam zostawić, i który w wieku trzydziestu dziewięciu lat został natychmiast przywrócony do posługiwania się bronią i odwracając się:

- Jako księdza interesuje cię moralność. Cóż, w tę niedzielę nie miałem pozwolenia, aby odwiedzić mojego przyjaciela z klasy średniej w Grenoble. Więc co ? Zachowałem się jak idiota. Upiłem się, przeleciałem starą dziwkę. Wszystko, czego potrzebujesz, aby zebrać trochę gorących sików. Oto, co oznacza uniemożliwianie żonatym mężczyznom chodzenia na zdjęcia z rodziną.

Znakomity Rousset zgadza się:

- Mój biedny staruszku! Wiem, że to niemoralne. Tylko oficerowie mają prawo do swoich żon i kurczaków. Ale czego ty chcesz! to wojna. Nadal będziesz szczęśliwy, jeśli na końcu nie zostaniesz zdradzony.

Nie mówię tu tylko o urokach tego malowniczego miejsca. Tutaj dusze obmywają się, odpoczywają od grymasów i odrętwienia pańszczyzny o chleb powszedni. Są nadzy i naiwni. Dla nich także jest to tablica rewizyjna. Zawsze nadawaliby się do dobrej służby Francji. Ciasto zostało zepsute, nie jest z natury złe. Ale to jest przaśne.

Niestety! gdzie by to dostała? Pewna liczba oficjalnych kretynów, literatów, starców o szlachetnych sumieniach, gdy mówią w Paryżu o morale oddziału, być może naprawdę myśli o wyobrażeniu, jakie ma on o swojej misji, o swoich przemyśleniach na temat dramatu, w którym zostaje rzucona . Na szczęście dla demokracji słynne „Dlaczego walczysz?” prawie nigdy nie ma miejsca pod mundurem. Ważne jest również, aby dodatkowa przekąska z porannych spacerów nie zniknęła ponownie, aby zwiększyć premię kapitana lub fundusz błotny tych świnek-kucharzy. Dwustu Francuzów, którzy ponownie włożyli mundury, niezależnie od tego, czy mają dwadzieścia, czy czterdzieści lat, zawsze będzie musiało opowiadać sobie wystarczająco dużo historii o oszukanych żandarmach, o pułkownikach przyklejonych do broni, o fałszywych pozwoleniach, o zwykłych kundlach, którzy zmoczyli pinarda, cierpliwie znosić ich poważne lub drobne dolegliwości. Ale potem ? Ale nadal? Dobrze ! Nie widzę nic poza szyderczym unikiem lub ogromną i niepokonaną biernością.

Na wezwanie białych plakatów przybyli mężczyźni, stare, dobrze oswojone konie bojowe, znający niejasne wydarzenie, również przekonani z doświadczenia, że ​​zawsze tak jest, że skromny Francuz tego stulecia jest miotany do woli. i ich kłótnie, w które próżno byłoby się wgłębiać. Bezczelne nierówności, które widzą, nie budzą w nich nawet ruchu buntu. Ta wiosna także z nimi jest zrelaksowana. Któregoś wieczoru z dwoma kapralami i ośmioma ludźmi staliśmy na straży w więzieniu, co było nudnym zajęciem wśród wszystkich innych. Około ósmej przyjechał kierownik placówki, sierżant taki sam jak pozostali, a przecież na samym czele witaliśmy tym samym słowem: „Cholera, mobilny wartownik!” Rzeczywiście miał rok, dwadzieścia sześć lat, był świeży i zamożny i od razu okazał się bardziej kłopotliwy i głupio arogancki niż dwunastu adiutantów razem wziętych. Byłem tak zirytowany, że około północy, kiedy po raz dziesiąty wszedł na podwórko, żeby sprawdzić mój pasek podbródkowy i pochwę bagnetu, rzuciłem mu paczkę w twarz pod księżycem: „Czy nie wstydzisz się tak niepokoić biednych? diabły, które mają trzydzieści pięć lat i piętnaście centów dziennie, skoro dostajesz osiemset dolców, nakarmione, zakwaterowane, umyte i sypiające z żoną, żeby nie walczyć, ty, żołnierzu zawodowym? Tylko ja byłem zdolny do tego startu, co wprawiło telefon w osłupienie. Ale cztery dni później, bo nie było u nas podoficerów, towarzysze celowo puścili wartę, nocowali w burdelu i dla większej pewności co do więźniów, zabrali ich ze sobą do suk, m.in. złowrogi, niemy szaleniec, dezerter przygotowujący się do narady wojennej, który dzień wcześniej rzucił się na wartownika z nożem w dłoni.

Brak dyscypliny jest wszędzie, nieuleczalny, zarówno podstępny, jak i absolutny. W szeregach uzbrojeni mężczyźni na końcu kolumny siedzą na skrzyni, na starej kanistrze po oleju, z ustami na ustach i karabinami między nogami, podczas odprawiania apelu. Obecność kapitana niczego nie zmienia.

Nagroda z pewnością trafia do dwóch nierozłącznych przyjaciół, jednego wysokiego, grubego, ciemnego, o ogromnym, bulgoczącym i spokojnym głosie, ubranego w wyblakłe niebieskie szmaty, pokrytego tłuszczem i sadzą, drugiego o spiczastym lisim pysku, całych sztywnych, żółtych włosach, przebiegłego , radosna i ostrożna, prawdziwa twarz fabliau w gigantycznym kapturze z gęsiej kupy, który prawie zamiata ziemię. Założyli tebaidę na tyłach szopy na drewno i węgiel. Spędzają tam piąty miesiąc drzemki, kudłaci, niesamowicie przeżuci, z ożywieniem łamiąc dwa polana dziennie dla przechodzących obok funkcjonariuszy. Nikt nigdy nie widział ich pojawiających się w szeregach z karabinem. Ale to wciąż nic. Od początku wojny dwaj bandyci każdego wieczoru wkradają się do pociągu, idą spać w swoim domu niedaleko Tullins, czterdzieści kilometrów dalej, i wracają wczesnym rankiem.

W każdą sobotę na protokół funkcjonariusze udzielają czterech urlopów całodobowych i warczącym głosem przypominają o gniewie zarezerwowanym dla przestępców. Żołnierze z półprzymkniętymi oczami i wygiętymi plecami z szacunkiem słuchają tej przerażającej przemowy: „Trzydzieści dni więzienia… Przekażcie latarnię… Bataliony dyscyplinarne… Natychmiastowe ustawienie się w kolejce”. Pół godziny później pięciuset Alpinów przepychało się na stacji, pięciuset innych stało z torbami u boku na dworcach autobusowych. W niedzielę z czterech batalionów Rzymian nie udałoby nam się zgromadzić siły połowy kompanii. I tak samo jest w Lyonie, w Paryżu, w Romorantin, w Issoire, w Szampanii, w Pikardii, w Gaskonii, w Poitou. Dwa dni w tygodniu jedna trzecia armii francuskiej wzbija się w powietrze. Żaden kodeks, żadna kara nie pokona tej spokojnej i niezwyciężonej fali niepodległości. Wszystkie siły policyjne we wszechświecie razem wzięte nie wystarczyłyby. Trzeba by wszystkie sztaby przekształcić w rady wojenne, wszystkie koszary w więzienia i przydzielić do ich straży pięćdziesiąt dywizji. W przeciwnym razie cała majestatyczna hierarchia wojskowa przymyka oczy na tysiąc pięćset tysięcy chronicznych przypadków nielegalnej nieobecności i dezercji w środku wojny.

W ten sposób armia Daladiera nieodparcie powraca do stanu demokratycznej hordy, bezkształtnych stad wszelkiej dekadencji, gdzie żołnierz-obywatel poddaje pod głosowanie porządek bitwy i wraca do domu, gdy zupa nie jest dobra. Wojskowe i cywilne władze Republiki milczą i drżą przed wyborcami w kolorze khaki. Nie jesteśmy w stanie ich bardziej ubrać, niż zapewnić im mieszkanie i rozmawiać z nimi, ale jeszcze mniej prawdopodobne jest, że będziemy im dowodzić.

Ta wojna jest tak niezrozumiała, że ​​już jesteśmy zdumieni, że ludzie chcą pozostać mniej więcej na swoich miejscach, nonszalancko powracając po swoich małych wędrówkach po wolności. Zostają, wracają, bo mają na barkach sto pięćdziesiąt lat „wojen ludowych”, obowiązkowej służby wojskowej. To dziedziczność, której nie pozbędziesz się w jeden dzień. Dziewięciu na dziesięciu Francuzów ma we krwi drugi zawód – broń. Ten atawizm uratował nas dwadzieścia dwa lata temu i nadal może uratować wiele rzeczy. Nadal konieczne byłoby, aby mężczyźni mogli wykonywać tę pracę, zamiast parodii, która jest wyświetlana na ich oczach.

Po pięciu miesiącach GUP, którego niebieskie książeczki ukazały się dopiero przez kilka ostatnich tygodni, po pięciu czy sześciuset wiecach, tylu telefonach i kilku tysiącach notatek, nasza kompania tworzy najbardziej szalonego, najbardziej heterogenicznego potwora, jakiego majaczący kapitan odzieży , jakie Ramollot dotknięty gorącą gorączką mógł sobie kiedykolwiek wyobrazić. Wiek waha się od dwudziestu dwóch do czterdziestu pięciu lat. Kroumirzy, którzy są w trakcie drugiej wojny, weterani klasy 36, którzy są na trzecim roku pod banderą, ścierają się z byłymi pomocnikami, którzy nie umieją stawiać bagnetów. Jedna trzecia siły roboczej składa się z grupy „niewykształconych” ludzi, których polilus nazywają armią Bourbaki lub nawet brygadą międzynarodową. Jest to zaskakujące zgromadzenie Ormian, pustych lub wzdętych zielonkawym tłuszczem, wyżartych przez hemoroidy, oftalmię, wrzody, odzianych w wystrzępione łachmany niczym wróbelowe strachy na wróble, dla których tracimy nadzieję nawet na naukę prawidłowego stania na baczność, a stare „alpini” ” i bersagliers z Piave, zaprawieni i pokryci ranami. Dodaliśmy rosyjskiego włóczęgę, któremu włóczęga nadała pozory życia, ale którego kolana i zęby wciąż szczękają, dwa gatunki hiszpańskich bandytów oraz długiego, suchego, siwiejącego i milczącego, chrupiącego mężczyznę z Alp Wysokich.

Dwudziestodwuletni kadet, czarujący, nieśmiały, wysportowany, w żołnierskiej tunice i niezrównanych spodniach Saumur, właśnie poniósł porażkę na czele armii Bourbaki. Rozkazuje, cały czerwony ze zmieszania i dziecięcej chęci chichotu, posługiwać się bronią Ormianom, którzy mają kolbę lebela na palcach, nieść w locie bagnet szablowy, plecak na stawie skokowym, podczas gdy Piemonckie pomruki podążają za tym ruchem ze śmiejącą się filozofią.

Zrezygnowaliśmy jednak z „instruowania” Bouboule’a, jedynego Ormianina, który zyskał popularność, ospowatego, przerażającego kalouche, wysokiego jak karabinek, ale szerszego od beczki pomyj, tłumaczącego przerażającym sabirem, jak nie wolno martw się i nie próbuj zrozumieć, Kazimierz naszego narożnika, podobnie jak on pomocnik kucharza ostatniej klasy, pełni funkcje, które pełni z ponurą godnością.


 

 


ROZDZIAŁ XVI

SZKOŁA WOJOWNIKA

Z wielką pompą zainaugurowaliśmy prace polowe, na mglistych łąkach, trzy, cztery kilometry od miasta. Wszyscy muszą pracować, ale na dwustu ludzi przypada sześć kilofów i cztery łopaty. Dziesięciu bohaterów losowo drapie ziemię, podczas gdy pozostali chowają się za krzakami. Wiąże się to z budowaniem lokalizacji karabinów maszynowych. Skrupulatny kadet krząta się i lamentuje, z miarką murarską w jednej ręce, podręcznikiem oficera piechoty w drugiej: „Czekaj! Czekać ! Potrzebujesz prostokąta o tak dużych wymiarach i tak dużej głębokości. Wkrótce aspirant, szczupły, blond i szczery młodzieniec, zostaje sam, wymachując kilofem, z potem na czole, z oskórowanymi palcami, w środku roześmianego i żywo zainteresowanego kręgu kopaczy, oraczy, drwali, którzy błogo kręcą swoimi ogromnymi kciukami nad brzuchami.

Kapitan przybywa, aby swoją obecnością usprawnić naszą pracę. Nie można sobie wyobrazić bardziej posępnego ganache, noszącego złośliwość i głupotę na twarzy starego rogacza z bólem żołądka. Wygląda na to, że kieruje losami firmy transportowej w Grenoble. Jest zapieczętowany osiemnaście godzin dziennie, wśród swoich dziesięciu skrybów, przed małą szkolną ławką. Pośród zawrotnego chaosu GUP medytuje nad formatem – model 52 bis czy 294? - na którym należy spisać stan pasów miski lub hydraulika cynkowego firmy. Ta farsa nie byłaby dla nas kompletna bez tego wcielenia najgłupszego przepisu, który przez nasz bezczelny pęd wędruje, co ważne, trzema bruzdami gniewu na czole.

W urzędowaniu jest „urzędnik” – powiedział mi w zeszłym roku znakomity radny Trochu. Chciałbym, żeby zobaczył naszego kapitana pełniącego służbę. To dla odpuszczenia moich militarystycznych grzechów, mojej łatwowierności i uporu muszę podlegać takiemu przywódcy.

Mężczyźni, którzy mają nieomylnego nosa do tego typu rzeczy, od razu zrozumieli, że główną sprężyną tego brzydkiego niedźwiedzia jest strach, i nadali mu imię „Ojciec La Chiasse”. Rzeczywiście, że żołnierze giną z zimna, ubierają się jak włóczędzy, że jedzą gotowane łajno, że kucharze haniebnie majstrują przy jedzeniu, La Chiasse nie przejmuje się tym, bo nikt nad nim nie raczy rozważać takich szczegółów. Ale fakt, że notatkę o spisie rymarzy i rymarzy spisano w pięciu egzemplarzach, a nie w sześciu, a tu on panikuje i szaleje, grożąc uwięzieniem, pobiciem i natychmiastowym odesłaniem w czoło. Jak większość ignorantów, druk go przeraża, godzinami pochłania egzegezę okólnika w sprawie przydziału pomyj, myśląc o wszystkich pułapkach, jakie musi kryć. Ma prawie sześćdziesiąt lat, jest na szczycie swoich rezerwistów, a jednak bardziej drży przed przełożonym, który w cywilnym świecie jest handlarzem nugatem, niż chłopem pańszczyźnianym przepychającym papiery, którego marność i z czwórki jego dzieci liczy na pobłażliwość dziesięciu szefów działów i piętnastu administratorów. Przybycie dowódcy batalionu wprawia go w trans. Przybycie generała z pewnością kosztowałoby go kilka kilogramów. Pokojowa anarchia ludzi, przeciwko której nie ma więcej środków niż samo Dowództwo Generalne, dręczy go chronicznym niepokojem. Zawzięcie to nadrabia, odmawiając wszelkich drobnych przysług, którymi przywódca może pozyskać swoich żołnierzy, karąc więzieniem zapalenie oskrzeli skrzywione kaszlem, który domaga się drugiej wizyty, wyrywając północne liście, które kilku uczciwych żołnierzy, najlepszych poddanych firmy, ma naiwność, aby złożyć swój podpis. Opóźnia o dwa dni wyjazd biednego, płaczącego diabła, którego córeczka umrze. Wzdrygamy się na myśl, że taki wstrętny idiota mógłby nadal dowodzić jakąś nieudolną rzezią pod ostrzałem, że inni równie głupi idioci z pewnością dowodzą gdzieś na Linii Maginota.

W tej chwili ojciec La Chiasse jest wśród nas, na miejscu i zajęty nauczaniem nas sztuki walki z akcentem pasterza krów. Ten Ubu, pośród tak wielu Ubusów, którym ta wojna nadała karykaturę władzy, okazuje się kompletny, nadmuchany ogromnym poczuciem własnej ważności.

  • Ja, który do ciebie mówię, jestem dowódcą kompanii w czasie wojny. To jest coś. Nie każdego można postawić na czele firmy GUP, trzeba umieć. Jestem zdolny. Ze mną dowiesz się czym jest wojna. Ponieważ jestem oficerem, który służył na wojnie. Nie jestem teoretykiem, bo niektórzy są. Chcę Cię skonfrontować z konkretnymi realiami.

Aby nam to udowodnić, ten realistyczny wojownik natychmiast rozpoczyna lekcję poglądową.

  • Teren, na którym się znajdujemy, pomoże Ci dowiedzieć się, jak przebiega walka. Muszę przyznać, że to źle wybrany teren, bo jest zbyt otwarty i gdyby z przodu był wróg, to od razu byśmy zeszli na dół. Ale będziemy udawać, że są nierówności do ukrycia. Chciałem zbudować sieć przewodową, żeby można było poćwiczyć przechodzenie pod nią. Ale nie ma drutu. Mogliśmy zrobić jazy z drzew na skraju, ale nie mamy pozwolenia na ich wycięcie. Zabrania się także wykonywania rowów ze względu na właścicieli. Ale możesz zastąpić to wszystko odrobiną wyobraźni.

I dokonujemy zdumiewającego manewru, w którym pozycje są reprezentowane przez linię laski, sieć drutu kolczastego przez napięty sznurek, karabiny maszynowe przez trzy kamienie, działo przeciwpancerne, słynne 25, przez gałąź drzewa. Trzydziestoośmiolatki skakały między tymi akcesoriami jak dzieci w grze w klasy.

Opuściliśmy tam szkołę myśliwską i nasze dziury po karabinach maszynowych nigdy się nie skończą. Od tej poważnej sesji kolumna, za każdym razem nieco cieńsza, opuszcza trzy popołudnia w tygodniu, prowadzona przez aspiranta, który trzyma piłkę nożną na wyciągnięcie ręki. Rozpoczyna się letnia gra pomiędzy dwudziestoma mężczyznami zaplątanymi w swoje duże buty. Pozostali garbią się w zagłębieniach, leżąc na plecach wznoszą toast za fajką, chodzą na kawę i czerwone wino do sąsiedniej farmy, która zamieniła się w kabulot. Rolnicy w milczeniu kontemplują tych żołnierzy grających w piłkę na pięknym polu pszenicy pozostawionym odłogiem z powodu braku rąk.

Gdybyśmy jednak chcieli, znaleźlibyśmy pożyteczną odskocznię od nudy i lenistwa, w jakie pogrążają się ci żołnierze. Nie ma człowieka, który nie byłby zainteresowany swoimi narzędziami wojennymi, nie angażowałby się w wyuczone spory na temat Hotchkissa, moździerza, VB. Zawsze jest dziesięciu ochotników na jednego, jeśli chodzi o demontaż i nasmarowanie jakiejś broni.

Ale nie mamy prawie nic. Nasze karabiny występują w trzech modelach, z czego połowa to śmieszne Grasy. Lufy są popękane, przyrządy celownicze skręcone, lufy chwiejne. Z takim wyposażeniem ominęłoby nas oddalone o trzydzieści metrów porte cochère.

Pułkownik zalecił ćwiczenia w wysokim stylu, z granatami cytrynowymi. Cały garnizon przejdzie przez nią kilka razy. W tym czasie będziemy poważnie podchodzić do nauki zawodu. Każdego ranka przez trzy tygodnie sierżant Jannez wyruszał z tuzinem chłopaków, aby kopać niezbędny rów i schronić się na wsi. Praca została ukończona. Treningi rozpoczynamy w najbliższy poniedziałek. Jednak teren został wybrany na tyle szczęśliwie, że piątkowy deszcz spowodował zawalenie się rowu. Jannez odchodzi ze swoimi robaczkami i kilofami. Osiem dni później schron się zawalił. Rzymska piechota nigdy nie pozna cytrynowego granatu.

W końcu zorganizowaliśmy ogień z karabinu maszynowego. Dotarcie tam zajęło zaledwie sześć miesięcy. Firma działa pełną parą. Mężczyźni są czujni, zachwyceni tą rozrywką. Z czterech karabinów maszynowych dwa okazały się bezużyteczne przy pierwszym strzale. Śmieciowe czasopisma, które dostaliśmy, zatykają pozostałe dwa niemal przy każdej serii. Jednak w jakiś sposób sesja trwa. Ormianie znajdują sposób na oddanie strzału na trzy metry przed sobą, wzniecając chmurę kamieni i grud ziemi, która ich przeraża; Stoją wymizerowani, napięci na spuście, strzelają wokół siebie, siejąc szaloną panikę... Nadchodzi moja kolej. Nigdy nie dotknąłem FM 24. Gdy tylko mam tę cudowną małą broń na ramieniu, czuję się jak nowy człowiek, niepokonany. O karabinie maszynowym, tak często pieszczonym w snach, przed niegodziwymi stadami Frontu Ludowego, platformami Bluma, Thoreza, Daladiera, La Rocque, złotymi gettami i Sodomami prawdziwie paryskich świąt! Sto dobrze wycelowanych karabinów maszynowych i oblicze Francji... Strzelam jak bóg, zachłannie, namiętnie, małymi, stałymi seriami. Mimo dwóch zacięć całą ładowarkę włożyłem do wizytówki. Towarzyszący mi dzielny sierżant Prat, celnik i łowca kozic, gwiżdże z podziwu. Chciałbym pobawić się karabinem maszynowym do wieczora. Zostałbym asem. Ale trąbka pojawia się nad nasypem przy suchym wietrze. To poborowy, który pod hełmem ma rozmiary i wygląd dwunastoletniego chłopca, 92-letniego dziecka-żołnierza:

Strzelałeś jak świnia!

Idź zobaczyć, idź zobaczyć!

„Chodź, dzieciaku! Wydmuchaj wszystko. Pokaż, że masz dwa. Nie oszczędzaj na biniou.

Podnieś koszulę, moja żono, to wszystko. Widziałem twój tyłek, wiem jak to jest...

Skończone. Po raz pierwszy i ostatni wystrzeliłem moje prawdziwe naboje wojenne.

Przeszliśmy małe, niewinne etapy po dwadzieścia, dwadzieścia pięć kilometrów. Z entuzjazmem odkrywam na nowo swoją duszę jako niestrudzonego pieszego, niezłomnej fantablosse. Spacer w lodowaty i różowy poranek, wdychając wibrujące powietrze pachnące dziewiczym śniegiem, ciało giętkie i ciepłe w potrójnej wełnianej skorupie, szum w ustach, duży karabin na ramieniu, wesoło kłusując, z kapturem rozpięty, z spoconymi plecami, pod palącym marcowym słońcem już w stronę farmy, gdzie będziemy pić świeżą pikietę, znam niewiele czystszych szczęścia na tym świecie.

Za każdym razem jest mi smutno, gdy nasza linia ulega dalszemu skracaniu. Jednak ci piechurzy roku czterdziestego naprawdę musieliby odbudować nogi. Wyniki naszych łagodnych testów są przerażające. Na dziesiątym kilometrze mamy już maruderów. Przy najmniejszej rampie zaciągamy się i zatrzymujemy jak mali staruszkowie. Wielu po powrocie pada aż do następnego dnia na brudną słomę, wyczerpane żebra i krwawiące stopy. Samochody, autobusy, motocykle musiały osłabiać chłopów tych zbyt bogatych ziem. Mieszkańcy miast są prawie lepsi.

Staram się odgrywać dobrego apostoła. Byłbym ostrożny, aby nie głosić gorliwości, której próżność odczuwam bardziej niż ktokolwiek inny, ale przywołuję to, co w naszej żałosnej egzystencji pozostaje zbawienne: „Nie siedź głupio i gnij w tej stajni. Na zewnątrz jesteśmy dużo lepsi. Przyjedź i przejedź się z nami. Ale ci mężczyźni, którzy zawsze motykowali, usychali, nosili ciężary, nie mogą cieszyć się wysiłkiem fizycznym tak jak ja. Nic innego nie mogło usprawiedliwić tego w ich oczach. Nie potrafią wyrazić szaleństwa tej wojny, prawie nigdy o niej nie mówią. Jednak doświadczają tego w sposób zdezorientowany. Uczy ich, że powinni robić jak najmniej. Byłoby nie do pomyślenia, żeby zaakceptowali to, gdy ja się staram, z miłości do sportu, ze względu na męską naturę, jaką mimo wszystko narzuca nam. Ich naturalną skłonnością jest ponura lub szydercza bierność.

  • Zobaczmy, dzieci! Krótki spacer, żeby rozprostować nogi! Nigdy nie wiemy, co się z nami stanie. Nie zaszkodzi trochę poćwiczyć.
  • Ach! cóż, możesz rozmawiać. Gdyby zobaczyli, że pracuję, mogliby mnie zapisać na kolejne wzmocnienie pękniętej rury.

Z pomocą dobrego księdza Rousseta, który na drodze ma wiele trudności, ale jest pełen odwagi, zdecydowałem się na dwa. Zaprzęgają się podczas jęków. Jeśli dzisiaj wieczorem zrobi im się kilka pęcherzy, będę skazany na jęki. Z ponad trzystu żołnierzy w szeregach jest nas trzydziestu. Inni będą woleli tarzać się w najbardziej obskurnych zakątkach, godzinami krążyć po naszym okropnym więzieniu, aby uciec przed ciągłymi i bezowocnymi polowaniami podoficerów. Strzelanie w dupę w gówno, szkoda, póki strzelamy w dupę. Brud i cuchnięcie w naszych stajniach są obojętne tym ludziom, z których większość jest tak brudna jak ich świnie.

Byłyby jednak wśród nas elementy nieco ciężkiego, ale solidnego oddziału: ci z „kanonu 25”, którym udało się zachować coś w rodzaju esprit de corps na naszym dziedzińcu cudów, niektórzy alpiniści, wciąż wspaniały rasa, długa i muskularna, o ile chów wsobny jej nie zniszczył, przewodnicy z Oisans, którzy rozpaczają w naszych mgłach równin, kręcący mężczyźni z Briançonnais, z Gapençais, urodzeni z drewnianymi listwami na nogach, chłopcy z miast południowego wschodu: pracownicy , robotnicy fabryczni, którzy umieli przedkładać sporty zimowe od anyżu i których do Quinze-Neuf przyciągały sekcje harcerzy-narciarzy, a nawet najmłodsi z naszych piemonckich murarzy. Ta elita wkrótce wyszkoli wszystkich, którzy nadal tu są, którzy są godni i zdolni do noszenia broni. Trzeba by jednak uwolnić go od gangu, od nudnej zwierzęcości, od tego ekstrawaganckiego ormiańskiego nonsensu, wyznaczyć mu jakiś cel, jakąś mniej lub bardziej spójną działalność.

Bardzo potrzebowalibyśmy przywódców wykazujących się odrobiną stanowczości, odrobiną wyobraźni i dużą dozą troski. Nadzór podoficerów rezerwy jest lepszy niż honorowy, młodzi profesorowie, ubezpieczyciele, grubo ciosani rolnicy, wyspecjalizowani robotnicy, opatentowani ze szkoły Haute-Montagne, do których dochodzą nasi przyjaciele alpejscy celnicy, biegacze szlaków, którzy nie nie mają już nic wspólnego z okropnym kierownikiem stacji Pratem, Rochasem o granitowych nazwiskach, wesołym sierżantem Rogerem, Katalończykiem szczycącym się listami. Wielu z nich ma umiejętności, finezję i pracowitość wykraczające daleko poza ich skromne paski. Oprócz kilku naiwnych buntowników i kilku grup, traktujemy ich wszystkich jak towarzyszy, a mimo to są najmniej posłuszni.

Ale nad nimi? Pracuję z polilusem, z instynktownej potrzeby porządku, z obawy przed demagogicznym rozluźnieniem, aby bronić lub wyjaśniać „rekrutów” i oficerów. Korzystam z najmniejszej okazji, żeby powiedzieć: „Widzisz, z tym swoim krowim spojrzeniem, przynajmniej się nami opiekuje”, albo nawet: „Jeszcze bardzo mili są ci biedni mali gnojki kadetów”. Mężczyźni patrzą na mnie i wzruszają ramionami. Przypominam im nagle, że jestem tylko jednym z nich przez przypadek, że jestem burżujem, kimś, kto ma wykształcenie, a to zaleta, której nigdy nie pozwolą przypisać jakiejś szczególnej sprawności umysłu. , ale dla przywileju tych, którzy mieli czas i pieniądze, żeby bawić się książkami. Rękawy w kształcie obręczy tworzą dla nich inny świat, zamknięty i wrogi, od którego nie oczekują w żadnym wypadku niczego dobrego.

Muszę przyznać, że moi „podopieczni” nie ułatwiają mi zadania. Mówiłem o naszym kapitanie, którego chętnie zostawiam na pastwę jowialnej lub ciemnej pogardy wszystkich. Nasi kandydaci starają się robić, co mogą. Te uczciwe białe dzioby są zbyt śmiesznie nie na miejscu wśród zrzędów, którymi jesteśmy, zbyt nieśmiałych i niezdecydowanych, aby żołnierze mogli darzyć je jakimkolwiek szacunkiem. Mamy wśród nas czterdziestoletniego podporucznika z medalem wojskowym, Le Guinilho (nie gwarantuję pisowni), którego wszyscy nazywali najpierw „moim adiutantem”, bo reprezentuje typ najzdolniejszy, że rzeczywiście nim był aż do początek wojny. Nigdy nie zauważa tej pomyłki. Nie przyzwyczaił się do swojej rangi, a nieliczni jego powiernicy wiedzą, że posiłki w mesie go męczą. Trzymany jest na siłę w naszym magazynie i tam nudzi się śmiertelnie. Podoba mi się jego bretońska twarz ze stalowymi oczami pod beretem. Oto prawdziwy żołnierz, z którym chętnie poszedłbym pod ostrzał. Ale mężczyźni są bardzo obojętni na te artystyczne rozważania. Nie wykraczają poza homeryckie słownictwo Le Guinilho, a usta nieustannie wypełnione głośnymi przekleństwami są dla nich kwintesencją fasoli.

Chorąży Bertet, także zawodowy narciarz o doskonale opalonej twarzy, byłby być może w innym systemie wzorem inteligentnego i ludzkiego oficera. Ale najwyraźniej nie ma złudzeń co do naszego szalonego życia w koszarach i jest po prostu znudzonym i nonszalanckim urzędnikiem państwowym.

Rzeczywiście jest komandor Thorand, sto dziesięć kilogramów w myśliwskiej kurtce, masoński dygnitarz i radykalny bonze, cieszący się dość dużą popularnością. Powiedzmy, że kultywuje to zapraszając kierowców, kucharzy i sanitariuszy, aby napili się z nim pernodu przed Tout-Romans, u Fayeta. Będziemy mieli pewne trudności z uczynieniem go setnikiem naszych marzeń.

Na drugim biegunie komandor Guglielmi, znany jako Spada, były korsykański kapral, zielonkawy, bardzo mały, z wgniecionym i połamanym kepi w stylu siedemdziesiątki, dużymi czarnymi wąsami palikare, w których gubi się jego twarz.kamienny patois, praktycznie niepiśmienny, o Courtelinie tak doskonałej, że aż trudno w nią uwierzyć. Wyśmiewany przez całą załogę, oddalający od otaczającej go pustyni o sto metrów, samotnie przechadza się z jednego końca miasta na drugi, ze swoim stłumionym powołaniem chaoucha, bez końca zadając sobie w głowie naiwne i zawzięte pytania o te nadrzędne rozkazy, które go teraz powstrzymują, biorąc brutalną zapłatę na pijaka lub nowicjusza, który nie jest na tyle wykwalifikowany, aby zbłądzić na jego drodze.

Pies z sąsiedztwa, który kiedyś był, mógł wywołać uśmiech. Staje się odrażający, gdy wciąż poluje, sześćset kilometrów od linii, na których umierają cywile w mundurach. Jeśli Spada jest zbyt ograniczony, by powierzyć mu tysiąc ludzi do walki, czy jego sytuacja nie jest jeszcze gorsza? Kim są żołnierze, którzy stają się bezużyteczni w dniu, w którym wystrzeliwuje armata?

Wciąż mamy tego okropnego kapitana M..., także najbardziej zawodowego wojownika, który od sześciu miesięcy kręci się w biurze kadr, któremu udało się wypędzić po kolei trzech oficerów rezerwy wyznaczonych na jego miejsce. We wszystkich biurach pełno jest trzydziestopięcioletnich chorążych, analfabetów, dobrze odżywionych i w przeważającej mierze znakomitych, którzy za wysoką płacę prowadzą kampanię między szewcami a kompostownikiem.

Nie, to nie są ludzie, którzy ponownie staną się żołnierzami w tak sceptycznym i schyłkowym stadzie, jakim jesteśmy my.

Łączę to, co obserwuję wokół mnie, z wieloma historiami już zasłyszanymi, z tymi, które codziennie docierają do nas z czterech zakątków Francji. To już naprawdę nie jest kwestia malowniczych legend i wesołości batalionu. Coś pękło w hierarchii armii francuskiej. Zasada. niezastąpiona i tak piękna sama w sobie, podporządkowanie militarne gra przeciwko rzeczywistym wartościom. Załamała się sztywna dyscyplina ze wszystkimi jej niezbędnymi elementami. Ale to, co je zastąpiło, jest gorsze od najbardziej niesprawiedliwej brutalności. To bariera klasowa, to uprzedzenia społeczne niesione przez mundurowych. Pomiędzy szeregowcami i wszelkiego rodzaju oficerami, generałami, oficerami, podoficerami zawodowymi, zbyt często występują stosunki proletariatu i burżuazji, dużych, średnich i małych, biednych i opętanych, a nie między autorytarną władzą i brutalnie triumfujący sposób, ale na modłę demokratycznego kapitalizmu, zdegradowani pracownicy, tchórzliwi szefowie, ale zamknięci w swoim egoizmie i wąskiej arogancji, gniewie, nienawiści i ignorancji, bardziej niż kiedykolwiek oddzielających oba obozy.

Któregoś dnia usłyszałem niedaleko siebie, u Fayeta, kilku bardzo młodych oficerów, którzy opowiadali o wojsku, synach bogatych fabrykantów lub kupców z prowincji, najwyraźniej absolwentów szkół średnich. Pierwszy powiedział: „Tak, zapewniam, że wśród drugiej klasy zdarzają się czasem bardzo dobrzy ludzie”. Pozostali głośno krzyczeli, jakby z powodu czegoś anarchicznego. Mali głupcy, ale to niepokojąca metoda, taka jak edukacja wojskowa, która może pozwolić im na swobodne myślenie.

Nie chcę niczego przeceniać ani uogólniać. Ale wokół nas i setki moich towarzyszy rozproszonych z północy na południe jest oczywiste, że oficerowie nic nie wiedzą o naszych prawdziwych potrzebach, zarówno fizycznych, jak i moralnych, i nie robią nic, aby je odkryć. Znam dobrze pewnego kapitana myśliwych, byłego notariusza, dzisiaj na froncie, jestem pewien, że potrafi patrzeć na los swoich małych futrzaków, nie po to, żeby je rozpieszczać, ale mieć je w ręku, temperament ich, zjednocz ich, uczyń z nich wojowników. Nie chcę wątpić, że tak właśnie jest na szczycie koszyka armii francuskiej. Ale znowu połowa tej armii to bezkształtna masa. To ta, którą znam i o której tu mówię. Przeraża mnie ogrom jego ciężaru własnego. Co nie może zaważyć na losach kraju?

W tym torfie zasadą jest bezwładność. Widziałem męskie. Sytuacja ich przywódców jest nie mniejsza. Dają się ponieść kaprysowi nieprzewidzianych zajęć rekreacyjnych, zapominając o kłótniach biznesowych i małżeńskich, bardziej naiwni niż żołnierz w rozdziale o zwycięstwie bez bitew, ponieważ źle się je czyta i ponieważ znają truizmy, szczegóły techniczne i liczby. Rezultatem jest ogromna głupota życia w koszarach, w którym już nawet nie wykonujemy ćwiczeń.

Zatrzymuję się od kilku dni, z niemal regularnym zezwoleniem, u pana Barnarat, który prowadzi dużą i lepką kawiarnię w centrum Rzymian. Dzielę tam ciemną ruderę, idealną jednak w pobliżu GUP, ozdobioną aktami kobiet wyciętymi z Paris-Flirt, z moim przyjacielem Moutonem, szewcem z Saint-Vallier, który ma udaremnioną, ale nieustępliwą ambicję zatrudnienia się u mistrza szewc.

  1. Barnarat, pochodzący z Lyonu, jest wspaniałym typem demokratycznego obywatela. Jego rozkład dnia zasługuje na małą narrację.

Wstając około dziewiątej, pan Barnarat zaczyna raczyć się dwoma lub trzema kuflami białego wina. Około wpół do jedenastej spogląda na zegarek i stwierdza, że ​​nadszedł czas na poważne aperitify. Człowiek zasad i zasad, ma swoją markę Pernod, którego wybór był owocem długiego doświadczenia, które przywozi z daleka i które jako jedyny pije w Rzymianach, gdzie robimy kilkanaście przemyślanych anyż. Wypija pięć lub sześć szklanek do około wpół do pierwszej, kiedy łamie chleb i odkorkuje trochę Beaujolais. Lunch oczywiście nie będzie dobry bez dobrego pół szklanki Marca lub Armaniaku. Pan Barnarat pozwala sobie na małego drinka z klientami, dopóki nie pójdzie na grę w bule, która zajmuje mu większość popołudnia. Do bule obowiązkowe jest krajowe czerwone wino. Nie udało mi się osobiście oszacować liczby garnków, którym Pan Barnarat składa hołd, ale ufam mu, zwłaszcza że gra w kręgle ulega zmianie. Nie mówię oczywiście o dniach mistrzowskich, gdzie gardło naszego bohatera wymyka się wszelkim statystykom.

Około szóstej wieczorem pan Barnarat wraca do swojej kawiarni. Czeka tam na niego grono wiernych przyjaciół, aby celebrować szczyt dnia, wielki, prawdziwy i uroczysty aperitif. To moment, w którym pan Barnarat chętnie rozpoczyna opowieść o swojej ostatniej kampanii, którą odbył we wrześniu jako porucznik straży kolejowej pomiędzy Saint-Vallier a Saint-Rambert d'Albon. Po trzech tygodniach został odesłany do domu, a jego gorycz wyraża się każdego wieczoru o dziewiątej w czwartym kieliszku jego Pernodu. Bo nie muszę mówić, że pernod przewodniczy sesji. Przysięgam, że pan Barnarat nie będzie wolny, dopóki nie opróżni swoich dziesięciu szklanek, z których woda stanowi najmniejszą część, a stół wspólnika nie stawi mu dzielnie czoła. Każdy ma swój ulubiony rocznik Pernod, ale puree absyntowe ma ten sam kolor we wszystkich kieliszkach. Tylko jeden z rycerzy tego nie czuje. Dręczony wnętrznościami trafił do lekarza, który powiedział mu: „Usuń swoją pernodę”. Od tego czasu przeszedł na mandarynkową czerń. Muszę powiedzieć ze względu na historię, że z całego towarzystwa on jest zdecydowanie najbardziej maltretowany, jego twarz w kolorze wina, śliniąca się, ręka drżąca, z bólem otwierając podkrążone i ospałe oko, z pobłażliwością oskarżaną o mniej niż czterdzieści pięć lat.

Ton staje się gorący i pogarsza się. Popychając mężczyznę z mandarynką, z której kapie ślina, pijący stają naprzeciw siebie, skazując się wzajemnie na złą śmierć. Pan Barnarat krytykuje nietolerancję religijną w obliczu krawca, który odpowiada szaleńczą przemową na temat zwycięskiej kwadratury w wielkanocnych zawodach w kręgle w 1925 roku.

Pijemy rundę pojednania około dziewiątej lub dziesiątej! Nierzadko zdarza się, że ceremonia trwa aż do północy, ani że dochodzimy do piętnastej lub dwudziestej pernody. Pan Barnarat idzie zjeść zupę z kawałkiem odpowiednio posypanej kaszanki lub trawieńca. Na koniec, przed zamknięciem drzwi, opróżnia wraz z ostatnimi klientami kilka par dobrze narysowanych połówek, które przyjemnie miesza z jedną lub dwiema szklankami do piwa, chyba że korki od szampana pękną na cześć donośnej „Fanny”, mistrzowskiej piękności lub inne wspaniałe wydarzenie.

Muszę wyznać, że ten wybitny eklektyk mógł wkroczyć w lata sześćdziesiąte z czujnymi źrenicami, wciąż lekkimi nogami, nonszalancką sylwetką i gęstymi, lśniącymi włosami. Widzieliśmy jednak, że oszczędza siły. Jego żona, wstająca o świcie, nie śpiąca od piętnastu godzin i pijąca tylko wodę mineralną, na zmęczonych plecach i zwiędłej twarzy nosi na swoich zmęczonych plecach i zwiędłej twarzy wszystkie stygmaty chorób oszczędzonych jej panu i panu. [2]

Ledwo nawiązałem przyjaźń, a ona popada w ruinę. Zamieniłem z tym odważnym człowiekiem kilka gorzkich i budujących słów. Dwie godziny później chcę podnieść wątek. Zamiast wystawnie spokojnego mędrca znajduję marionetkę, która beka mi w twarz. Mój dobry przyjaciel Cléry, kapral, filozof nocy, kiedy był cudownie trzeźwy, szybko dał się poznać jako chroniczny pijak. Badot, czuły marlou, może mu dotrzymać towarzystwa. Magnat, kapral-widmo, znaleziony na dnie wiejskiego więzienia, żyjący nie wiadomo ile dekalitrów, to tępe zwierzę, od którego nie dostajemy dziennie dwudziestu zrozumiałych słów. I ten, i ten...

W przeszłości chłopi być może trzymali się aramonu, pozostawiając robotnikom i pracownikom miejskim przywilej destylowanych bistouilles. Ale równość została osiągnięta, upodobania się połączyły. Ludzie w ciągu dwudziestu minut zapijają się na śmierć czymkolwiek.

Nasze kwatery są zapełnione alkoholowymi odpadami, zdegenerowanymi, odrzuconymi, zgwałconymi karłami, wśród których przypadkiem znajduje się nasza jedyna dwójka Marsylianki, dwie podłe ludzkie szmaty. Ci nieszczęśnicy, ugotowani już w łonie matki, są tak przemoczeni i wyniszczeni, że po wypiciu trzeciej kwarty wina zataczają się, wymizerowani. A mimo to dolewają swoje osiem i dziesięć litrów dziennie. Na ich zabłoconych spodniach wczorajsze wymiociny łączą się w fioletowe smugi z wymiocinami z poprzedniego dnia. Na ich oszołomionych twarzach gnomów sania zbija się w skorupy wraz z błotem strumieni, w których została zebrana. Są przerażające i żałosne. Ale koszary kręcą żebra. Nie ma postaci bardziej popularnych i jeszcze bardziej podziwianych.

Każda pogawędka niezmiennie zamienia się w opowieści o tyradach. Jedyne pamiętne wyczyny to rekordy dla brutali, dwadzieścia pięć pernod, trzy litry wytłoków na dwie osoby. Anyż połykamy w zwartych przecierach, w pełnych szklankach, z odruchem wymiotowania pomiędzy każdym łykiem. Jest to ponury i mechaniczny występek w całej swojej głupocie.

Wygląda na to, że alkohol spalił ich sok. Wiem, że biffe nigdy nie był ulubieńcem Camp Venus. Ale dla miłośników militariów nie można sobie wyobrazić doskonalszego raju niż ulice Rzymian, gdzie kręci się chmara eleganckich i gorących małych robotników. Niezależnie od konkurencji ze strony grupy balonistów ozdobionych zniewalającą czapką, okazja jest niezliczona i szesnastoletnie suki przybywają, aby ożywić żołnierzy nawet na budkach wartowniczych. Jednak pary są rzadkie, a zabawa jest bardzo platoniczna i bardzo letnia wśród potwornej czkawki pijaństwa. Nawet przy zrywaniu pasów mężczyźni wyrządzają mieszkańcom znacznie mniej krzywdy niż w piwnicy. Wypicie shota jest mniej męczące niż zastrzelenie... Już sam wysiłek szarpnięcia staje się nadmierny dla nerek tych, którzy się poddają.

W tym tygodniu miałem kilka godzin prawdziwej przyjemności, podczas których odzyskałem wszystkie orzeźwiające uroki armii.

Wyruszyliśmy na około trzydziestokilometrowy spacer. Brama kantonu otwierała się na naszą kolorową kolumnę, która nigdy nie była tak długa. Chociaż raz wyrzucono wszystkich próżniaków i wygląda na to, że wszyscy dobrze się bawią. Uciekamy na cały dzień od zarazy barów i naszych stajni.Poranek jest suchy i wietrzny, tempo trochę ciężkie, trochę wolne, ale solidne. Ormianie wykrzykują monotonne i egzotyczne piły, dziwne „Apres de ma blond” tej wojny, ale kłusują na moje słowo! jak osły. Dziś rano, bez zbytniego przyglądania się i przy odrobinie optymizmu, moglibyśmy niemal wziąć ich za jakichś żołnierzy.

Pokonywaliśmy od piętnastu do osiemnastu kilometrów bez użycia zbyt wielu kul. Zawsze tak myślałem. Niech ludzie będą wstrząśnięci, niech idą ramię w ramię, a zostaną zbawieni. Przez zarośla i rowy zaczyna się manewr, tak klasycznie nieczytelny, jak to tylko możliwe. Motyw przewodni zaprojektował nasz znakomity kapitan. Zrobił to tak po mistrzowsku, że atakujący, który miał forsować pozycje, po pięćdziesięciu metrach ataku pobiegł na pełnych obrotach, podczas gdy dwudziestu napastników goniło go zawzięcie, a większość ruchu oporu czekała na jego powrót. odwracając się do niego plecami. Dostaliśmy paczki czystych naboi. Wykorzystali to i natychmiast zastrzelili kapitana. W czterech zakątkach horyzontu szykuje się atak odwrotny, który zrujnuje całą strategię. Nieważne. Biegamy, skaczemy, zaczerpniemy świeżego powietrza.

W szopach sąsiedniej wsi czeka na nas gorąca zupa przywieziona vanem. Napełnialiśmy puszki przy bramach niektórych gospodarstw. Cztery piętnastoletnie dziewczyny popisują się na rowerach, a od siwowłosych po te z klasy 36, firma patrzy tylko na te pary nagich łydek. Jesteśmy grupą uczniów, którzy doświadczają fizycznej radości płynącej z ćwiczeń płuc i mięśni, a nawet odkryli, że to, co zwyczajne, jest możliwe.

Mała półgodzinna drzemka i znowu ruszamy. Funkcjonariusze rozmawiają jednak za zamkniętymi drzwiami. Sprzedawca kawy nigdy nie zabił fantabossa. W mgnieniu oka w sześciu bistrach tego miejsca zapełnia się tłum. Funkcjonariusze trawią. Przystanek się dłuży, kufle zapełniają stoły. Pijemy na biesiadie na środku ulicy, pijemy siedząc na chodnikach. Oficerowie w końcu zyskują sedana, delegując nam obrotowego kadeta. Pod ich hełmami siedzi stu pijaków. Musisz wrócić do domu z rękami, ciągnąc za najbardziej dojrzałe kolana. Za innymi, zygzakiem i krzykiem, podążamy trzykilometrową drogą. Towarzystwo w końcu wróciło do chlewu, zataczając się, czkając, po syciu się każdego wieczoru.

Jestem przepełniony zmęczeniem. Nic już nie jest w stanie jej odstraszyć. Przybyłem do wojska, przywożąc ze sobą dość zabawny bagaż, mój gust amatora życia wojskowego, a raczej dyletanta. Widzę zgorszoną minę profesjonalistów wszystkich szczebli, gdy spotykają się z tym słowem. Ale każdy daje tyle, ile może. Nie mogę dać i nie moja wina, impulsu patriotycznego. Nie bez trudu musiałem odłożyć na półkę mój patriotyzm, ponieważ zakłada on jedynie pokój i żąda go. Mój dyletantyzm jest o wiele bardziej użyteczny niż prawie wszystko, co widziałem wokół siebie: apatia, lenistwo, podstępny bunt. Wystarczyłoby mnie odpowiednio przygotować na pewną liczbę ewentualności, niebezpiecznych zarówno dla kraju, jak i mojego małego człowieka, i nie widzę, aby można było ode mnie wymagać więcej. Ale jestem bardzo dobry w usprawiedliwianiu tego dyletantyzmu. Musimy wierzyć, że on sam jest nadal zbędny, ponieważ nie znalazł jeszcze najmniejszej pracy.

Jest bardzo zniechęcony i tak naprawdę niewiele mi już zostaje poza nudnymi myślami, które powracają: giniemy na tej wojnie jak ludzie uwięzieni w piasku, nie da się z nią walczyć, tym bardziej nie da się od niej uciec To.

Czasami spotykam w kawiarni Fayet uroczego małego aspiranta Gruffaza, który pochodzi z Zouaves. Ma dwadzieścia trzy lata. Jest wiernym czytelnikiem naszych gazet. Był zagorzałym monachijczykiem i antyżydem, co nie przeszkodziło mu, Sabaudii, być zachwyconym powrotem do Alp. Zawdzięczam mu moje ostatnie próby esprit de corps. Jest odważny, niecierpliwy w stosunku do ryzyka i jednocześnie sceptyczny. Ale kiedy chcę go zaciągnąć w stronę najokrutniejszych świateł, on się wymyka. Nie może znieść pozorów tej rzeczywistości.

Wciąż w Fayet słyszę o nowych kadetach i młodych podporucznikach, którzy przybyli szkolić „bluesa”. Są to bez najmniejszego niuansu kazuar, białe rękawiczki, rany i guzy oraz rogi myśliwskie. Nie sposób nie uznać ich za przerażające. Krzyczeliśmy do nich: „Wojna”, a to brzmiało na ich skórze jak pałeczki w oślej skórze. Ani atomu pomysłu za tym słowem. Ich głowy to echa, bębny. Bez nich jednak nie byłoby armii, są dla ojczyzny najlepszym narzędziem podboju lub obrony. Tak, ale w tej wojnie nie mamy czego bronić ani podbijać. Mamy wrażenie, że bez tych dumnych szpaków absurdalna przygoda nie byłaby możliwa. I wcale nie jest to taki uproszczony pogląd.

W mniej lub bardziej spójnych wojnach przypadek taki jak nasz GUP był jasny. Albo zajezdnia stała się nie do zniesienia i ludzie nadal woleli życie na froncie, albo dominował strach i utknęli w zajezdni. Tym razem skład jest bardziej ohydny niż kiedykolwiek, ale dawne życie ledwo istnieje. Kandydaci są podekscytowani: „Nie możemy się doczekać, kiedy pójdziemy na baroud!” Co za przygoda, moje dziewice? Sto nabojów spalonych po obu stronach Renu? Sytuacja na Blies bez zmian? Więzień, którego wzięto na oczach Forbacha? Sposób, aby zafascynować się tymi burleskowymi, ceremonialnymi symulakrami! Czy tam nie widzimy głupoty naszego zespołu jeszcze lepiej niż tutaj? Mężczyźni czasem mówią: „Idzie wiosna. Wielki cios może nastąpić.” Ale bez większego przekonania i ja ze swojej strony w nic w to nie wierzę. To wciąż wspomnienia, które nosimy z poprzedniego. Fritze nie są szaleni. A co do nas, do ataku, mały!

Ale to, co z pewnością istnieje za Renem i Mozelą, to inne składy, inni gnijący żołnierze i te ponure, żółte równiny, te stłumione wioski, te przemysłowe smrody dorzecza Briey lub regionu Metz. Chodźmy ! nie ma uzasadnionego powodu, aby poświęcać im łóżko pana Barnarata.

Jednak tutaj jest kilka nowości. „Armata 25” zostanie wystrzelona po raz trzeci, ale wydaje się, że zdecydowanie ta właściwa. Będzie ono wzmacniane przez około trzydziestu naszych najmłodszych dzieci. Podporucznik Le Guinilho dowodzi oddziałem. Mężczyźni są zajęci, polerują się, rozmawiają z nutą żartobliwej próżności. Podczas tych przygotowań znów pojawiła się niewielka gorączka. Pamiętam wielki wyjazd 2. Żuawów w 1915 r. do mojej wioski, gdzie doszło do reformy, mężczyźni w nowiutkich, żółtych butach, które były znakiem wspinaczki ku śmierci. Miałem jedenaście lat. Jak bardzo chciałbym podążać za Żuawami! Szczerze mówiąc, GUP staje się nie do utrzymania. Czym będzie bez „25”, które utworzyło jedyną komórkę, która była jeszcze trochę męska? Poprosiłem Le Guinilho, żeby mnie zabrał. Szydzi mi prosto w twarz: „Myślisz! Mam rozkaz nie zabierać nikogo powyżej klasy 28”. Nie dodaje, ale łatwo się domyślić, że ja też jestem w jego oczach rodzajem intelektualnej gry w kółko i krzyżyk i że nie będzie się tym zawracał sobie głowy: „Swoją drogą” – kontynuuje – „my” Najpierw jadę do obozu, a jeśli chcesz karabin, być może będziesz tam przed nami. Cały GUP ucieka. Jesteście wyznaczeni do wzmocnienia pionierów w strefie wojskowej”.

Ach! Barca! pozwól mi być pionierem, jeśli los chce. Co więcej, z gazet zaczął tchnąć powiew kryzysu ministerialnego, który szybko odciągnął mnie nawet od dział przeciwpancernych. Delektuję się ledwo ukrywanymi wyznaniami tej konsternacji, która nas mści. Hej ! ich wojna dobiega końca i to nawet szybciej, niż myśleliśmy. Gorycz kłótni mówi wszystko. To mafia sprzecza się w obliczu nowego „eksperymentu”, który zmierza w najgorszym kierunku: eksperymentu Maginota po eksperymencie Bluma. Teraz miło jest wznowić ledwo schłodzone przemówienia o niewzruszonym postanowieniu, o szlachetnym wyrzeczeniu się sporów partyzanckich, o jedności moralnej narodu w dążeniu do zwycięstwa. Jeśli chodzi o popisywanie się swoim spadkiem, ta dieta nigdy nie zawodzi. To nawet zawsze przekracza nasze oczekiwania. Osiem miesięcy po podjęciu najbardziej przerażającej decyzji w naszej historii rząd zmienia zdanie i upada. Dobrze zrobiony ! nie spodziewaliśmy się tego tak szybko. Zapisy podłości i groteski zostały zniszczone.

Kandydaci walczą niewzruszenie: „Ach! powiedzmy, podwójne działa przeciwlotnicze 13/2 milimetra? Ach! stary, ile to musi być pracy? I w oddziale na otwartej przestrzeni! Mów o hicie! Taragadagada!” Chciałbym wymachiwać im pod nosem liśćmi dziennymi: „Ale czytajcie dalej, głupcy! Zajmijmy się poważnymi sprawami. Więc w końcu zrozum, że wszystko zniknęło!” Nie mogę już znieść naszej farsy wojskowej. Chciałbym wezwać wszystkich, aby byli świadkami czystości moich najnowszych proroctw. Cenzura jest przeciążona. Jest także publicznie oskarżona w Izbie Reprezentantów, w prasie, przez Frossarda, który znakomicie piorunuje. Głosimy szyderstwo z naszej propagandy. Obwiniamy haniebną rozpustę naszego radia. Rozpada się żałosny karton mitu Daladiera. Marksiści SFIO żądają dostępu do władzy. W ósmym miesiącu wojny chłodno rozważano powołanie nowego ministerstwa Bluma. Zobaczmy! kto nie rozumiał? Kto by się jeszcze odważył przyznać kopiejkę kredytu tym niesławnym wycieraczkom i udawać, że za nimi możemy maszerować do zwycięstwa? Co gorsza, Finlandia ulegnie, to tylko kwestia godzin, a demokracje nie wysłałyby nawet batalionu. Ach! gdyby ten niesławny wodewil mógł zakończyć się jakimś parlamentarnym bałaganem! Ale byłoby tak pięknie.

Chciałbym być w Paryżu. Irytuje mnie brak prawdziwych wiadomości, tych, które nie są drukowane. Zmieńmy chociaż szybko miejsce. To może sprawić, że poczekam kilka tygodni.

Na szczęście nie mam już zbyt wiele do czekania. „Canon de 25” wyruszył na obóz szkoleniowy w Granville w Normandii. Dziewięciu na dziesięciu mężczyzn było przekonanych, że Granville jest na froncie. Poruszali się jak do bitwy. Trzy czwarte z nich było pijanych jak cholera. GUP skaził nawet ludzi zajmujących się armatami. Trudno będzie usunąć z nich piętno.

Pojutrze nadeszła nasza kolej. Ale już wiemy, że daleko nie zajdziemy.

ROZDZIAŁ XVII
5 / 440 PIONIERZY

Jesteśmy na dobrej drodze do strefy wojskowej, ale w kierunku Alp. Śmieszność jest wiernie związana z moimi krokami jako żołnierza.

Przynajmniej odkryłem po drodze cudowną dolinę Drôme, którą wstydzę się ignorować do tej pory. O ósmej rano ma całe światło, ochrę, błękit i srebro, wartości Corotów we Włoszech; także ich projekt, stare południowe cytadele, małe spiralne wioski, pierwsze cyprysy na otwartej przestrzeni, kasztanowce i dęby ostrolistne przylegające do spokojnych wzgórz. Wkrótce linie, zawsze tak czyste i wyraźne, stają się bardziej udręczone. Zbocze wzgórza staje się górą, błękitne i szybkie Drôme staje się potokiem i mówi o śniegu, który zasłania horyzont. Natura działa na wyobraźnię i rozpieszcza wszystkie swoje fantazje. Kolosalne i harmonijne piargi, wąwozy, klify, wąwozy, szczyty, każdy zakręt ścieżki to nowa niespodzianka. Niebo łacińskie jest pokryte ze wszystkich stron dziwnymi i eleganckimi skałami. To krajobraz, który spełnia wszystkie moje upodobania, Południe i Alpy, szlachetność krainy już prowansalskiej, ale wzmocnionej liryzmem, który nieporównywalnie porusza ducha.

Zdecydowanie chodzi o liryzm! Jedziemy do Briançon, aby wzmocnić 5. batalion 440. pułku pionierów, hybrydę starych piechurów i saperów. Nasz los w dniach ostatecznych był zależny od dwudziestominutowych, stanowczych i sprzecznych rozkazów. Prawie zostałem „pełzającym” lotnikiem, strzelcem maszynowym, akrobatą. Potem, dla pionierów, byłem ostatni na liście, w „awansie”, z sześcioma marynarzami, dwoma fryzjerami i mechanikiem. W ostatniej chwili skreślono kopaczy, fryzjerów, mechanika i dziennikarza definitywnie i starannie dobrano do pułku robotników ziemnych.

Zabraliśmy ze sobą Marsylię, pracownika kolei z Hautes-Alpes w służbie cywilnej, co najmniej w trzecim pokoleniu alkoholika i najbardziej odrażającego pijaka żołnierza GUP, który został nam przekazany, abyśmy pozbyli się go Rzymian. Jego ostatnim wyczynem trzy dni temu było zwymiotowanie na mundur kapitana, który właśnie go odebrał, o północy, zupełnie pijany, w strumieniu. Marsylia, prawdziwa kupa błota i kudłate, żółtawe włosy, została wczoraj uwieczniona właśnie tym dialogiem z komandorem Thorandem, który na baczność dokonywał inspekcji naszego oddziału.

  • Marsylo, czy nie wstydzisz się poniżyć się do tego stopnia, tarzać się po ziemi jak zwierzę?
  • Mój szef twierdzi, że mam dość bycia idiotą.
  • Hej ! mój Boże ! odpowiada Thorand, jeśli wszyscy jesteśmy tutaj głupi, czy nie wiesz, że to z powodu Hitlera?

Piąty batalion 440 mieści się w jednym ze skrzydeł koszar Berwick, dawnej kwaterze 159. batalionu. Witający nas pionierzy mają dobre, spokojne, dobrze odżywione głowy, klasyczny typ „dziadków” z 1915 roku. Spotykamy płaskorzeźbione postacie, przypominające handlarzy i pasterzy, z rzecznymi brodami, bissacami, pielgrzymami, maczugami w dłoniach . To miejsce emanuje rustykalnym spokojem.

Zadajemy pierwsze zwykłe pytania.

  • Mówi się nam, że nie ma wiele do zrobienia. Wszystko byłoby w porządku, gdyby nie Boudier. To dowódca, woźny w staniku w życiu cywilnym. Nie chodzi o to, że jest złym facetem, ale nie możemy trafić lepiej. Zrozumiesz. Przychodzi, żeby cię zrecenzować.

Komendant Boudier, trzeba przyznać, to kompozycja niezwykle udana. Beret na uchu, laska pod pachą, galijski wąs z końcami uniesionymi w stylu houzarde, lekko wysklepione uda, trąbiący głos, wiatrówka przekreślona piętnastoma dekoracjami, to prawdziwy Flambeau z czterema strunami. Krótki akcent, szorstki i serdeczny, jest arcydziełem. Prowadzi nas tak, jakbyśmy jutro mieli przekroczyć Świętego Bernarda.

- Żołnierze, przybywacie z równiny. Jesteś teraz u granic ojczyzny, twarzą w twarz z wrogiem. Przyszedłeś bez broni. Ale to nie ma znaczenia. Jesteście wojownikami łopaty i kilofa. Będziesz stoczyć tę ciężką walkę z całym męstwem naszych tradycji.

Natychmiast kontynuuje:

  • Czy jest wśród Was puzonista?

Cisza w szeregach.

  • Kim są niektórzy z Was, muzycy? Oczywiście nie proszę o pianistów!
  • Wychodzi dwóch, trzech chłopaków.
  • W co grasz?
  • Tłok, mój dowódco.
  • Zawsze jest to samo. Wszyscy grają na tłoku. Nigdy nie będę miał dość klarnetów i puzonów. Ach! Jakie to nie do zniesienia, dobry Boże drewna!

Wreszcie zgodził się zapytać o nasze zawody, aby podzielić nas na bitwę o kopalnię i roboty ziemne.

Robi to z „małym kapralem”: „Twoje imię, a ty?” i szczypie mnie w ucho. Zrezygnowałem z wszelkiej delikatności, ale znajomość tego Gaudissarta-Ratapoila przyprawia mnie o ciarki.

Berwick to piękne, przestronne kamienne baraki z prysznicami, niezliczoną ilością umywalek, centralnym ogrzewaniem w całym budynku, iście nowoczesne rozwiązanie. Kuchnia w naszym skrzydle, inteligentnie nadzorowana przez rzeźnika z Wiednia i cukiernika z Grenoble, jest bardzo uczciwa. Moglibyśmy prowadzić bardzo przyzwoite życie. Niestety mężczyźni przywieźli ze sobą swój inwazyjny brud. Nasze wspaniałe budynki są brudne i cuchnące jak port nad Morzem Czarnym. Nadal wydaje się, że pionierzy ulepszyli dom. Przy odjeździe Quinze-Neuf usunęliśmy cały pociąg śmieci. Armia francuska jest niepokonana.

Przydzielono mnie do 1. kompanii, kapitana Bardonecchii, wraz z około dziesięcioma innymi Rumunami. Starsi gratulują nam: „Macie szczęście. Bardonecchia, to jest ktoś. I nie ma lepszego.”

Pomimo swojego wyglądu kapitan Bardonecchii jest postacią silnie plebejską, rumianą i krępą, o masywnej budowie. Rzeczywiście jest jednym z małych lordów Briançonnais, ale w stylu stulecia i reżimu. Jest nauczycielem, SFIO, aktywistą i głównym doradcą SFIO

Largentière, miasto przemysłowe piętnaście kilometrów stąd. Oddajemy go za posła z góry ustalonego, gdy tylko będą wybory. Wita mnie głośno.

  • A więc to ty, słynny Camelot du Roy, współpracownik Maurrasa i Daudeta, piszesz artykuły, w których funkcjonariusze krzyczą na siebie? Zrobisz mi przyjemność, idąc prosto tutaj.

Ale to musi być tylko sposób na popisywanie się, pokazanie, że zna swój świat i przypomnienie galerii o sile swoich przekonań, bo od razu z serdecznością kontynuuje:

  • Czyż nie jest smutno na to patrzeć! Dziennikarz, który od razu waży sześćdziesiąt pięć kilogramów przemoczony, kiedy potrzeba trzydziestu tragarzy... Co możemy zrobić z tym odważnym dziennikarzem? Czy wkładamy go do zbiornika do przeładunku, czy wysyłamy do kopalni? Chodź, koronujemy go na nieletniego. W ten sposób poradzi sobie z dużym ołówkiem.

Nie mogłem prosić o lepsze. Kopalnia znajduje się na samym szczycie Briançon, tuż pod gigantyczną i przeciętną Francją Bourdelle. Mówimy o tym z wielkim szacunkiem. Biali jak kurz żołnierze, którzy spóźniają się na zupę, mają wyniosłe i głośne żądania: „To nie wszystko. Czekamy z utęsknieniem na kucharzy, którzy będą nam służyć, i to z przytupem. Wracamy z kopalni, cała reszta. Wspinam się więc tam z jednym z fryzjerów i ogrodnikiem. Przepełnia nas zapał i ciekawość, głośno brzęczą maszyny na sprężone powietrze, kable, rury, kilofy zaśmiecają ziemię. Budową kieruje około dziesięciu inżynierów. Mężczyźni też to prawie wszyscy saperzy ubrani w niebieskie kombinezony.

Kopalnię tworzy szereg chodników wykutych w skale. Taki przynajmniej plan musieli sporządzić inni saperzy, z kilkoma paskami. Tak naprawdę galerie, po jakichś sześciu miesiącach pracy, nadal są w stanie bardzo skromnych nisz. W tym, w którym będziemy pracować, nie ma prawie czterech ludzi. Panuje całkowita niepewność co do możliwości wykorzystania tych otworów.

Wiercimy komory kopalniane w skale młotem pneumatycznym, wielkim ołówkiem kapitana, wypełniamy je dynamitem i wysadzamy w powietrze. Już pierwszego ranka awaria maszyny pozbawiła nas młotków i trzeba było przeszlifować kilka kamieni. Drugiego dnia walczymy młotami. Jesteśmy w tym tak wprawni, jak drwal w robieniu koronek. Trzeba trzymać te trzydzieści gorączkowych kilogramów na wyciągnięcie ręki nad głową i sprawić, by zużyte folie wgryzały się w granit niczym stare gwoździe kaloszy, a wszystko to w chmurze kurzu i pod wrzaskami dwójki młodych ludzi zgromadzonych przed geniuszem. Nie ma sensu mówić, że nasze wyniki są raczej znikome. Najważniejsza to wibracja, którą trzymam w kościach aż do połowy nocy. Wreszcie trzeciego dnia, przy pomocy saperów i żołnierzy, wysadziliśmy nasze miny. Triumfalnie zbieramy gruz, który wystarczy na zasypanie trzech hełmów.

Wraz z nami przybył od Rzymian prawdziwy górnik Orcat z kopalni Mure. Właśnie zdaliśmy sobie sprawę, że praca furmana, do której został przydzielony, być może tylko niedokładnie odpowiadała jego umiejętnościom. Orcat zostaje wysłany z nami do kopalni. To silna głowa. Śmieje się swobodnie z naszego sprzętu i naszej techniki: „No cóż! dzięki temu nie jesteś spłukany. Stąd jesteście na drugą stronę góry. Mówię wam, niedaleko. Zebrani na nowo sierżanci odpowiedzieli gorzko. Wywiązał się ostry spór. Zgłaszają to adiutantowi, który idzie po porucznika. Orcat flegmatycznie wyjaśnia, jak trzeba wiercić tu i ówdzie, aby szybko przewiercić kilka metrów. Daje się mu jednak silne poczucie, że robotnik nie zacznie zmieniać przepisów najbardziej wykształconego korpusu armii francuskiej. Orcat zrozumiał. Nas też. Jeszcze nie w kopalni mamy poważne pęcherze. W ciągu pięciu godzin pracy ładujemy i pchamy pół tuzina taczek, zasypujemy połowę pieca. To tempo musi być bardzo normalne, bo od tej chwili nikt nam już nie będzie przeszkadzał.

Najważniejszym wydarzeniem każdej sesji jest czytanie Petit Dauphinois, którym wołacz wspina się na nasze szczyty. Daladier zatacza się, Daladier leży na ziemi. Mam nadzieję, że kryzys będzie jak najdłuższy i najcięższy. Dużo rozmawiam z Orcat, którego lubię. Ma twardość szorstkiego proletariusza i alpinisty, ze starą, agresywną przeszłością chłopaków z Isère, „pożarników wilków”. Dla Orcat sytuacja jest bardzo jasna. Wypowiedziano wojnę, aby móc ubrać ludzi w khaki i zamknąć im usta. Jego pogarda dla całego reżimu jest taka, że ​​przy całej jego brutalnej naiwności czuję się z nim znacznie bliższy niż z wieloma paryskimi szlachetnymi umysłami i burżuazyjnymi ludźmi. Ale ku jego obrzydzeniu nie zasiano niczego poza komunistyczną propagandą. Bez jego przyznania się do tego możemy się domyślić, że hasła jego celi pozostają jego jedynym katechizmem.

W ciągu dwudziestu czterech godzin Daladiera zastępuje niesamowita służba Reynauda. Nadal, jak wszyscy inni, mam obsesję na punkcie wybryków polityki wewnętrznej. Zapominamy, że nie ma nic ważniejszego poza wolą Londynu i że pod wpływem angielskiego podżegania do wojny miękkiego łajdaka zastępuje twardy łobuz. Z zaciśniętymi pięściami znieważamy ministerstwo w stylu Bluma, które przywraca nam nieszczęsny mały Reynaud: dwudziestu dwóch ministrów, trzynastu podsekretarzy stanu, przywróconych do pracy socjalistów. Jakim symbolem jest ta Blokada, główna broń, wielka demokratyczna nadzieja, której służba przypada jednej z najbardziej idiotycznych marionetek Frontu Ludowego, Georgesowi Monnetowi! Jeśli Frossard tak zaciekle walczył przeciwko informacjom, to dlatego, że przyglądał się tej pozycji. Właśnie to dostał.

Dla futrzaka szczegóły wydarzenia są niejasne i obojętne. Mimo wszystko być może dostali przypływu nadziei, gdy zobaczyli ponowne pojawienie się Bluma. Reszta nie ma znaczenia: „To jest to samo”. Nie ma sensu ich indoktrynować. Są nieskończenie bardziej uważni na absurdalne błędy, które dzieją się z jednostkami, a oto najnowszy z nich: Daladier w porozumieniu z Gamelinem oszczędza życie poilu, ale Laval jest krwiopijcą, który planuje ataki, aby wywołać wielki ofensywa. Jak możemy im wytłumaczyć, że obrażają w ten sposób jednego z dwóch lub trzech mężów stanu, którzy potępili tę wojnę, jedynego, który być może mógł jej uniknąć?

Nie wierzę, że skandal gabinetu Reynauda może trwać. Prasa jest bardzo wrogo nastawiona. Chcę podsycić nowe nadzieje, tę klikę trzeba zmieść. Reynaud uzyskuje większość głosów w Izbie po Bóg jeden wie, jakim fałszerstwem. Kto odważyłby się w środku wojny nazwać to wotum zaufania, aby nadal świętować jednomyślność narodu? To miażdżące wyparcie się. Niech Izba się upłynni, niech ministerstwa upadną na siebie. Nie kontynuujemy wojny większością głosów uzyskaną poprzez sabotowanie urn wyborczych, zniekształcanie kart do głosowania, jak podczas wyborów na Gwadelupie. Wszyscy inni politycy uciekliby. Ale ten bandyta z Reynaud jest najbardziej cynicznym z bractwa. Nie przestaje wygłaszać aroganckich i zrzędliwych tyrad.

Action Française jak zwykle dymi na pustyni. Wszyscy wzdrygają się, przerażeni przewidywanymi konsekwencjami kolejnego upadku, wymyślając powody, aby uznać to spotkanie idiotów i łotrów za możliwe, a nawet godne pochwały. Bez wątpienia sytuacja jest nadal szokująca i nieprzyjemnie bezprecedensowa. Ale my jesteśmy w stanie wojny, panowie. Czy nie powinniśmy być posłuszni żądaniom patriotyzmu? Z patriotyzmu zjednoczylibyśmy się za Murzynem, za Ferdynandem Lopem. Ach! kraj eunuchów!

Chcąc nie chcąc, wracam do życia Pięć Czterystu Czterdziestu.

Ponieważ składa się z quasi-terytoriów, z których wiele siwieje, komandor Boudier stworzył dla siebie taki obraz, że ma pod ręką starą gwardię chrząkających, twardzieli i musi nas wszystkich widzieć pod pozorem doświadczonych grenadierzy. Ale ta fantasmagoria jest dla niego ściśle osobista.

W GUP Rzymian mogliśmy mieć nadzieję, że się z tego wydostaniemy lub że w melasie tego skrzyżowania pojawią się jakieś nowe pierwiastki. Pięć czterysta czterdzieści jest jeszcze bardziej zniechęcające, ponieważ jest ostateczne.

Oprócz niezniszczalnej miny, magnum opus batalionu to droga nad brzegiem Guisane, pięć minut od koszar. Charakteryzuje się tym, że prowadzi donikąd i jest w każdym razie wyjątkowo zbędna, ponieważ po drugim brzegu, do którego prowadzi most oddalony o kilka kroków, biegnie przejezdna ścieżka. Od początku wojny otwarto dwieście metrów drogi. Aby to zrobić, zaczęliśmy od dna gąbczastego i rozpadającego się pagórka. Dokonują się tam straszne ataki. Każdego ranka wszystko grozi jeszcze większym zniszczeniem i to cud, że nie znaleźliśmy jeszcze góry, drogi, kopalni i kilkudziesięciu pionierów na dnie rzeki. Ale nasi ludzie zrozumieli to tak dobrze, że kilof stał się wydarzeniem w ich drużynie.

Resztę zajmujemy się pilnowaniem kilku tajemniczych posterunków i zajmowaniem się codziennymi sprawami utrzymania. Pomijając kucharzy i trzech lub czterech skrybów, jeśli pięciuset ludzi batalionu zapewnia dwieście godzin efektywnej pracy dziennie, jest to z pewnością rekord.

Zapomniałem o muzykach! Komandor Boudier jest fanatycznym miłośnikiem podwójnych kroków. Stworzył muzykę na co najmniej czterdzieści instrumentów. Do melodii Sidi Brahima, Pan Pan l'arbi, Boudin de la Légion oddycha i bije przez cały dzień epos Cinq-Quatre cent quatre. Dowódca, który dociera do swojego biura, zatrzymuje się pod oknem, gdzie ryczy mosiądz, i z pięścią na biodrze, z wąsami wznoszącymi się ku niebu, uśmiecha się dumnie do mijającego snu, jak w chromie Détaille’a.

Ogromny czworobok koszar, poza naszym batalionem, wypełniony jest resztkami różnych jednostek. Pod nami stoją dwadzieścia cztery trąby artyleryjskie, olbrzymie dwudziestodwuletnie chłopaki, lepiej ukryte niż na wysepce w Polinezji. Naprzeciwko niezliczona ilość mułów z batalionu fortecznego, prawie wszyscy poborowi, resztki dwóch batalionów myśliwych, pułku okręgowego, po drugiej stronie ulicy nie pamiętam już która kompania poza szeregami. Każdy żyje z rękami w kieszeniach, spędzając dziesięć godzin na peklowaniu muła, zbierając dwa tuziny puszek puszek dla pana Reynauda, ​​który wykuje „zwycięską stal”, piłując taczkę z drewnem do kuchni.

Jeśli chodzi o broń, wśród nas, pionierów, teoretycznie mamy naręcze broni i muszkietów w każdym wieku, którymi niewątpliwie ryzykowalibyśmy zrobienie sobie krzywdy, ponieważ są trzymane pod kluczem w sklepach. Arsenał ten uzupełniają dwa nieużywane karabiny maszynowe z 1916 roku.

Podstawowym zadaniem stało się zbieranie mleczy. Od południa do zmierzchu całe kompanie rozsiane były po polach. Z anchois i jajek na twardo robimy sałatki pantagruelskie. Na wszystkich drogach widzimy sznury strzelców maszynowych, saperów, artylerzystów, tringlotów z workami nabrzmiałymi zielenią. Cała armia Alp zostaje zmobilizowana do zbierania mleczy.

Wreszcie, żeby odpocząć po tych trudach, pijemy w pokojach, w kuchniach, w kantynie podoficerskiej, gdzie rozładowujemy ciężarówki z aperitifami, w chatce, w bistrach dworcowych, Route des Sanas, de la Gargoyle, de la Citadelle. Obsesja na punkcie wina trwała nadal. Teraz w każde południe wracamy z kopalni z pełnym białym winem. Wkrótce poznałem najsłynniejszych pijaków. Ich wyczyny składają się na niestrudzenie śpiewany gest. Rzymskie likiery Pernod były wyrafinowane w porównaniu z tymi wysokoalpejskimi chamami, którzy wiecznie śmierdzą kadzią piętnaście kroków dalej. Sanitariusz w biurze jest gotowy każdego ranka o ósmej i nie jest jedyny. Cały korpus wartowniczy przedwczoraj upił się i tarzał po ziemi. W mojej sekcji dostojny Chiron nie był pusty od dziesięciu dni. Wśród innych fantazji ten pan, gdy jest w swoim pokoju, zygzakuje po podłodze, zanim uzbroi się w miotłę.

Przykład, to prawda, pochodzi z góry. Nasi oficerowie i dowódcy, kapitanowie oddziałów twierdzy byli niewątpliwie godnymi podziwu żołnierzami podczas drugiej wojny. Wszyscy to robili w dywizjach alpejskich, wśród myśliwych, w Quinze-Nine, w Stu Czterdziestu, a wtajemniczeni wiedzą, co to oznacza. Ale dzisiaj, zbliżając się do pięćdziesiątki lub już po pięćdziesiątce, uważają tę nową kampanię za dla nich czas wakacji. Kadetów jest dość, żeby wygrać, bo w koszarach jest ich pełno. Jest to dla nich wielka radość wojskowa. To ich kolej.

Móc. Ale z pewnością są bardziej budujące widowiska niż te weteranów, z których niektórzy muszą być dziadkami, którzy biegają za żonami swoich podoficerów, nawet dziewicami z Briançon, ocierają się brzuchem o brzuchy w salach tanecznych, w przed publicznością złożoną z żołnierzy, pępki platynowych mięczaków, bici publicznie przez zniesmaczone lub uczciwe młode damy, chodzą po ulicach naszego miasta, bijąc mury.

Jedną z kompanii naszego batalionu dowodzi malutki kapitan basset hound, były bohater batalionu myśliwych, który przedstawia się następująco: „Jeden metr pięćdziesiąt cztery, siedem cytatów, trzy rany”. Nie boi się popisywać każdego wieczoru w La Chaumière, modnym klubie w Briançon, bawiąc się w czymś w rodzaju niedźwiedziej polki, którą sam zrobił, w ramionach monumentalnej moukère, której głowa sięga jej piersi, podczas gdy jego przyjaciel B. ..pije szampana pomiędzy dwiema dziewczynami. Któregoś dnia dwaj przyjaciele przybyli do sąsiedztwa, pijani jak cholera. Aby nikt nie był nieświadomy, w tym stanie poczuli potrzebę przeglądu wartownika, kołysali się przez pół godziny po dziedzińcu, obrażając się, całując, trącając się po żebrach i ramionach, pod okiem setka zachwyconych polilusów tłoczyła się pod oknami.

Tylko jeden ze znanych mi funkcjonariuszy stanowi wyjątek od tego upadku. To jest nasz kapitan z Bardonecchii. Żołnierze, którzy śpiewali nam jego chwałę, są dobrymi sędziami. To nie tak, że darzę wielką sympatią tego nauczyciela, który wepchnął się w wody reżimu. Jest trochę Homais retuszowanych w stylu Bluma. Robi z nacjonalistów dziecięcego stracha na wróble. Wciąż jestem zdumiony prymitywnością i pomieszaniem idei u tego człowieka, który zrobił prawdziwą karierę w polityce i którego cały kanton konsultuje i podziwia jako światło mądrości. Deklaruje, że szanuje wszelkie przekonania, rzekomo po to, by oczyścić komunistów z zarzutów, ale bezkrytycznie potępia całe prawo do stanowiska. Cnota przekonania prawdopodobnie nie mogłaby dla niego istnieć bez wiary w nieśmiertelne zasady.

- Więc Rebatet - krzyczy do mnie, przyjdź i opowiedz mi trochę o swoim Maurrasie, tym draniu, który obraża ludzi w ich życiu prywatnym.

Albo znowu: „Ty, który jesteś z Action Française, musisz lubić hitleryzm?” Nie sposób mu wytłumaczyć, że Action Française jest wręcz przeciwnie, ślepą i maniakalną germanofobią i że wyglądam na heretyka. Dla de Bardonecchii jestem zarówno monachijskim zdrajcą, jak i strasznym podżegaczem wojennym. Oto jeden z mężczyzn wybranych na głowę dzieci, który może stać się w Izbie jednym z arbitrów naszego losu.

Ale kapitan Bardonecchi jest tutaj jedynym oficerem, jakiego widzimy na placach budowy. Pomimo swojej Legii Honorowej i cytowań jest antymilitarystą. Przez całą drugą wojnę walczył w 52. Pułku Piechoty z odwagą, ale z uczuciami, które dobrze rozumiem. „Poilis byli wzniosłymi bohaterami i męczennikami” – powiedział. Ich przywódcy byli imbecylami, generałowie ganachami i zabójcami. Mówi to przy każdym żołnierzu i niewątpliwie się myli. Ale on jest trzeźwy. Jest przy swoim zadaniu od siódmej rano do siódmej wieczorem, znacznie mniej wśród papierów, które czyta lub podpisuje, niż z peleryną na plecach i butami na nogach, biegając tam i z powrotem po dolinie.Błoto i deszcz. , odwiedzając, że tak powiem, pracowników i usuwając stanowiska z jego firmy. Najwyraźniej obdarza swoich wyborców w Largentière łaskami. Ale czuwa nad zdrowiem, morale i zaopatrzeniem wszystkich. Wie, jak kłócić się ze skamielinami i handlarzami prowizji, aby dostać całą rację tytoniową dla swoich ludzi. Codziennie sprawdza kuchnie. Nie są mi nieświadome wady i obowiązki nauczycieli. Nienawidzę ich bigoterii i tępyej próżności. Ale w całej kampanii znałem tylko trzech mężczyzn, którzy sumiennie wykonywali swoją pracę jako oficerowie wojska. Jeden z nich to nauczyciel z Bardonecchia, pozostali dwaj nasi aspiranci do Rzymian, także nauczyciele. Ci antymilitaryści będą bardziej uczciwymi i pożytecznymi żołnierzami niż burżuazyjni oficerowie, krzyże ognia i Delédiens.

Mam czas wolny, żeby studiować kapitana Bardonecchii. Po kilku tygodniach pracy w kopalni i piłowaniu drewna zatrudnił mnie w biurze swojej firmy. Praca nie jest łatwa. Dzięki nieskończonej gamie wysokich wynagrodzeń, dodatków i skal kalkulacji wojskowych doszliśmy do arcydzieła Chinoiserie. Dzienna płaca każdego człowieka lub prawie wykazuje różnicę 0 franków w stosunku do pozostałych. 374 lub 0 fr. 843. Dodaj do tego ciągłe zamieszanie na urlopach, chorych, żyjących i oderwanych. Pożyczka to rozpaczliwy ból głowy. Dobry sierżant sztabowy

Crozier, tak skrupulatny i uporządkowany, który w cywilu prowadzi całą księgowość dużej firmy filmowej, sierżant Brochier, nauczyciel biegły w arytmetyce, kapral Chovin, agent ubezpieczeniowy w Valence, nie mogą się pogodzić z końcem po sześciu dniach pełnych nieustanna praca, nierozerwalne przesunięcia, dodania poziome i pionowe, na setkach kolumn, oszałamiające czeki, w których zawsze znajdujemy 9 fr za pierwszym razem. 43 w nadmiarze, 17 fr na sekundę. 27 w dół. Wszystko po to, aby po królewsku dawać mężczyznom średnio szesnaście, siedemnaście centów dziennie.

Służę tym zrozpaczonym kalkulatorom moją pomoc, która jest słaba i grozi na zawsze pomieszaniem ich groszy. Zajmuję się głównie kartami indeksowymi. Całą firmę położyłem na kawałkach kartonu. Mam do bezpłatnego dyspozycji książeczki rejestracyjne, z którymi związany jest słynny obowiązek regulaminowy, jaki pełnią poborowi po przybyciu do korpusu. To piękne spojrzenie na naukę Francuzów. Trzy czwarte obecnych tutaj mężczyzn w wieku dwudziestu lat było praktycznie analfabetami i nie potrafiło napisać dwudziestu słów, które dałoby się rozszyfrować. I ich wiedza o naszym kraju! „Richelieu był wielkim generałem, który żył w czasach królów. Sekwana wodami Paryża, Nantes i Tuluzy”. Wyniki są dobre w przypadku edukacji bezpłatnej, świeckiej i obowiązkowej. Jaki postęp zrobiły od tego czasu te biedne diabły? Nauczyli się czytać „L'Humanité” i „Paris-Soir”. Zastanawiamy się, co te wydruki mogą reprezentować w ich mózgach. Tak, byłoby sto razy lepiej, gdyby ludzie byli szczerze i całkowicie niepiśmienni.

Przy okazji tworzę też ciekawe statystyki. Mamy co najmniej dwudziestu pięciu mężczyzn na stu pięćdziesięciu, którzy pomiędzy pobytem w szpitalu a pobytem w szpitalu, urlopem na rekonwalescencję, urlopem wypoczynkowym, urlopem siewnym, urlopem okolicznościowym nie przepracowali trzydziestu dni pracy w ciągu siedmiu miesięcy. batalion. Połowa kompanii była tam zaledwie od stu dni. Jedna z dwóch rzeczy: albo naprawdę potrzebujemy wszystkich zmobilizowanych, i wtedy mamy do czynienia z haniebną niegospodarnością, demagogicznym sabotażem armii; albo nie ma takiej potrzeby, a dyslokacja i paraliżowanie narodu jest zbrodnią.

Ten szalony stary Churchill prawie całkowicie zastępuje wielebnego Chamberlaina. Wściekli podżegacze wojenni stają się mistrzami. Ministerstwo Reynauda ma jednak kłopoty. Wygląda na to, że nie dajemy mu trzech tygodni życia.

Deszczowy Chamberlain dał do zrozumienia, że ​​blokada Niemiec nie przynosi oczekiwanych rezultatów i należy rozpocząć nową politykę wojny gospodarczej. Przypomina to dziwnie NEP Lenina, pauzę Bluma, wyznania wszystkich niepowodzeń, którymi rozrzutni byli teoretycy niemożliwego. Mieliśmy więc rację co do bezsensowności blokady, jak co do reszty. Obecnie dobrze wykazano, że Anglia od siedmiu miesięcy próbuje zamknąć niemieckie porty, udając, że kontynuuje swój handel, i że Rzesza tankuje pod nosem przez dziury, które w ten sposób toleruje. Jeśli chodzi o zaostrzenie blokady, aby dokonać tego wielkiego dzieła, o chwała, o nadziejo, jak widzieliśmy, wyznaczyliśmy ze swojej strony wiejskiego idiotę, Georgesa Monneta.

Możemy się śmiać, gdy dowiemy się, że ci panowie spotkali się w Londynie na dużej radzie międzysojuszniczej, aby „poszukiwać sposobów zintensyfikowania wojny”. Czy możemy lepiej przyznać, że nie wiemy, jak wielokrotnie powtarzałem, od czego przyzwoicie rozpocząć tę wojnę? Tak gorąco pragnąć konfliktu, wreszcie go utrzymać, a w ósmym miesiącu wielkiej krucjaty wciąż ograniczać się do poszukiwania pola bitwy!

Ale tutaj jest bardzo duża petarda. Z wielką pompą alianci ogłosili, że ich cierpliwość się kończy i że „postanowili zakazać niemieckiej żegludze korzystania z norweskich wód terytorialnych”. W tym samym czasie dowiedzieliśmy się, że w Skagerak i Kattégat właśnie założono miny.

To wciąż pozory, środki dodatkowe, jedyne, jakie mamy w mocy i które chcą, żebyśmy uznali za niezbędne.

Na cześć operacji fanfary angielskie i francuskie atakują pieśń wielkich ofensyw. Ale pierwsze uderzenie w talerz wciąż wibruje, gdy niemiecka odpowiedź nadchodzi błyskawiczna. Nie zajęło to dwudziestu czterech godzin. Jest 9 kwietnia. W jeden poranek Dania jest okupowana. W ciągu dnia dowiedzieliśmy się, że Wehrmacht jest w Oslo, w Stavanger, w Bergen, w Trondhjem, w Narwiku, czego zaskoczeni poszliśmy szukać na samym szczycie mapy, za kołem polarnym. To zdumiewające. Ale jest to również bardzo proste. Wystarczyło, że demokracje zakazały Niemcom dostępu do norweskich wód, aby swastyka natychmiast popłynęła tam jak u siebie. Zuchwałość i szybkość wroga są olśniewające: jak na Nadrenię, jak na Wiedeń, na Pragę, na Warszawę, jak wszędzie. Ach! Nie myliłem się. Tu leży siła i duch. Jak nie podziwiać tych Zygfrydów, którzy pojawiają się w środku błyskawicy, popychając stojaki na parasole, bukłaki od whisky i małych bazardierów z Londynu i Paryża?

Radio dzwoni jak dzwon koronacyjny. Potępiamy atak, jakbyśmy go nie sprowokowali, kibicujemy Norwegii, którą dzień wcześniej wzywaliśmy z ultimatum. Szybkość Hitlera jest dowodem jego paniki i straszliwego ciosu, jaki właśnie został zadany Niemcom. Człowiek w gabardynie, jak mówi akademik Mauriac w jednym ze swoich melodyjnych kazań, w desperacji rzuca się na zamknięte za nim drzwi z brązu.

Ale sprawa staje się coraz poważniejsza. Flota Macierzysta wyrusza w rejs, eskadry francuskie kierują się na północ. Ach! Ach! tym razem demokracje nie zostały złapane bez zieleni. Tym razem na grzmot Hitlera odpowie grzmot Prawa.

W naszych barakach panuje wielkie podekscytowanie. Całymi sekcjami, przed bramą osiedla, wypatrujemy kioskarzy, którzy przyjeżdżają w paczkach papieru i od razu zostają okradzieni. W stołówce wokół radia gromadzą się gromady futrzanych ludzi. Nie podoba mi się to. Dlatego też pewnego ranka gazety ogłosiły zdumiewającym nagłówkiem: „Pan Churchill staje się głównym animatorem wojny”. W tym polarnym stroju rozpoznajemy piętno starego apoplektyka, niespokojnych Dardaneli. Ale czy to zwierzę rozpocznie prawdziwą wojnę? Ta niemożliwa do zrealizowania wojna, choć irytująca, miała swoje dobre strony. Dezintegrowała ministerstwa, dzień po dniu demonstrowała niemoc tych wszystkich osłów. Ale znaleźli sposób, aby zmusić marynarkę do działania. Bez wątpienia jest to nasza mocna strona. Jesteśmy na etapie osiągnięcia spektakularnego sukcesu. Wiem aż za dobrze, że on nie jest w stanie niczego rozwiązać. To nie superkrążowniki na kołach przebiją się przez linię Zygfryda. Rola marynarki wojennej jest dla mnie bardziej podejrzana niż kiedykolwiek, ponieważ jest ona narzędziem tych angielskich legarów. Ale mając handlarzy, których mamy, zrobimy niesamowity hałas wokół właściwie udanej bitwy morskiej. I nagle ten niesławny Reynaud przeżyje. Ta mordercza odyseja miała na celu odwrócenie uwagi od najczystszej taktyki parlamentarnej, polegającej na wyłowieniu tonącego gabinetu.

Coraz bardziej krzykliwe nagłówki ogłaszają, że na morzu toczy się gigantyczna bitwa. W tej ekstrawaganckiej typografii z łatwością rozpoznaję styl „gorących wiadomości”. Prouvost i Lazareff z Paris-Soir rozpoczynają bitwę pod Reynaudem według sprawdzonych metod nowojorskich łamigłówek, jak najnowszy film Garbo czy Morderstwo brodatej damy. Futrzani ludzie rozdzierają tę kolosalną operę mydlaną.

Idziemy od triumfu do triumfu. Wszystkie cieśniny duńskie są eksploatowane. Hitler głupio wrzucił swoich żołnierzy w pułapkę na myszy, której klapa opadła. Angielskie i francuskie siły ekspedycyjne wyruszyły, aby je zebrać. Wielka bitwa morska rozwija się niesamowicie. Zaczynamy liczyć liczbę zatopionych niemieckich statków. Pęcznieje z godziny na godzinę. Sumy wymykają się kontroli. Nie jest to możliwe, musimy dodać liczby z tej samej wysyłki dwa i trzy razy.

  1. Paul Reynaud będzie przemawiał w radiu. Podnosi się arogancki, piskliwy głos. Zwycięstwo ! Zwycięstwo ! „Stała trasa szwedzkiej rudy żelaza do Niemiec jest i pozostanie odcięta”.

Czym jeszcze jest ta szarlataneria? Zdobycie Narwiku mogło martwić Rzeszę siedem miesięcy wcześniej. Ale u nas wiosna. Zatoka Botnicka jest wolna od lodu, a Szwecja pozostaje neutralna. Nie dajmy się wmówić, że Niemcy nie będą w stanie zorganizować transportu rudy tą drogą. Co najwyżej są pozbawieni jednego udogodnienia. Czy wyobrażamy sobie, że huta stali w Niemczech w stanie wojny będzie z tego powodu bezczynna?

Jednak stała Izba wyraża uznanie dla pana Reynauda. To było do przewidzenia. Marynarka uratowała departament.

Trzeba wierzyć, że Armada Demokratów wypłynęła jedynie po ten triumf. Bo natychmiast znika. Ludzie spieszą się, by usłyszeć wieści o gigantycznej bitwie morskiej. Ale ona już zgubiła się we mgle.

Niemniej jednak „Te Deum” trwa. Ich hałas rekompensuje majestatyczną nieprecyzyjność.

Eskadry, które w tajemniczy sposób powróciły na skrzydła, w centrum uwagi znajdują się teraz siły ekspedycyjne, których radosne lądowanie na norweskim wybrzeżu właśnie zostało powitane potrójnymi wiwatami.

Uczony Thierry Maulnier pisze w „Je Suis Partout”, niestety! gdzie Alain Laubreaux nie może wypełnić wszystkich kolumn:

„Morze Północne należy do Wielkiej Brytanii. Czy Niemcom uda się wzmocnić i zaopatrzyć kilka oddziałów, które być może udało im się wylądować w rejonach Trondhjeim i Bergen? Do celów komunikacji z Norwegią nadal będą dysponować jedynie dwoma ramionami morskimi, Kattegat i Skagerrak, ale będą mogli komunikować się jedynie z skrajnym południem Norwegii i regionem Oslo. Rejon Narwiku i szwedzkie rudy żelaza pozostają dla nich praktycznie niedostępne zarówno drogą morską, gdzie króluje flota angielska, jak i lądową, gdzie brakuje szlaków komunikacyjnych. Alianci mogą atakować i niszczyć niemieckie jednostki morskie na Morzu Północnym, wysadzać wojska w Norwegii według własnego uznania i okupować region Narwiku, kiedy tylko chcą.

Wielcy kronikarze naszej niezwyciężoności łączą te wspaniałe powody ze wszystkimi epitetami, moralnością i geografią. Ale polilus, teraz spokojnie trzymaj się z daleka od tych dziesięciu centów

Paryż-Soir. Prawdopodobnie nie byliby w stanie wytłumaczyć, że zostajemy wciągnięci w bolesną, pełną zagrożeń kampanię, do diabła naszych baz, gdy wróg solidnie zabezpieczy swoje i że Reynaud właśnie zaangażował się w skandaliczny szantaż. Ale w swojej prostej mądrości rozumieją to znacznie lepiej niż akademicy paryscy. Domyślają się, że znowu zostali okłamani, że przygoda jest wyjątkowo krótkotrwała i że jedyną wzmianką o prawdziwym zwycięstwie jest historia Fritzów, którzy podbili Danię i połowę Norwegii.

Dwie wielkie floty są dumą zachodnich demokracji. Tysiące razy uznawano je za najbardziej nieodparty atut zwycięstwa. Zaliczyli rewelacyjny występ, na taki, jakiego nie odważylibyśmy się spodziewać. Wynik jest zerowy. Stopniowo dowiedzieliśmy się, że łodzie, każda kosztująca miliardy dolarów, pompatycznie się wycofały po zatopieniu kilku niszczycieli. Nasze panowanie nad morzem jest sprawą ewangelii. Ale pomimo tego niekwestionowanego mistrzostwa, jesteśmy zmuszeni przyznać, że Niemcy w Norwegii wzmacniają się łodziami, jak chcą, podczas gdy to nasze siły ekspedycyjne cierpią, odizolowane, pozbawione zaopatrzenia i mniejsze liczebnie.

Doniesienia prasowe są skromne. Krótko mówiąc, cofamy się całkowicie. Szczury Hitlera wpychają nas w pułapkę, w której mieliśmy je tak szybko ugotować. Chodźmy ! wszystko dzieje się regularnie. Wojna pozostaje wierna swoim korzeniom.

Wciąż podziwiam, że Rusomaniacy z Londynu i Paryża starannie pozwolili swojej nordyckiej wyprawie spędzić całą zimę, podczas której Finowie tak dobrze walczyli, gdzie to przedsięwzięcie miałoby głębokie znaczenie polityczne, gospodarcze, gdzie znaleźliby sojusznika w pracy. Czekali, aż ten sojusznik zostanie zmiażdżony, aż nie było już mowy o najmniejszym draśnięciu bolszewików, aby rzucić się na oślep.

Ale ten scenariusz fascynuje mnie coraz mniej. Monotonna głupota każdego zdarzenia osłabia moją ciekawość epilogu. Znów odnajduję pogodną obojętność żołnierza i tym razem dobrze się w niej zatapiam. Moi przyjaciele z biura to przemili chłopcy, modele filozofii. Mam wszystkie łaski panów kuchni. Zastanawiam się, jak możemy zaprzątać sobie głowę meblami i naczyniami, skoro miska i bela świeżej słomy tak doskonale zaspokajają wszystkie nasze potrzeby.

Pogoda jest piękna, a ja jestem w Alpach mojego Dauphiné, w górach, które niewątpliwie zawsze będę preferować. Nie słychać tam rogu Oberona, jak w lasach i na bajkowych jeziorach Salzkammergut. Ich romantyzm jest gwałtowny, wyniosły, czasem przytłaczający. Są na tyle piękni, na swój własny dziki i wspaniale plastyczny sposób, że nie mogą się obejść bez gościnności. Ich różnorodność jest nieskończona. Na tym zboczu występują modrzewie czarne, wodospady, lodowce, Kanada, Norwegia. Odwróć głowę, na drugim zboczu, oto naga skała, złota, z czerwonymi żyłkami, ze skręconą sosną rozpościerającą gałęzie na olśniewającym lazurowym tle. Jest południe, którego akcent śpiewa już na dnie doliny.

Pojechałem do Mont-Genèvre. Dla turystów jest bezpłatny. Mała wioska pełna jest paryskich narciarzy, zachwycających i wesołych. Młodzi funkcjonariusze sektora mają za zadanie reprezentować męską elegancję w białych wiatrówkach i przechadzają się po tarasach hoteli, gdzie ludzie opalają się na tle ostatnich opadów śniegu.

Wśród tej światowości i kokieterii armia umieściła swoje zapachy smaru armatniego, raty, starej skóry i stajni, które mieszają się ze śladami malowanych kobiet.

Łowcy zajmują ten zaawansowany i przyziemny sektor. Nie eleganckie „błękitne diabły” paradujące na Promenadzie Anglików w dni bitew kwiatowych, ale rustykalni myśliwi z Owernii, postrzępieni i ziemiści. Osiedlowe prace toczą się niewzruszenie wśród sportowych kabrioletów, ładnych dziewcząt ożywianych wiatrem i dwóch lub trzech ekscentrycznych starych Anglosasów. Zabłocone dresy sąsiadują z pięknymi obcisłymi spodniami, wielobarwnymi swetrami, kwiatowymi szalikami i blond lokami. Na jakimś zadymionym strychu, niedostępnym dla najświeższego powietrza we Francji, starszy sierżant księgowy i jego skrybowie żółkną nad zagadkami sytuacji administracyjnych.

Posterunek graniczny znajduje się dwieście metrów od urzędu celnego, w zrujnowanej chatce. Na balkonie, gdzie kiedyś stały chodaki alpinisty, wycelowany jest karabin maszynowy. Inny w ogrodzie, przyklejony do palika, patrzy w niebo, legalny i szczery DCA.

Ten żółty dom w zasięgu karabinka to włoskie zwyczaje. Ale nieogolony myśliwy, który stoi na straży między dwoma fryzowymi końmi, pod masztem trójkolorowej flagi, niewiele myśli o swojej wybitnej funkcji ostatniego żołnierza na francuskiej ziemi. Jest nawet całkiem pijany.

Z codziennych raportów z tego miejsca wiem, że na tych graniach i na tych przełęczach patrole włoskie i francuskie nieustannie się bratają. Oficerowie myśliwscy i oficerowie „Alpini” zmieniali się na stanowiskach: „Stosunki niezwykle serdeczne” – głosi raport. Żołnierze mają cenę za wymianę pernodu i prawdziwego wermutu z Turynu.

Dziś jest 15 kwietnia 1940. Jak daleko stąd wojna!

Kolejny martwy koń. Czuliśmy potrzebę zapewnienia całej kawalerii naszym oficerom, żołnierzom parku artyleryjskiego i inżynierom. Żaden z tych pięćdziesięciolatków nie stanął nigdy w strzemieniu, a konie jeden po drugim umierają z bezczynności. Muły ich naśladują, a chłopi, których stajnie zostały opróżnione przez rekwizycje, na próżno proszą o pożyczenie kilku zwierząt.

Oto półbrygada myśliwych, Dziewięć-Jeden z przodu, Osiem-Sześć w środku, Dziewięć-Pięć z tyłu. Rogi dmuchają w pełne dzwony. Ale mężczyźni w stadach już nawet nie wyznaczają czasu. Jeśli zgnijemy na miejscu, myśliwi, wymizerowani, kulejący, wyblakli, znikają w kawałkach na drogach. Sztab ufortyfikowanego sektora rekompensuje bezruch innych żołnierzy na nich. Od Barcelonnette do Lautaret, od Gap do Genèvre – trwa już ósmy miesiąc nieustannej i tajemniczej karuzeli, w której jeden batalion goni przed sobą drugi, gdy tylko zorientuje się, że dotarł do portu.

Ale to ostatni raz, kiedy widzę powracających myśliwych, zawsze trochę bardziej wyczerpanych i wycieńczonych, jak ministrowie na drewnianych koniach Republiki. Niektórzy Paryżanie uważali, że nie mogę przyzwoicie pozostać pionierem drugiej kategorii. Znaleźli mi pracę bardziej odpowiadającą moim talentom, w SR, proszę, w piątym biurze, brat bliźniak drugiego. Piąty urząd zbiera informacje, drugi je wykorzystuje.

Okazałem jedynie przeciętny entuzjazm. Połączenie biurokracji wojskowej i paryskiej budzi we mnie odrazę do najwyższego przywódcy. Wolałabym też nic nie zawdzięczać wspomnianym bohaterom, z którymi nie mam już cienia wspólnego uczucia. Przyznajmy się w końcu do tej absurdalnej rzeczy: mimo wszystko wyglądam trochę bardziej jak żołnierz na alpejskiej słomie niż przed biurkiem w Lesie Inwalidów. Ale jeden z oficerów SR, Kapitan V... którego spotkałem niedawno przy stole jednego z jego rodziców, proponuje mi zabawną misję. Wymagałoby to rozmów dwa lub trzy razy w tygodniu w Simplon Orient z kilkoma wybranymi podróżnikami przybywającymi z Europy Południowo-Wschodniej. W wojsku nazywamy to „kontaktem”. „Kontaktor” Simplona to młody kapitan artylerii, wybitny matematyk, ale tak niezdarny i niezdarny, że nie odbył dwóch rozmów w ciągu trzech miesięcy. Wpadliśmy na pomysł, wyjątkowy pod względem militarnym, aby powierzyć to zadanie dziennikarzowi, pracującemu w pełnej marynarce.

Moja wiara! dlaczego nie miałbym być tym dziennikarzem? Nigdy więcej nie będę miał okazji wykonywać tego osobliwego zawodu półszpiega. Dobrze jest otrząsnąć się z odrętwienia, które narasta we mnie w tym batalionie bezrobotnych pionierów, wśród zbieraczy dmuchawców i pijanych błotniaków. Poza Wolnym Korpusem, dokąd nigdy nie pójdę, jest mi obojętne toczenie tej wojny gdziekolwiek. W siódmej dzielnicy nie jesteśmy bardziej ukryci niż w Metz czy Briançon. Dałem się skusić. Właśnie przyszedł mój przelew. Zamierzam zrobić obowiązkowy postój w fatalnym GUP w Rzymianach. Jest prawie pusto, bardziej ponuro i obskurnie niż kiedykolwiek. Ale szanowni rempilés i Saint-Cyriens z „rdzenia” są nadal mocno przywiązani do swoich stanowisk. Bouboule nadal tam jest, podobnie jak mój były kapitan, który nie rozumie ani słowa w mojej sprawie, wyczuwa straszliwe nieprawidłowości, podaje mi numer rejestracyjny i każe natychmiast iść na ćwiczenia. Gdyby to miejsce mi się podobało, z pewnością mógłbym tam zakończyć wojnę.

Po desperackich wędrówkach zdecydowałem się napisać własną dokumentację. Znalazłem trificellida na tyle odważnego, aby je podpisać i 25 kwietnia wyruszyłem do Paryża.


 

 

 

 


IV

TE SR

 

[1] trzeba powiedzieć, że GUP to prawdziwe sito, a niebieska książeczka przechodzi przez wszystkie jej otwory. Pięć czy sześć naiwnych, w tym ja, zapytało po prostu: „Gdzie się przebraliśmy?” Ale wszyscy inni się śmieją: „Tak ci się spieszy z założeniem pierrota?” Poza tym strażnik mago, mój

[2] szkoda, że ​​wojsko podziękowało porucznikowi Barnaratowi za jego dobre zasługi, zamiast włączyć go np. do sztabu naszego nieustraszonego GUP-u.Poza temperamentem, z niezniszczalnej stali, byłby jej żywym sztandarem, jego godny symbol,

Prawdę mówiąc, temat ten jest dość niepokojący. Chciałem wierzyć w przypadki, w chlubną tradycję Pinarda, króla wojen francuskich. Bogowie wiedzą, że nikt nie jest mniej niechętny niż ja, jeśli chodzi o Piotra. Harmonijna pocharderie, dwa lub trzy razy w roku, zawsze będzie mi się wydawać odpowiednim sposobem na rozjaśnienie życia i odświeżenie umysłu. Kochany Roman Vossier rekompensował moje wojskowe buliony kilkoma frytkami z kiełbaskami w cieście i kurczakami w śmietanie, gdzie płyn był wart solidności, co o czymś świadczy. Podoba mi się, że dobry ksiądz Rousset w żadnym wypadku nie jest abstynentem. Chętnie żartowałem z moim przyjacielem Georgesem Blondem, który poświęca się niepokojącej chemii soków owocowych, na temat jego mściwych kampanii przeciwko pastis. Trzeba wierzyć, że naprawdę żyłem z dala od popularnego tchnienia Francji. Niestety! Znam ją teraz.

Wino ze swoimi konsekwencjami stało się wśród nas wielką plagą wojenną. Zbyt szybko zrozumieliśmy, że była to już jedna z plag pokoju. Ale nasze życie w stagnacji wydłużyło się i pogorszyło je w niewiarygodny sposób. Nadzieja litra lub szklanki jest zdecydowanie jedyną sprężyną zdolną wyprostować ten batalion przygarbionych ludzi.

   

 

 


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